Sur la Vuelta 2025, le cyclisme définitivement relégué au second plan. Plus précisément sur le parking d’un hôtel, où a été improvisée une cérémonie protocolaire pour célébrer le vainqueur de l’épreuve, Jonas Vingegaard. La 3e victoire du Danois sur un grand tour a été éclipsée par une ultime manifestation propalestinienne sur la Gran Via de Madrid, progressivement envahie dimanche, vers 18h, forçant les organisateurs à neutraliser la course. Selon le gouvernement, plus de 100.000 personnes se sont rassemblées dans la capitale espagnole pour dénoncer les horreurs commises à Gaza.
Tiraillé, le leader de Visma Lease a bike déplore ce « moment d’éternité » volé par des militants dont il reconnaissait le droit à manifester jusqu’à un certain point, à savoir, « pas d’une manière qui influe ou mette en péril notre course ». Les propos contrastent avec l’indulgence des derniers jours, celle qui faisait dire à Vingo que « les gens le font pour une raison. Ce qui se passe actuellement est horrible ».
Israel-Premier Tech déjà sous haute sécurité sur le Tour de France
De Bilbao, où la 11e étape n’avait déjà pas pu arriver à son terme, à Madrid, les manifestations contre la guerre menée par Israël ayant causé la mort de plus de 64.000 Palestiniens ont fait tomber l’absurde bouclier de l’apolitisme dans le sport et puni les instances sportives pour leur fuite en avant sur la question israélienne. En bout de chaîne, les coureurs ont été placés dans une situation inconfortable, à l’image du Français d’Arkéa Victor Guernalec, bloqué dimanche par des manifestants brandissant une banderole au milieu de la route, à la limite de l’agacement.
Personne n’ignorait pourtant au sein du peloton combien la formation Israel-Premier Tech devenait encombrante malgré elle pour son sport. Sur le Tour de France, l’équipe fondée par l’Israélo-canadien Sylvan Adams – proche de Netanyahou qui l’a par ailleurs félicité de ne pas avoir « cédé à la haine et l’intimidation » sur la Vuelta – avait été placée sous très haute sécurité, tandis que des collectifs pro palestiniens appelaient déjà à son boycott.
Si la Grande Boucle s’est finalement bien déroulée, elle ne pouvait servir de référence avant le troisième grand tour de l’année en raison d’un contexte ibère bien particulier : l’Espagne a reconnu l’Etat de Palestine en mai 2024. « Pas seulement une question de justice historique, une nécessité si nous voulons parvenir à la paix », expliquait alors le Premier ministre Pedro Sanchez.
Le Premier ministre espagnol dit son « admiration » pour les manifestants
Plus largement, le soutien envers la cause palestinienne est beaucoup plus massif et unanime chez nos voisins espagnols, ce dont s’est par ailleurs réjoui Sanchez après les manifestations de dimanche soir. « Nous tenons à exprimer notre reconnaissance et notre respect absolu envers les sportifs, mais aussi notre admiration envers un peuple comme le peuple espagnol qui se mobilise pour des causes justes, comme celle de la Palestine. »
En lui proposant de partir, mais en refusant de montrer la sortie à Israel-Premier Tech après les premières tensions sur les routes basques, les organisateurs ont offert au gouvernement une nouvelle occasion de faire valoir leur humanisme autant qu’ils ont condamné le Tour d’Espagne au chaos. Après la 11e étape, le directeur technique de la Vuelta Kiko Garcia laissait entendre qu’un tel choix relevait de la responsabilité de l’UCI sans la nommer directement. « Qui peut exclure le Maccabi Tel-Aviv de l’Euroligue de basket ? Celui qui joue contre eux, le Real Madrid ? Non, ça doit être une fédération internationale », déclarait-il dans des propos recueillis par L’Équipe.
« Si l’UCI et les instances responsables n’ont pas pris les bonnes décisions suffisamment tôt, le fait que les manifestants aient obtenu gain de cause est très préjudiciable au cyclisme à long terme, écrit pour sa part le coureur Michal Kwiatkowski sur X. On ne peut pas faire comme si de rien n’était. »
Ou plutôt, on ne peut plus. Tant pour des questions de morale – la situation à Gaza est insoutenable – que de cohérence – le double standard par rapport à la Russie est questionnable – et désormais de sécurité dans le sport. La formation israélienne a bien tenté de faire amende honorable en se renommant « IPT » dès les Grands Prix de Québec, vendredi dernier, et Montréal, dimanche. En vain : dimanche, plusieurs centaines de manifestants se sont également rassemblées pour contester la participation de l’équipe accusée de « sportwashing » et appeler au boycott des courses.
« Désormais, il est clair pour tout le monde qu’une course cycliste peut servir de terrain propice à des manifestations, et que la prochaine fois, la situation ne fera qu’empirer, car quelqu’un a laissé faire et a fermé les yeux », s’inquiète Kwiatkowski. A moins que les instances du cyclisme s’emparent du sujet. Pour info : dans un an, le Tour de France s’élancera de Barcelone.
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