Quel sera le sort des terroristes coincés dans les tunnels ?

Quel sera le sort des terroristes coincés dans les tunnels ?

Tunnels de Rafah : la dépouille de Hadar Goldin paralyse l’offensive israélienne contre le Hamas

Dans les entrailles sablonneuses de Rafah, au sud de la bande de Gaza, une équation insoluble hante les stratèges de Tsahal. Piégés depuis des semaines dans un dédale de galeries bétonnées, une centaine de combattants du Hamas – estimations récentes évoquent jusqu’à 200 hommes – attendent leur sort, entre reddition forcée et anéantissement pur. L’armée israélienne, qui contrôle la zone depuis mai 2024, oscille entre deux pôles : une frappe aérienne ou terrestre décisive pour éradiquer ces poches de résistance, ou une trêve tactique pour préserver un atout priceless. Ce revirement, impulsé par des évaluations du renseignement, repose sur une révélation glaçante : la possible présence, dans l’un de ces tunnels du quartier de Jenina, de la dépouille du capitaine Hadar Goldin, enlevé et présumé mort en 2014 lors de l’opération Bordure protectrice.

Ce fantôme du passé, âgé de 23 ans au moment de sa disparition, incarne les plaies non refermées de la guerre asymétrique israélo-palestinienne. Tué par une grenade antichar près de Rafah, son corps fut emporté par les poseurs d’embuscades du Hamas, dans un rituel macabre de négociation post-mortem. Onze ans plus tard, des interceptions et des témoignages de déserteurs hamas indiquent que ses restes, momifiés dans le désert, reposent au cœur de ce réseau souterrain, aux côtés d’armes cachées et de munitions. Cette certitude, corroborée par des drones de reconnaissance et des analyses sismiques, impose une prudence inédite à l’état-major. Toute explosion risquerait d’engloutir à jamais cette relique nationale, transformant une victoire tactique en deuil éternel pour la famille Goldin, qui milite inlassablement via le collectif des familles d’otages pour son rapatriement.

Le débat au sein du gouvernement Netanyahu s’enflamme. Initialement, la doctrine prônait l’élimination systématique : des frappes de précision, comme celles qui ont rasé 80 % des tunnels hamas en 2024, visaient à neutraliser les 30 000 combattants estimés du groupe. Mais les pressions montent. Le chef d’état-major, le lieutenant-général Eyal Zamir, a récemment plaidé pour un troc audacieux : libérer ces 150 à 200 terroristes retranchés en échange exclusif du retour de Goldin. « Aucun ne sortira vivant sans contrepartie », a-t-il martelé lors d’une réunion sécuritaire, selon des fuites internes. Cette proposition, conditionnée à une reddition inconditionnelle, s’inscrit dans une série d’échanges antérieurs : en janvier 2025, le Hamas avait restitué les restes du sergent Oron Shaul, disparu en 2014, contre 15 prisonniers palestiniens libérés par Israël.

Les médiateurs qataris et égyptiens, habitués à ces marchandages funèbres, ont intensifié leurs appels. Ils exigent un « passage sûr » pour les fuyards hamas, promettant en retour non seulement Goldin, mais aussi des indices sur d’autres disparus comme le colonel Assaf Hamami, dont le corps est localisé dans un site similaire à Khan Younès. Israël, intransigeant, rejette toute concession unilatérale. Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, dans un discours prononcé hier à Jérusalem, a réaffirmé : « Surrender ou enterrez-vous sous terre. » Cette rhétorique musclée reflète une stratégie hybride : asphyxie progressive des tunnels via inondations d’eau salée et coupures d’oxygène, tout en maintenant la pression diplomatique. Des sources indiquent que le Hamas, affaibli par 40 000 pertes cumulées depuis octobre 2023, a tacitement accepté de livrer Goldin, mais traîne des pieds, utilisant ce levier pour exiger un cessez-le-feu global.

Ce dilemme souterrain met en exergue les paradoxes de la guerre de Gaza, entrée dans sa troisième année. Rafah, jadis plaque tournante du commerce illicite avec l’Égypte – 500 tunnels démantelés en 2024 seuls –, est devenu un tombeau potentiel pour les bourreaux d’hier. Tsahal, fort de 300 000 réservistes mobilisés, déploie des unités d’élite comme le corps Yahalom, spécialisées dans les opérations souterraines, équipées de robots serpents et de capteurs thermiques. Pourtant, la peur de collateraliser un héros national freine l’assaut. La famille Goldin, soutenue par des manifestations hebdomadaires à Tel-Aviv, accuse le gouvernement de tiédeur, rappelant que 58 otages civils et militaires restent aux mains du Hamas, dont 30 jugés en vie par le renseignement.

Au-delà de Rafah, cette saga interroge la viabilité des Accords d’Abraham élargis. L’Égypte, voisine exaspérée par les infiltrations, a renforcé son mur frontalier avec 40 km de barrières électrifiées, tandis que les États-Unis, via des livraisons d’obus GBU-39, poussent pour une résolution rapide. Si l’échange aboutit, il pourrait catalyser des négociations plus larges : restitution des corps contre un gel des constructions à Gaza, sous supervision sunnite. Mais un échec exposerait Israël à des critiques internationales, accusé de prolonger le calvaire pour des motifs symboliques. Zamir, conscient des enjeux, prépare un plan B : extraction chirurgicale via des incursions nocturnes, risquée mais honorable.

Dans ce labyrinthe de sable et de secrets, le sort de Hadar Goldin n’est pas qu’une affaire personnelle ; c’est le fil rouge d’une nation qui refuse l’oubli. Les tunnels de Rafah, creusés à 70 mètres de profondeur pour défier les bombes, pourraient bien sceller non seulement celui de 200 djihadistes, mais l’héritage d’un soldat dont le sacrifice hante encore les veillées du Shabbat.

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