Les nouvelles règles de l’eurovision vont-elles pénaliser Israël ?
L’Union européenne de radio-télévision a parlé sobrement de « renforcer la confiance dans le vote ». Mais derrière la formule, les changements annoncés pour l’Eurovision soulèvent une question que beaucoup se posent déjà : ces nouvelles règles visent-elles, sans le dire, la participation israélienne au concours ?
L’UER a confirmé une refonte du système de vote, applicable aux prochaines éditions. Première mesure phare : le retour en force des jurys professionnels lors des demi-finales, avec un poids bien plus important dans le résultat. Là où le public faisait jusqu’ici la pluie et le beau temps, la note des experts reviendra jouer le rôle de contre-poids. Parallèlement, le téléspectateur verra sa marge de manœuvre réduite : le nombre de votes par personne sera limité à 10, contre 20 auparavant, et il ne sera plus possible de voter plusieurs fois pour un même pays.
Autre nouveauté, les votes qui ne respecteront pas les critères établis seront purement et simplement invalidés. L’UER, qui dispose déjà d’outils pour repérer des schémas de vote anormaux, annonce un durcissement des contrôles, y compris pour les votes provenant de pays ne participant pas au concours. Dans le même esprit, l’organisation veut encadrer davantage les campagnes de promotion orchestrées par des gouvernements ou des groupes d’intérêt, accusés d’injecter des moyens démesurés dans la mobilisation des fans.
Officiellement, ces ajustements sont présentés comme la suite logique de plusieurs années de soupçons sur des « irrégularités » ou des alliances douteuses entre jurys nationaux. Mais le calendrier interroge. Ils surviennent après deux éditions marquées par de violentes polémiques autour d’Israël : appels au boycott, manifestations devant les salles, pétitions réclamant l’exclusion de la délégation israélienne, voire déclarations de responsables politiques européens.
Sur le plan musical, le verdict du public a pourtant été sans ambiguïté. Alors que les chanteuses puis le chanteur israéliens faisaient l’objet de menaces, le télévote leur a accordé un soutien massif, parfois en décalage complet avec les notes des jurys. Lors du dernier concours, l’artiste israélien, survivant d’un attentat terroriste, a dominé le vote du public mais terminé derrière le vainqueur grâce au score des jurys. Pour certains diffuseurs, cet engouement populaire s’expliquerait par une campagne numérique extrêmement structurée, largement relayée par des soutiens d’Israël, parfois en dehors du public eurofan traditionnel.
C’est précisément ce phénomène que les nouvelles règles semblent vouloir encadrer : réduire la possibilité pour un camp très mobilisé de « saturer » le système en votant massivement, et redonner aux jurys un rôle de filtre lorsque la dynamique militante prend le pas sur les critères musicaux classiques. Officieusement, des responsables de chaînes européennes reconnaissent que la question israélienne a été centrale dans les discussions internes.
Du côté israélien, la lecture est toute autre. La chaîne publique souligne que les campagnes d’appel au vote ne faisaient qu’utiliser les règles existantes, comme le font tous les pays qui peuvent compter sur une diaspora importante ou un fan-club actif. Elle rappelle aussi que les jurys ont eux-mêmes parfois été au cœur de scandales, notamment lorsque l’UER a dû annuler les votes de plusieurs pays pour collusion manifeste. Limiter l’expression du public, argumente-t-on, reviendrait à restreindre la seule composante réellement populaire d’un concours qui se veut paneuropéen.
En toile de fond, le débat sur la présence même d’Israël à l’Eurovision continue. Certains gouvernements et artistes réclament son exclusion en raison de la situation au Proche-Orient ; d’autres jugent qu’un concours musical ne doit pas devenir un instrument de sanction diplomatique. L’UER, elle, s’accroche à la ligne de la « neutralité » culturelle, tout en admettant la nécessité de revoir ses règles pour préserver la crédibilité du vote.
Reste à voir si cette réforme calmera les tensions ou si elle sera perçue, surtout en Israël, comme une réponse déguisée au succès du télévote en sa faveur. Une chose est certaine : à l’heure où l’Eurovision est devenu un miroir des fractures politiques européennes, la manière dont ces nouvelles règles seront appliquées dira beaucoup de la capacité du concours à rester un espace de compétition musicale plutôt qu’un champ de bataille symbolique.
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