Résolution de l’ONU pour Gaza : cheval de Troie contre Israël, ou formidable opportunité ?

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La résolution 2803 pour Gaza a été adoptée le 17 novembre 2025 tôt dans la nuit.

Depuis quelques jours, concernant le projet de paix pour Gaza qui devait être présenté et validé par le Conseil de sécurité de l’ONU, j’observe plusieurs types de comportements de la part de ceux qui, au minimum, se méfient du président Trump, de ceux qui pensent qu’il se sert d’Israël pour atteindre ses ambitions personnelles – un prix Nobel de la paix, son enrichissement personnel avec ses projets immobiliers (bien réels) au Qatar ou en Arabie Saoudite, ou ceux qui considèrent que Trump est vendu au Qatar.

  • J’ai vu des commentateurs qui, visiblement n’ont pas lu le projet de résolution, le critiquer.
  • J’en ai vu d’autres qui l’ont lu, qui le citent et qui tirent des conclusions diamétralement opposées à ce qui est écrit. En fait, ils les interprètent dans un sens négatif, dans un scénario catastrophe. Ils prédisent l’issue avec certitude – oui parce qu’eux connaissent l’avenir – et elle est la plus pessimiste et la plus dramatique possible, et ils affirment avec force que c’est ainsi qu’il faut lire ces articles du plan en 20 points.
  • Enfin, les pires de tous : j’ai lu des analyses qui visiblement fouillent le plan Trump à la recherche des endroits où ils peuvent trouver de quoi justifier leur biais hostile à ce plan.

Je ne vais rien faire de tout cela, et c’est pourquoi vous êtes si nombreux à me lire.

Je vais m’en tenir à la manière dont je considère qu’un journaliste doit faire son travail : vous présenter cette résolution de la façon la plus neutre possible, puis vous présenter les arguments des uns et des autres, des pour et des contre, des gens qui se méfient de Trump et des gens qui l’apprécient et lui accordent leur confiance, afin que vous formiez votre propre jugement éclairé avec toutes les informations en main sur cette étape historique pour Israël.

Évidemment, il restera les inconditionnels, ceux qui savent tout, ceux qui ont décidé qu’ils savent tout, ceux qui pensent qu’ils savent tout, et ceux qui ont décidé que quoi que diront les intéressés, quoi qu’on écrive et qu’on leur présente, leur religion est faite : Trump est un ennemi, Israël ne peut et ne doit compter que sur lui-même (sans refuser l’aide américaine de 3,8 milliards de dollars ou celle de l’Allemagne), et rien de ce qu’on pourra leur dire, leur écrire, ou leur montrer ne les fera changer d’avis. Cependant, si j’osais une remarque : ceux qui décident que rien ne les fera changer d’avis avouent que leur opinion ne repose pas sur la logique et les faits, mais sur leur croyance. A eux, je n’ai rien à dire, personne n’a rien à leur dire.

Comparaison entre la résolution 2803 et le plan de paix original en 20 points de Trump pour Gaza

1 L’ONU reçoit un mandat exécutoire pour démilitariser Gaza

  • Le plan de paix original en 20 points pour Gaza de Trump, publié en octobre 2025, décrivait un cadre pour le cessez-le-feu, les échanges d’otages/de prisonniers, la démilitarisation, la transition vers la gouvernance et la reconstruction, avec un désarmement (point 13) supervisé par des observateurs indépendants et un retrait des Forces de défense israéliennes (FDI) lié à « des normes, des étapes et des délais liés à la démilitarisation » (point 16).
  • La résolution 2803 formalise et renforce ces éléments grâce à des mécanismes d’application décidés par Donald Trump et soutenus par l’ONU, rendant le rejet plus coûteux sur le plan diplomatique et opérationnel pour le Hamas.

La résolution autorise explicitement le Conseil de paix (BoP) — un organe transitoire présidé par le président Trump — à créer et déployer une Force internationale de stabilisation (ISF) temporaire pouvant compter jusqu’à 20 000 soldats (non membres de l’ONU, mais sous commandement unifié) avec pour mandat de « soutenir le processus de démilitarisation, y compris la destruction des infrastructures militaires et le démantèlement définitif des armes des groupes armés non étatiques » (dont le Hamas).

