Reporters sans frontières avait déjà transmis plusieurs dossiers à la Cour pénale internationale, déposant plainte pour crimes de guerre commis contre des journalistes palestiniens à Gaza, la troisième plainte depuis 2018, et contre un journaliste israélien, tué et blessés dans l’exercice de leurs fonctions. L’organisation alertait dès novembre sur une « éradication du journalisme à Gaza ».
« Parmi les dix journalistes tués entre le 18 et le 20 novembre, au moins trois d’entre eux l’ont été dans le cadre de leurs fonctions ou en raison d’elles. Le 18 novembre, le directeur de l’agence de presse palestinienne en ligne Quds News, Hassouna Sleem, et le photojournaliste indépendant Sary Mansour ont été tués lors d’un assaut israélien contre le camp de réfugiés de Bureij, dans le centre de la bande de Gaza. Selon les informations de RSF, les deux reporters avaient reçu une menace de mort en ligne, 24 heures auparavant, pour des motifs liés à leur métier« , peut-on lire sur le site de RSF.
Pour Nasser Abou Baker, il ne fait aucun doute que dans beaucoup de cas les journalistes ont été spécifiquement visés. Des bâtiments d’agences de presse, aussi occidentales, ont été bombardés, parmi lesquels ceux de Reuters et d’AFP ; les 22 stations radio locales ont été détruites, liste-t-il.
« Lorsque nous affirmons que ces attaques sont systématiques, nous avons des témoignages. Hier (mardi dernier, ndlr), les occupants ont appelé mon adjoint dans la Bande de Gaza, pour le menacer : s’il restait dans sa maison, il serait ciblé. Avant de viser la maison de Wael El Dahdouh, correspondant d’Al Jazeera, et de tuer sa famille, les militaires ont appelé sa fille… J’ajoute que le porte-parole de l’armée israélienne lui-même a dit aux correspondants de Reuters et d’AFP qu’ils n’étaient pas responsables de la vie des journalistes ».
Notons que plusieurs enquêtes d’ONG, mais aussi d’agences de presse (Reuters et AFP) pose la question du ciblage délibéré de journalistes par l’armée israélienne : dans le cas de la mort, le 14 octobre, du journaliste libanais Issam Abdallah, travaillant pour de Reuters, la succession de deux frappes, espacées de 37 secondes, montre qu’elles étaient ciblées, soulignent les experts interrogés par l’AFP et Airwars. Les journalistes étaient par ailleurs clairement identifiables.
Le journaliste de 37 ans a été tué alors qu’il travaillait avec six journalistes à proximité de la frontière avec Israël. Deux collègues de Reuters, deux journalistes de la chaîne Al Jazeera, et deux de l’AFP ont été blessés, dont la photographe Christina Assi, 28 ans, grièvement atteinte, et qui, après une amputation de la jambe droite, reste hospitalisée.
Une enquête de l’agence Reuters conclut elle aussi à des tirs de char israéliens.
Deux autres investigations menées séparément par les organisations de défense des droits humains Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International, que l’AFP a pu consulter avant leur publication, désignent toutes deux « des frappes israéliennes« .
HRW a condamné « une attaque apparemment délibérée contre des civils » qui « devrait ou pourrait faire l’objet de poursuites pour crime de guerre« .
Pour Amnesty, « il s’agit vraisemblablement d’une attaque directe sur des civils qui doit faire l’objet d’une enquête pour crime de guerre« .
Sollicitée par l’AFP sur les conclusions de son enquête conjointe avec Airwars, l’armée israélienne n’a pas répondu.
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