Zamir a ôté ses gants devant Netanyahu et Katz

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Zamir a ôté ses gants devant Netanyahu et Katz

La scène avait tout pour être consensuelle : un séminaire à Sde Boker, pour marquer le 52ᵉ anniversaire de la mort de David Ben-Gourion, père fondateur de l’État et de son armée. Pourtant, c’est là, dans ce décor hautement symbolique, que le chef d’état-major Eyal Zamir a choisi d’ôter ses gants. Sans jamais nommer directement ni le Premier ministre, ni le ministre de la Défense Israel Katz, il a livré un véritable manifeste sur la responsabilité du commandement – que beaucoup ont entendu comme une mise en cause à peine voilée du leadership politique actuel.

Face au Forum de l’état-major général, Zamir a rappelé que, pour Ben-Gourion, diriger consistait d’abord à porter un fardeau, même lorsqu’il paraît écrasant. « Ce fardeau est le nôtre, c’est un droit ; nous le portons. Je le porte », a-t-il martelé. Pour lui, la responsabilité du commandement ne se délègue pas, ne se partage pas, ne se dilue pas dans des jeux de communication. Elle impose de regarder la vérité en face, de reconnaître les erreurs et de reconstruire.

Depuis le « jour tragique » du 7 octobre 2023, a-t-il rappelé, Tsahal se bat sur plusieurs fronts et mène un travail d’introspection douloureux. Pour Zamir, les critiques et les explications ne suffisent plus : il faut un « leadership courageux et déterminé, capable de transformer la réalité ». Non pas un leadership qui « effraie et submerge », mais un leadership qui élève, inspire, assume. L’armée, dit-il, est le « laboratoire du leadership de la nation », et le chef doit être « le premier à se sacrifier, le premier à assumer, le premier à corriger ».

Ces phrases prennent une tout autre couleur à la lumière de la crise ouverte qui oppose désormais le chef d’état-major au ministre de la Défense. À sa prise de fonctions, en mars 2025, Zamir a commandé un audit global des enquêtes internes menées par Tsahal sur les défaillances du 7 octobre, confié au général de réserve Samy Turgeman. Le rapport a pointé des failles graves de renseignement, de préparation et de doctrine, ainsi que les limites des premières enquêtes, jugées trop centrées sur l’appareil militaire et soigneusement tenues à distance du niveau politique.

Sur la base de ces conclusions, Zamir a pris une série de décisions disciplinaires inédites : plusieurs généraux ont été relevés de leurs fonctions, d’autres sévèrement réprimandés. Il a parlé publiquement de « défaillance systémique et retentissante » et assumé, au nom de l’armée, une part de responsabilité dans le désastre du 7 octobre. Une démarche saluée par une partie de l’opinion, mais qui a aussi braqué certains soutiens du gouvernement, inquiets de voir la lumière pointer trop près du sommet de l’exécutif.

C’est dans ce contexte que le ministre de la Défense Israel Katz a exigé de réexaminer le rapport Turgeman et a ordonné le gel temporaire des nominations au sein du haut commandement. Geste présenté comme un souci de « rigueur » mais perçu au sein de l’armée comme une remise en cause directe du travail d’enquête de Tsahal – et comme un levier de pression politique sur le chef d’état-major.

Réponse de Zamir : une déclaration publique inhabituellement dure, accusant Katz de jeter le doute sur l’intégrité des investigations et de nuire à la préparation opérationnelle de l’armée en paralysant les promotions au sommet. Pour un chef d’état-major israélien, habitué à s’exprimer avec retenue sur l’échelon politique, le ton tranche avec la prudence traditionnelle. D’où cette impression, à Sde Boker, que son discours sur le « leadership qui ne se dérobe pas » s’adressait autant aux commandants de brigade qu’aux responsables assis au sommet de l’État.

Pris entre deux de ses plus hauts responsables de la défense, Benjamin Netanyahu a dû intervenir. Le Premier ministre a convoqué séparément Katz et Zamir pour tenter d’apaiser la crise et de restaurer la coordination entre les niveaux politique et militaire. Dans le même temps, des fuites indiquent que certains proches de Netanyahu regrettent la nomination d’un chef d’état-major jugé « trop indépendant », tandis que d’autres rumeurs évoquent la possibilité d’un remplacement du ministre de la Défense pour mettre fin au bras de fer.

En toile de fond, la société israélienne réclame toujours une véritable commission d’enquête indépendante sur le 7 octobre, à l’image des précédents historiques confiés à la Cour suprême. L’affrontement entre Katz et Zamir ne porte donc pas seulement sur des promotions ou un rapport supplémentaire : il cristallise la question centrale de la période actuelle – qui assumera, au final, le poids politique et moral de la pire catastrophe sécuritaire de l’histoire du pays.

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