L’ISF peut utiliser « toutes les mesures nécessaires conformes au droit international » pour surveiller les cessez-le-feu, sécuriser les frontières et empêcher l’afflux de munitions. Son déploiement débutera en janvier 2026 et son mandat sera de deux ans (renouvelable).

Par rapport au projet qui avait recueilli l’accord du gouvernement israélien, la résolution transforme les « observateurs indépendants » (point 13) du plan initial en « une force internationale armée » robuste et opérationnelle, soutenue par l’autorité du Conseil de sécurité des Nations unies et sous les ordres du président américain.

Conclusion : alors que le plan Trump initial reposait sur des « garanties de désarmement données par les partenaires régionaux » (point 14) sans application par l’ONU ; le plan 2803 l’élève au rang de droit international contraignant, augmentant ainsi les enjeux en cas de non-respect.

2 Liens de cause à effet entre la démilitarisation et le retrait des FDI

  1. Extrait de la résolution 2803 : les paragraphes opérationnels précisent que le retrait de l’armée israélienne se fera « sur la base de normes, d’étapes et de délais liés à la démilitarisation qui seront convenus entre l’armée israélienne, les forces de sécurité israéliennes, les garants et les États-Unis », en conservant une « présence dans le périmètre de sécurité » jusqu’à ce que Gaza soit « à l’abri de toute menace terroriste renaissante ».

    Cela fait écho au plan Trump, mais le codifie, en ajoutant la supervision du Conseil de sécurité des Nations unies et du président du Conseil de Paix.

  2. Pourquoi il est plus difficile pour le Hamas de ne pas se conformer à ce plan : le Hamas ne peut pas retarder le désarmement sans interrompre l’ensemble du processus (aide, reconstruction, etc.), car les étapes sont désormais vérifiables, chronologiques et liées à la stabilité supervisée par l’ONU et Trump. Un respect partiel du plan par le Hamas et les autres factions terroristes entraînera une présence israélienne indéfinie et légale.
  3. Comparaison avec le plan Trump : le texte original (point 16) utilisait une formulation similaire, mais ne prévoyait pas de vérification par l’ONU ; la résolution 2803 en fait une séquence, une suite d’événements imposée par une résolution, ce qui réduit le pouvoir de négociation du Hamas.

3 Mécanismes obligatoires de rapport semestriel et de responsabilité issus de la résolution 2803 :

  • Le BoP doit soumettre « des rapports écrits au Conseil de sécurité tous les six mois » sur les progrès réalisés, notamment en matière de démilitarisation, de gouvernance et de distribution de l’aide. Ces rapports garantissent la transparence et permettent au Conseil de sécurité des Nations unies d’ajuster ou de prolonger les mandats, le BoP se voyant accorder la « personnalité juridique internationale » pour le financement et les opérations.
  • Pourquoi cela réduite les marges de manœuvre du Hamas : un contrôle continu expose les cas de non-conformité à l’échelle mondiale, ce qui exerce une pression sur les dirigeants externes du Hamas (par exemple au Qatar) par le biais des voies diplomatiques. Il lie également l’aide/le financement de la reconstruction à un désarmement vérifié, par le biais d’un fonds fiduciaire géré par les donateurs et coordonné par la Banque mondiale.
  • Comparaison avec le plan Trump initial : il n’existait aucun rapport équivalent ; le plan initial (points 7 à 10) promettait une aide et un développement sans contrôle structuré, ce qui laissait place à davantage d’ambiguïté sur le désarmement.

