Qui aura l’héritage de Nadine de Rothschild ?
L’affaire Rothschild, déjà emblématique par l’ampleur de son patrimoine, s’est muée en une bataille familiale d’une rare intensité symbolique. Au cœur du conflit, une question aussi simple que dévastatrice : à qui appartiennent réellement les œuvres d’art et objets de luxe conservés dans le château familial dominant le lac Léman ? Et comment une institution culturelle israélienne s’est-elle retrouvée au centre d’un affrontement intime mêlant héritage, filiation et pouvoir ?
Le litige oppose Nadine de Rothschild, âgée de 93 ans, veuve d’Edmond Adolphe de Rothschild, à sa belle-fille Miriam de Rothschild et à ses quatre petites-filles. La justice suisse est appelée à déterminer la propriété d’une collection estimée à plusieurs centaines de millions de dollars, composée de mobilier ancien, d’objets d’art et de chefs-d’œuvre attribués à des maîtres comme Goya ou Rembrandt.
Le parcours de Nadine de Rothschild tranche avec l’image classique de la dynastie. Issue d’un milieu ouvrier du nord de la France, elle quitte sa famille très jeune et arrive à Paris avec l’ambition de réussir dans le cinéma. Sa rencontre avec Edmond Adolphe bouleverse sa trajectoire. En l’épousant en 1963, elle entre dans l’une des familles les plus puissantes d’Europe, se convertit et devient l’hôtesse de réceptions fastueuses fréquentées par les élites politiques et culturelles internationales.
Après leur mariage, le couple s’installe principalement au Château de Fergny, vaste domaine surplombant le lac Léman. Le palais abrite une collection exceptionnelle, souvent décrite comme un « mini Louvre » privé. De leur union naît un fils unique, Benjamin de Rothschild, dont la relation avec sa mère se dégrade au fil des années. Les tensions familiales deviennent publiques, Benjamin évoquant une enfance vécue sous le signe du contrôle plus que de l’affection.
À la mort d’Edmond Adolphe en 1997, Nadine hérite d’une fortune considérable, incluant les œuvres conservées au château. Peu après, elle quitte le domaine, désormais occupé par Benjamin et Miriam. Les relations restent distantes, malgré la proximité géographique. En 2021, le décès brutal de Benjamin à 57 ans marque un point de non-retour. L’absence de Nadine aux funérailles alimente l’image d’une fracture irréversible.
La bataille judiciaire s’intensifie lorsque Nadine réclame la restitution des œuvres afin de créer un musée à Genève. Sa démarche échoue à deux reprises. Les tribunaux reconnaissent la propriété du château et de son contenu aux quatre petites-filles, héritières directes. C’est alors qu’un nouvel élément entre en jeu : la référence explicite au Musée d’Israël.
Nadine propose à ses petites-filles d’exposer les œuvres dans sa résidence actuelle. En cas de refus, elle évoque un don de ses propres collections à un musée israélien. Cette déclaration provoque une réaction immédiate : Miriam affirme que l’ensemble des œuvres restera au château familial. Juridiquement, la menace d’un transfert vers Israël n’a toutefois aucune portée. Les décisions judiciaires privent Nadine de tout droit de disposition sur les œuvres concernées.
Médiatisée pour ses livres sur l’étiquette et ses apparitions télévisées, Nadine de Rothschild exprime aujourd’hui publiquement sa lassitude face à ce conflit de fin de vie. Derrière les montants vertigineux et les chefs-d’œuvre convoités, l’affaire révèle surtout une lutte brute entre héritage biologique, reconnaissance affective et contrôle du patrimoine. Dans cette guerre familiale, l’évocation d’Israël agit moins comme un projet réel que comme un symbole et un ultime levier de pression, sans effet concret sur le destin des œuvres.
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