Depuis plusieurs années, un mot circule dans les cercles diplomatiques, économiques, sécuritaires et politiques : la qatarisation. Mot discret, parfois tabou, mais de plus en plus impossible à ignorer. Il désigne cette infiltration méthodique d’un petit émirat richissime au cœur des institutions, des médias, des universités, des mouvements politiques, des associations de toute nature, des ONG, du sport, et surtout des esprits européens.
Nicolas Sarkozy aurait-il signé avec le Qatar en 2007 lorsqu’il convainquit l’émir Hamad ben Khalifa Al Thani de payer les 400 millions de dollars que réclamait Kadhafi pour la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien injustement condamnés à mort en Libye, s’il avait su les conséquences qu’auraient eues en France les contreparties négociées à l’époque au plus haut sommet de l’Etat ?
Car près deux vingt ans après, ce n’est plus du soft power. C’est un soft coup d’État culturel, politique et idéologique.
Le sport comme cheval de Troie
Outre des investissements capitalistiques dans de nombreux secteurs stratégiques de l’économie, il nous faut commencer par ce que tout le monde voit. Il y a quinze ans, le Qatar c’était Al Jazeera. A présent, le Qatar, c’est la Coupe du monde 2022, les investissements massifs dans le PSG, les chaînes sportives influentes. Un écran de fumée dorée, une vitrine pour séduire les foules européennes comme Al Jazeera l’a été pour contrôler les foules musulmanes. Et ça marche. Le Qatar a su acheter une image : celle d’un pays moderne, progressiste, pacificateur. Tout en finançant, parfois dans le même souffle, des organisations proches des Frères musulmans, l’une des matrices idéologiques du djihadisme moderne.
Bruxelles, capitale du Qatargate
Mais derrière le sport et les paillettes, l’argent qatari s’est immiscé dans les rouages de la démocratie européenne. Le scandale du Qatargate a révélé ce que beaucoup savaient sans oser le dire : des valises de billets auraient circulé au Parlement européen, en échange de votes favorables, de silences complices, de complaisances diplomatiques.
Des députés européens sont inculpés, des ONG mises en cause. La justice belge enquête, timidement. Où en est cette enquête ? Où en est la Justice ? Les institutions européennes, elles, préfèrent détourner le regard. On comprend pourquoi : le Qatar serait devenu, à bas bruit, un quasi-actionnaire politique de l’Europe.
En France aussi, les signaux rouges clignotent
Ici, ce n’est pas forcément une valise de billets, c’est une idéologie qui s’insinue dans nos quartiers, nos associations, nos universités, nos institutions religieuses. Le rapport du Ministère de l’Intérieur sur l’entrisme des Frères musulmans est accablant : des associations, des mosquées, des fonctionnaires, des élus sont travaillés au corps par cette idéologie, financée par des pays comme le Qatar.
Le mot d’ordre ? « Respectabilité extérieure, radicalité intérieure ».
Sous couvert de dialogue interreligieux ou de lutte contre l’islamophobie, c’est en réalité un projet de société alternatif à la République qui se diffuse, avec des relais, des formations, des financements.
Une soumission volontaire…
Le plus inquiétant ? L’absence de réaction claire des gouvernants occidentaux. En France, on vend des hôtels, des clubs de foot, des parts de notre économie, des écoles de commerce… à des fonds souverains qataris sans la moindre transparence. Le Qatar nous aide-t-il à refinancer notre dette abyssale ? À qui appartient vraiment notre économie stratégique ? Nos infrastructures ? Nos médias ? Ces questions ne sont même plus posées.
Pire : des responsables politiques et des leaders d’opinion, parfois par naïveté, parfois par cynisme, deviennent les idiots utiles de cette opération. On les invite à Doha, on les flatte, on les couvre d’honneurs. Et ils rentrent, dociles, pour nous expliquer que « le Qatar évolue », que « le dialogue est essentiel », que « l’islamisme est une vue de l’esprit »…
Lorsque les Émirats arabes unis et Barheïn, avec l’assentiment de l’Arabie saoudite, ont signé les fameux Accords d’Abraham avec l’Etat d’Israël, ouvrant la voie à une réconciliation historique entre l’Orient et l’Occident, tous les observateurs français et occidentaux qui avaient flirté avec le Qatar ou répondu à des invitations sommes toutes diplomatiques, auraient dû clairement couper les ponts avec Doha. ? C’était le moment de choisir définitivement, et de s’y tenir, le camp de la paix et de la modernité contre celui des petites concessions et des grands déshonneurs.
Aujourd’hui, nos journalistes utilisent sans filtre ni prise de recul, par complaisance et surtout par facilité, ce que leur livrent les organes dits de presse du Qatar, tous inféodés aux Frères musulmans. On le voit avec effroi dans le conflit sur Gaza ; les images et témoignages des Gazaouis repris par nos médias leur sont procurés par des « journalistes » dont la carte de presse est attribuée par les barbares du Hamas. Bonjour la qualité de la formation…
Qui se demande également pourquoi le Qatar a récupéré en quelques heures cette pseudo-étudiante admiratrice d’Hitler, avant même que sa procédure d’expulsion ne soit examinée par la Justice. Pourquoi une telle complaisance envers l’antisémitisme ? Pourquoi d’ailleurs le Qatar continue-t-il d’héberger dans des palaces dorés les dirigeants du Hamas, tout en se présentant comme un « médiateur » ? Le Qatar est-il un pompier pyromane ou un eldorado pour les nazis et antisémites d’aujourd’hui ?
A quand une plainte contre le Qatar devant la CPI pour complicité de crime contre l’humanité ?
Dans les coulisses, il se dit que l’émir du Qatar, Tamim ben Hamad Al Thani, serait plus moderne que bon nombre de ses sujets. Quand donc s’inspirera-t-il de la voie tracée par l’homme fort de l’Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, et celui des Émirats arabes unis, Mohammed ben Zayed Al Nahyane ?
Le prix de la cécité
Pendant ce temps, la République recule en France. Chaque terrain laissé en friche par l’école, la culture, la loi républicaine, est occupé par le discours victimaire, identitaire, prosélyte des satellites idéologiques du Qatar. Chaque silence, chaque renoncement, chaque subvention sans condition, creuse le lit de notre impuissance future.
Et qu’on ne se trompe pas : ce n’est pas l’islam qui est en cause, c’est l’instrumentalisation politique de la foi par des puissances étrangères, qui utilisent la tolérance occidentale pour miner ses fondements.
Il est minuit moins le quart
Nous devons nous réveiller. La France ne peut pas devenir le terrain de jeu des influenceurs du Qatar. L’Europe ne peut pas vendre sa diplomatie comme sa souveraineté à un pays qui finance à la fois des universités de la charia, des chaînes de propagande islamiste, et des clubs de foot. Nous ne pouvons vendre notre âme et renoncer à nos principes républicains.
L’urgence est là : exiger la transparence totale sur les flux financiers étrangers dans nos institutions. Dénoncer l’accord fiscal entre le Qatar et la France. Auditer les ONG et associations bénéficiant de fonds qataris. Refuser l’achat de nos médias et de nos infrastructures par cet état théocratique.
Ce n’est pas être hostile au Qatar. C’est être fidèle à la France. Ce n’est pas une croisade. C’est une exigence républicaine.
Car à force de fermer les yeux, nous ne vendons pas seulement notre patrimoine, nous bradons notre avenir.
L’édito de Michel Taube et Patrick Pilcer
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