Modifications apportées au texte entre les versions préliminaires et le document voté

Le texte a été révisé à plusieurs reprises avant le vote, renforçant les pressions sur le Hamas tout en ajoutant des concessions pour obtenir un soutien plus large des pays signataires et des Etats arabes:

  • Projet initial (3 novembre 2025) : mandat général de deux ans pour la Force internationale de stabilisation (ISF) sans lien explicite avec la démilitarisation ni obligation de rendre compte.
  • Premier projet révisé (10 novembre 2025) : ajout d’un retrait progressif des FDI lié à la démilitarisation ; obligation de rapports semestriels ; référence aux réformes de l’Autorité palestinienne en vue d’un transfert éventuel ; suppression d’une clause accusant l’UNRWA de détournement de l’aide (pour apaiser les critiques).
  • Deuxième projet révisé (12 novembre 2025) : intégration d’une clause sur une « voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien » après la réforme et le redéveloppement, équilibrant la sécurité pro-israélienne et les aspirations pro-palestiniennes.
  • Document voté (S/2025/748, 17 novembre 2025) : Conservation de ces ajouts, soulignant le rôle de l’ISF dans la « protection des civils, y compris les opérations humanitaires » et la sécurité des frontières avec l’Égypte et Israël. Ces modifications ont répondu aux préoccupations des pays qui se sont abstenus (Russie, Chine), tout en renforçant l’application de la résolution.

Ces révisions ont rendu le texte final plus acceptable pour les pays à majorité musulmane qui l’ont approuvé (par exemple, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis), tout en consacrant la démilitarisation comme un élément non négociable.

Avantages supplémentaires pour Israël dans la résolution

Au-delà des pressions en faveur du désarmement, plusieurs éléments favorisent davantage Israël que le plan initial de Trump :

  • Priorité à la sécurité des frontières : l’ISF doit « sécuriser les zones frontalières » avec Israël et l’Égypte, empêcher « l’entrée de munitions à Gaza » et faciliter « la circulation sécurisée des marchandises », répondant ainsi directement aux préoccupations d’Israël en matière de contrebande (point 15 dans l’original, mais désormais mandaté par l’ONU).
  • Pas d’annexion de Gaza, mais un périmètre flexible : interdit explicitement « l’occupation ou l’annexion » par Israël (conformément au point 16), mais autorise le maintien d’un « périmètre de sécurité » jusqu’à ce que les menaces soient éliminées, donnant à Israël une influence similaire à un droit de veto sur le calendrier via des accords d’étape.
  • Financement et neutralité : des contributions volontaires financent l’ISF/BoP, réduisant ainsi les risques de partialité de l’ONU, tandis que la gouvernance technocratique (point 9 dans l’original) exclut totalement le Hamas, empêchant ainsi sa résurgence.

En résumé, l’approbation de la résolution 2803 par le Conseil de sécurité des Nations unies – via des mandats exécutoires de l’ISF, des rapports et des liens entre les étapes importantes – fait passer la dynamique d’une proposition négociée par les États-Unis à un cadre internationalement contraignant, acculant le Hamas en faisant du désarmement une condition préalable à la légitimité, à l’aide et aux progrès vers la possibilité de création d’un État. Cela contraste avec la structure plus ambitieuse et dépendante des partenaires du plan Trump.

La création d’un État palestinien dans le plan Trump et la résolution 2803

1 Le plan de paix en 20 points de Trump pour Gaza et la résolution font tous deux référence à la création d’un État palestinien, mais aucun ne s’engage à établir immédiatement et sans condition un État souverain. Au contraire, ils décrivent une voie sous conditions, liée à des réformes approfondies, des garanties de sécurité et une surveillance multilatérale, créant ainsi des leviers importants permettant à Israël d’influencer, de retarder ou de bloquer efficacement et totalement le projet.

Cela correspond au consensus politique israélien observé (par exemple, l’opposition publique du Premier ministre Netanyahou et du chef de l’opposition Yair Lapid à la création d’un État palestinien), tandis que l’approche de Trump reste délibérément vague sur les délais et la mise en œuvre afin de s’adapter à cette dynamique.

