Près de 1,5 million de chats errants en Israël
Israël face à ses chats
Crise féline en Israël : une urgence invisible
Sous les pierres chaudes de Jérusalem comme dans les ruelles d’Haïfa, des milliers de silhouettes félines traversent silencieusement les rues, en quête de nourriture, d’abri, ou simplement de répit. En Israël, on estime aujourd’hui entre 500 000 et 1,5 million le nombre de chats errants. Cette réalité, bien que visible au quotidien, reste largement ignorée sur le plan national, selon un rapport récent de la Knesset.
Malgré sa réputation de nation innovante, pionnière dans les technologies médicales et les startups, Israël n’a pas encore défini de stratégie nationale pour répondre à ce phénomène. Ce vide politique laisse les municipalités, les associations et les citoyens livrés à eux-mêmes, sans moyens suffisants ni cadre d’action structuré.
Le ministère de l’Agriculture n’a alloué qu’environ 1,2 million de dollars à la gestion de cette problématique, bien en deçà des 18 millions jugés nécessaires pour stériliser 250 000 chats, seuil minimal pour ralentir la progression. Cette somme permet tout au plus des actions ponctuelles, très insuffisantes face à l’ampleur de la tâche. Pendant ce temps, la prolifération continue : les chats se reproduisent rapidement, et les efforts de stérilisation, s’ils ne sont pas massifs et constants, ne font que retarder l’inévitable.
Les études menées, comme celle de Rishon LeZion, confirment que même avec des campagnes de stérilisation soutenues, la réduction annuelle de la population féline errante n’est que de 7 %. Pour obtenir un effet durable, il faudrait atteindre et maintenir un taux de stérilisation d’au moins 70 %, un objectif lointain en l’état actuel des moyens.
Sur le terrain, les vétérinaires municipaux sont débordés et rarement en nombre suffisant. Les agents censés capturer les animaux avant leur stérilisation manquent de formation, de soutien logistique et de reconnaissance. Aucun cadre national ne régit ces métiers essentiels. En somme, c’est l’improvisation qui prévaut, alimentée par la bonne volonté mais freinée par l’absence de vision politique.
Et pourtant, les chats errants ne sont pas de simples nuisibles. Ils jouent un rôle discret mais réel dans l’environnement urbain : ils limitent la prolifération de rongeurs, favorisent l’empathie dans les quartiers et apportent à beaucoup un petit réconfort silencieux dans le tumulte des villes. Mais leur vie reste courte et rude : moins de cinq ans en moyenne, entre blessures, faim, maladies et accidents.
Dans ce contexte, ce sont souvent les particuliers qui prennent le relais, nourrissant les chats, aménageant des abris artisanaux, parfois même finançant eux-mêmes les stérilisations. Ces gestes, bien que touchants, ne suffisent pas à enrayer le phénomène. L’État, dénoncent les militants, continue de détourner les yeux.
La députée Yasmin Sacks Friedman, commanditaire du rapport parlementaire, alerte : « Il ne s’agit pas d’aimer ou de détester les chats, mais de faire face à une réalité qui ne disparaîtra pas d’elle-même. » Elle rappelle que l’inaction politique génère des souffrances évitables, aussi bien pour les animaux que pour les humains.
Le ministère de l’Agriculture avait pourtant organisé en 2021 une consultation publique, interrogeant vétérinaires, élus et citoyens engagés. Mais depuis, aucune mesure concrète n’a suivi. Le résultat est une multiplication anarchique des populations félines et une détérioration continue de leurs conditions de vie.
Ce que demandent aujourd’hui les défenseurs des animaux, c’est une stratégie cohérente, humaine et scientifique, dotée de moyens suffisants et d’un engagement à long terme. Il ne suffit plus d’agir localement ou ponctuellement. Il faut penser nationalement, comme pour toute question de santé publique ou de bien-être collectif.
La manière dont une société traite ses plus vulnérables, y compris ses animaux, dit souvent autant d’elle que ses succès économiques ou technologiques. En Israël, cette crise des chats errants, à la fois visible et oubliée, est devenue un révélateur silencieux de nos priorités. Et tant que rien ne changera, les chats continueront de peupler nos rues — invisibles mais omniprésents, porteurs muets d’une question que la politique ne peut plus fuir.
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