Le plan Trump se concentre principalement sur la stabilisation immédiate de Gaza (cessez-le-feu, démilitarisation, reconstruction) plutôt que sur des négociations israélo-arabes plus larges. La création d’un État est abordée de manière indirecte au point 20 : « Établir un dialogue pour une paix durable », qui appelle les États-Unis à « faciliter un dialogue structuré entre Israël et l’Autorité palestinienne (AP) afin d’étudier l’intégration de Gaza dans un cadre de gouvernance arabe réformé, pouvant conduire à une entité arabe unifiée avec des voies vers l’autodétermination ». Les éléments clés sont les suivants :

  • Vision du rôle de Gaza : Gaza serait « intégrée en tant qu’État sous l’Autorité palestinienne » après la démilitarisation et la transition vers un organe technocratique dirigé par l’AP (points 9 à 11). Cela implique que Gaza ferait partie d’un futur État arabe, mais seulement après l’exclusion du Hamas et les réformes de l’AP (par exemple, mesures anti-corruption, reconnaissance d’Israël, arrêt du paiement aux terroristes).
  • Conditions et imprécisions :
    • aucun calendrier fixe ni engagement contraignant ; les progrès dépendent d’« accords mutuels sur la sécurité et l’intégration économique ».
    • Israël conserve un droit de veto de facto grâce à son rôle dans la définition des « normes de sécurité » pour le retrait de l’armée israélienne (point 16) et les contrôles aux frontières (point 15).
    • Trump l’a qualifié de « proposition extrêmement équitable » ouverte à l’acceptation du Hamas, mais a souligné qu’il s’agissait d’un « point de départ » sans imposer de résultats en matière de création d’un État.
  • Avantage israélien : l’accent bilatéral mis par le plan sur les États-Unis et Israël permet au gouvernement Netanyahou de présenter la création d’un État comme dépendant de la résolution préalable des « menaces existentielles », faisant écho à l’opposition nationale à tout « État » sans démilitarisation complète et normalisation avec les États arabes.

En substance, le plan initial présente la création d’un État palestinien comme une incitation lointaine, mais l’inscrit dans un processus où les objections d’Israël en matière de sécurité peuvent bloquer indéfiniment le dialogue.

2 Améliorations (et limites) de la résolution 2803

La résolution approuve le plan en 20 points tout en ajoutant l’autorité du Conseil de sécurité des Nations unies, mais elle traite elle aussi la création d’un État comme une aspiration plutôt qu’une garantie. L’ajout essentiel se trouve au paragraphe 12 : « Le Conseil de sécurité reconnaît que, suite à la mise en œuvre des réformes de la gouvernance arabe, de la démilitarisation et de la reconstruction prévues par la présente résolution, les conditions pourraient enfin être réunies pour ouvrir une voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien. » Cette formulation a été insérée dans le projet final afin d’obtenir un soutien plus large (par exemple, celui des Émirats arabes unis et de l’Arabie saoudite), mais elle reste fortement nuancée :

  • Conditions préalables : La « voie » vers l’Etat palestinien ne s’ouvre qu’après :
    • Le désarmement complet du Hamas et le déploiement des Forces de sécurité intérieure (paragraphes 4 à 6).
    • Les réformes de la gouvernance menées par l’AP, y compris les élections et la transparence (paragraphe 8).
    • Les étapes importantes du redéveloppement économique vérifiées par le Conseil de paix (BoP) et la Banque mondiale (paragraphe 10).
    • Le dialogue entre Israël et l’AP sur les « questions relatives au statut final » (frontières, Jérusalem, réfugiés), explicitement lié aux rapports semestriels du Conseil de sécurité des Nations unies (paragraphe 14).
  • Pas de calendrier ni de mise en œuvre : contrairement à la démilitarisation (avec le déploiement des forces internationales en janvier 2026), la création d’un État ne comporte pas de délai.
    • La mission américaine l’a qualifiée de « voie viable », mais a souligné qu’il s’agissait d’un « effort sincère » dépendant d’une « gouvernance [arabe] responsable », donnant à Israël une influence via les vetos du BoP sur les étapes importantes.
  • Influence israélienne : Israël participe aux décisions du BoP et à l’approbation des étapes importantes (paragraphe 3), ce qui lui permet de refuser toute progression s’il invoque une « résurgence des menaces terroristes » ou des réformes incomplètes.
    • La résolution interdit l’« annexion » (paragraphe 7), mais autorise des « périmètres de sécurité » indéfinis, renforçant ainsi la position de Netanyahou selon laquelle la création d’un État est prématurée dans un contexte d’hostilité.

Pourquoi cela favorise la position d’Israël et sa faculté de refuser ou de retarder les discussions sur un Etat palestinien

  • Déséquilibre des pouvoirs dans les conditions : toutes les voies dépendent de la sécurité vérifiée par Israël (par exemple, pas de trafic d’armes, zones exemptes de terrorisme), où une majorité d’Israéliens (selon des sondages récents : environ 70 % s’opposent à la création d’un État sans reconnaissance d’Israël comme État juif) et des dirigeants comme Netanyahou/Lapid peuvent invoquer la politique intérieure pour refuser leur consentement.
  • Le flou comme caractéristique : la « nouvelle approche » de Trump évite la spécificité de l’ère d’Oslo, présentant la création d’un État comme « possible » plutôt que « inévitable ».
    • Les abstentions de la Russie et de la Chine, et les raisons qu’ils ont avancées soulignent l’orientation pro-israélienne du plan, qui ne prévoit aucun mécanisme pour sanctionner la non-coopération d’Israël.
    • L’accueil positif de Mahmoud Abbas souligne en revanche le fait que le président Macron lui a fait des promesses qu’il ne pourra pas tenir, son projet de constitution et de réforme comme condition à la création d’un Etat palestinien étant totalement exclu de la résolution de l’ONU.
  • Contexte plus large : Le lobbying israélien auprès du président Trump avant le vote a poussé à « fermer la porte » à une création immédiate de l’État palestinien, ce qui a abouti à la formulation édulcorée « pourrait être mis en place ».

3 Au final, aucun des deux documents « n’inclut » ouvertement un État palestinien : il s’agit d’une « voie » fortement conditionnée par le pouvoir que possède Israël de refuser grâce à son droit de veto en matière de sécurité et de gouvernance. Cela reflète le flou pragmatique de Trump face à l’opposition israélienne, qui privilégie la stabilisation de Gaza plutôt que la transformation par la construction d’un État palestinien.

Clarification de la gouvernance turque et de l’Autorité palestinienne à Gaza dans le cadre de la résolution 2803

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a rejeté à plusieurs reprises l’implication turque dans la gouvernance/sécurité d’après-guerre à Gaza ainsi que tout rôle immédiat ou direct de l’Autorité palestinienne (AP).

  1. Israël a réussi à faire pression pour exclure les troupes turques de la Force internationale de stabilisation (ISF), les États-Unis confirmant le 24 octobre 2025 qu’aucune force étrangère ne serait déployée sans le consentement d’Israël.

    Résultat, pas de Turquie dans le mandat de la FSI, qui précise qu’il sera composé « d’un commandement unifié acceptable pour le BoP [en] étroite consultation avec… Israël », garantissant ainsi l’exclusion de pays comme la Turquie.

  2. La « gouvernance dirigée par l’Autorité palestinienne » était un raccourci pour désigner la vision finale du plan en 20 points de Trump et de la résolution 2803, qui envisage qu’une Autorité palestinienne réformée prenne finalement le contrôle après une phase de transition. Cependant, Israël n’a pas « dénoncé » cela ouvertement, car les documents sont structurés de manière à le différer et à le conditionner fortement, ce qui donne une couverture politique à Netanyahu pour le rejeter intégralement.
  3. Ci-dessous, je vais détailler les nuances, expliquer pourquoi il n’y a pas de danger pour Israël, ce qui explique le silence de Netanyahou sur le sujet

En bref, le plan ne cède pas Gaza à l’Autorité palestinienne actuelle ni à la Turquie : il est question d’une parenthèse technocratique assortie d’un droit de veto israélien, ce qui permet à Netanyahou de rejeter les « mauvaises » parties sans pour autant faire capoter l’accord. Ce flou au bénéfice d’Israël permet de gagner du temps, mais les détracteurs (notamment le Hamas et les alliés de l’Autorité palestinienne) affirment qu’il perpétue l’incertitude.

Si la mise en œuvre des réformes est bloquée, Israël conserve un moyen de pression pour bloquer indéfiniment la phase 3 de la gouvernance.

Ceux pour qui cette résolution est un cheval de Troie

C’est une vision alarmiste, mais pas entièrement infondée. Il existe des risques réels, tels que la reconnaissance de l’État et la bureaucratie des rapports qui affaiblit le contrôle bilatéral, mais il se trompe en présentant la résolution comme une conspiration anti-israélienne, en minimisant les garanties israéliennes (par exemple, les consultations BoP, les déclencheurs conditionnels) et en spéculant sur le pire scénario d’application comme si ces scénarios étaient déjà une réalité, alors qu’ils ne sont qu’une hypothèse, et qu’ils appartiennent au futur, inconnu par nature.

En réalité, telle qu’elle est mise en œuvre (déploiement de la force internationale de sécurité d’ici janvier 2026), cette résolution accule davantage le Hamas qu’elle ne contraint Israël, conformément à la « nouvelle approche » de Trump.

Dans le détail :

  1. Affirmation : la suppression de la responsabilité en matière d’aide accorde une « immunité totale » au Hamas et aux acteurs corrompus.
    • Est-ce exact ? Non, car l’aide est désormais acheminée via un « fonds fiduciaire géré par les donateurs » (paragraphe 10).
    • C’est donc faux et trompeur. Il n’y a pas d’« immunité totale » dans la résolution. Au contraire, elle subordonne l’aide à « la vérification de la démilitarisation et des réformes de gouvernance » (paragraphe 9), sous la supervision de la Banque mondiale et du BoP, et prévoit des rapports semestriels du Conseil de sécurité des Nations unies exposant les détournements. Cela renforce la responsabilité au-delà des promesses ambitieuses du plan Trump (points 7 à 10), car le Hamas ne peut pas accéder aux fonds sans se conformer à ces conditions.
  2. Affirmation : il s’agit du « plus grand cadeau fait au Hamas », créant une zone semi-souveraine sous surveillance hostile. Argument : le BoP non élu, les troupes étrangères et les mandats élastiques créent une zone tampon « flottante et indéfinie » entre Israël et le Hamas, offrant au groupe l’immunité, des fonds et un levier sur le statut d’État, ce qui est pire qu’avant le 7 octobre.
    • Est-ce exact ? La préoccupation est légitime concernant la dérive multilatérale : le BoP acquiert une « personnalité juridique internationale » (paragraphe 3) et les ISF (jusqu’à 20 000 soldats) sont déployées sans veto total de l’ONU, provenant vaguement de « partenaires régionaux ».
    • Qui a raison ? C’est une inversion de la dynamique : le « cadeau » est illusoire, car le Hamas est explicitement visé par un « démantèlement permanent » (paragraphe 4), sans aucun rôle de gouvernance (comité technocratique uniquement).

      L’exclusion de la Turquie et l’accent mis sur les « groupes armés non étatiques » reflètent les victoires d’Israël, et non des concessions.

      Les spéculations sur des opérations futures « politiquement impossibles » ignorent la manière dont le soutien de l’ONU légitime l’application de la loi par Israël si le Hamas refuse. Et il s’agit de … spéculations.

  3. Affirmation : la résolution impose un « horizon politique » non négocié pour la création d’un État palestinien, renversant ainsi les fondements diplomatiques d’Israël.
    • Est-ce exact ? En partie, oui. La résolution finale insère ceci dans le paragraphe 12 : « Le Conseil de sécurité reconnaît que, suite à la mise en œuvre des réformes… les conditions pourraient enfin être réunies pour une voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien. »

      Il s’agit d’un ajout de dernière minute visant à apaiser les pays arabes qui ont approuvé la résolution (par exemple, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis), en atténuant l’accent mis dans le projet sur la seule reconstruction.

    • Où est l’erreur/ambiguïté ? L’erreur est double.
      • D’une part, elle surinterprète les termes « pourrait » et « voie » en transformant ces termes en mandat contraignant,
      • et de l’autre, elle fait comme si les conditions strictes (démilitarisation totale, réformes de l’Autorité palestinienne telles que la lutte contre la corruption et la reconnaissance d’Israël) et l’absence de calendrier/de mesures coercitives, n’existaient pas.
      • Ou si vous préférez, les détracteurs interprètent les options vagues comme si elles contraignaient Israël et offraient des droits réels à l’AP, et les droits fermes offerts à Israël comme s’ils étaient optionnels et annulables.

        Il s’agit de tout l’inverse : en réalité nous avons là un flou ambitieux du plan Trump qui donne à Israël un droit de veto via les étapes du Conseil de paix (BoP) et les dialogues sur le « statut final ». Aucun mécanisme de l’ONU n’impose sa mise en œuvre sans le consensus entre Israël et l’Autorité palestinienne. Parler de processus d’accession à l’indépendance imposée à Israël est pure spéculation, car cela ne figure pas dans le texte de la résolution. Les mentions dans le texte sont des concessions visant à obtenir un soutien plus large (ça a fonctionné), et non un revirement de la politique américaine.

  4. Affirmation : le retrait de l’armée israélienne est subordonné à des étapes internationales incontrôlables, laissant Israël vulnérable
    • Argument : lie le retrait à des « normes, étapes et délais liés à la démilitarisation », avec un « périmètre de sécurité » persistant jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de « menace terroriste renaissante », subordonnant l’armée israélienne à un commandement international « sans droit de veto »
    • Exact ? Oui, le paragraphe 5 reprend cette formulation du plan Trump (point 16), officialisant un retrait progressif basé sur des progrès vérifiables.
    • Où est l’erreur/l’inexactitude ? Il s’agit là d’une lecture inversée : Cela avantage en fait Israël en intégrant ses lignes rouges en matière de sécurité dans le droit des Nations unies :
      • les étapes importantes nécessitent « une consultation étroite avec… Israël » (paragraphe 3), et
      • la Force internationale de stabilisation (ISF) opère sous le BoP (présidé par Trump, avec la participation d’Israël) plutôt que sous le commandement pur et simple des Nations unies.
      • Le « périmètre » permet une présence indéfinie de l’armée israélienne si les menaces persistent, contredisant ainsi le discours de vulnérabilité d’Israël. Il interprète à tort la structure comme « incontrôlable » — alors que la Russie et la Chine se sont abstenues en partie parce qu’elle est favorable aux États-Unis et à Israël —,
      • C’est une autre spéculation sur une subordination sans noter comment elle exerce une pression supplémentaire sur le Hamas (par exemple, contrôle actif des frontières par la FSI, absence de troupes turques en raison du veto israélien).
  5. Affirmation : la résolution impose le maintien du cessez-le-feu indépendamment des violations du Hamas, en lui donnant la priorité sur la sécurité israélienne.
    • Est-ce exact ? La résolution met effectivement l’accent sur un « cessez-le-feu immédiat et durable » (préambule et paragraphe 1), s’appuyant sur le cadre du plan Trump.
    • Où est l’erreur/l’inexactitude ? C’est là que réside la plus grande exagération spéculative de ceux qui dénoncent ces accords comme étant un cheval de Troie contre Israël : Le cessez-le-feu est explicitement « lié à la démilitarisation » (paragraphe 4), les ISF étant autorisées à prendre « toutes les mesures nécessaires » contre les violations commises par des acteurs non étatiques (c’est-à-dire le Hamas).

      De plus, il n’interdit pas les réponses israéliennes aux menaces — le paragraphe 6 autorise les BoP/ISF à « traiter toute violation » — et enfin, il lie les progrès à des « normes » qu’Israël aide à définir.

      Les sceptiques interprètent l’accent mis sur la reconstruction comme un parti pris anti-sécurité, mais le résultat final du vote (12-0-3, avec le soutien des pays arabes) reposait sur un équilibre entre ces deux aspects, et non sur l’imposition d’une restriction unilatérale. Dans la pratique, il formalise l’approche « la manière douce ou la manière forte » de Trump et de Netanyahou (il a repris ces termes exacts hier dans une déclaration) pour le désarmement du Hamas, réduisant ainsi le fardeau qui pèse sur Israël.

Alors, la résolution Trump validée par l’ONU ? Pour ou contre Israël ?

Les plus réticents vont me répondre, je les entends déjà : « je demande à voir ».

Évidemment ! Nous demandons tous à voir, ne me prenez pas pour un imbécile, je ne suis pas une Pompom girl en train de dire que tout est beau, tout est extraordinaire dans le meilleur des mondes : la résolution 1701 de l’ONU pour le Sud Liban était elle aussi magnifique sur le papier, elle n’a jamais été appliquée. Cette résolution 2803 pourrait très bien terminer de la même manière, c’est évident. Cependant, nous ne sommes pas là pour dire le futur, pour lire dans une boule de cristal et porter un jugement d’autorité sur ce que sera l’avenir. Je laisse ce jeu aux imbéciles dont le cœur de l’activité journalistique est la spéculation et le marc de café. Mon travail se situe dans l’analyse du concret, celui d’une résolution majeure.

Conclusion

Si le Hamas rejette encore le désarmement, il ne rejette plus une demande américaine, il rejette un cadre soutenu par l’ONU et doté de véritables moyens de coercition.

Le déploiement d’une importante force de stabilisation à Gaza est très difficile sur le plan logistique et politique, en particulier dans les bastions du Hamas.

Même en prenant « toutes les mesures nécessaires », il est difficile de désarmer de manière coercitive un groupe terroriste bien établi, en particulier lorsqu’il dispose d’infrastructures souterraines/secrètes, sauf si le président Trump décide de mettre le paquet, ce qui ne me surprendrait pas maintenant qu’il a le feu vert du droit international (pourquoi croyez-vous qu’il aurait publiquement annoncé son désir de voir son plan présenté et voté par le Conseil de sécurité de l’ONU, et donc intégré au droit international, s’il était à la solde du Qatar !)

Si le Hamas résiste, les États contribuant à la force de stabilisation s’engageront-ils pleinement, en particulier si les coûts ou les risques augmentent ? Encore une fois, c’est Trump qui décide, et les faits récents, tant aux Etats-Unis qu’à l’étranger, laissent peu de doute quant à sa détermination.

De plus, et Trump sait cela intuitivement, la légitimité à long terme de la force de stabilisation – donc sa légitimité à lui, à laquelle il tient comme à la prunelle de ses yeux, dépend de sa composition, de sa neutralité perçue et de l’adhésion des Arabes ; si elle est considérée comme un mandataire étranger, elle pourrait avoir du mal à gouverner. Si elle est faible, Trump sera considéré comme faible. Si elle ne fait que de la figuration, Trump passera pour un beau-parleur. Il le sait mieux que vous et moi.

En prenant en charge Gaza, le président Trump a joué un coup de maître par la bande : il protège Israël contre les critiques internationales.

Le plan de Trump a une fonction cachée, qui sera, j’en suis sûr, évoquée dans les jours qui viennent par les analystes : il abrite Israël des critiques. En effet, depuis plus de 20 ans, les ennemis d’Israël, les antisémites, accusent les juifs d’avoir créé une « prison à ciel ouvert » ; imposé un « blocus illégal de Gaza » ; d’avoir poussé les habitants à vivre dans la misère la plus totale (la présence de concessionnaires Mercedes et d’hôtels de luxe étant sans objet) ; de crever de faim ; d’avoir détourné l’eau ; imposé un blocus maritime, et que sais-je encore. Et bien fini. Israël n’est plus impliqué, Israël ne peut plus être accusé.

Vous me direz que ça ne dérange pas les critiques et vous aurez raison. Mais la balle tombe alors dans le camp israélien : c’est à lui de citer le droit international et les droits conférés à Israël.

NDLR : La question est à présent de savoir si la déclaration du ‘Hamas que le cessez-le-feu est rompu ne rend pas tout cet exposé inutile…

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