Les faits sont rares, mais pas exceptionnels non plus. Dimanche, un Polonais de 42 ans, en état d’ébriété avancé, a été interpellé dans le métro à Paris, après avoir poussé un voyageur en direction des voies. Vers 18 heures, le suspect, dont le comportement était agité, s’est approché d’un homme de 57 ans sur le quai de la ligne 7 à la station Opéra, et l’a bousculé violemment. Par chance, ce dernier est parvenu à maintenir son équilibre et à éviter de chuter sur les rails. Son agresseur a été interpellé peu après et placé en garde à vue. Une enquête a été ouverte pour « violences en état d’ivresse manifeste, sans incapacité de travail », indique à 20 Minutes le parquet de Paris. Le suspect était toujours, ce mardi, entendu par les policiers.
Il s’agit d’un cas typique de « pousseur » de métro. Un phénomène assez rare, qui ne concerne que quelques cas chaque année, mais qui suscite l’inquiétude des usagers. Il faut dire que certaines affaires font l’objet d’une importante médiatisation, notamment lorsque leur issue a été fatale. En juillet dernier, une femme de 52 ans est décédée après avoir été poussée sur les rails de la station de RER B Cité-Universitaire, au moment où le train arrivait. Son agresseur avait été arrêté et placé en garde à vue pour assassinat avant d’être conduit à l’I3P, l’institut psychiatrique de la préfecture de police.
Comme l’avait révélé Le Parisien, ce quadragénaire est un récidiviste. Il avait déjà été interpellé en octobre 2011 après avoir poussé un jeune homme sur les rails de la station Strasbourg-Saint-Denis. Déclaré irresponsable pénalement, il avait été hospitalisé sous contrainte pendant cinq ans.
« Il n’y a pas obligatoirement de volonté de tuer »
Peu d’études ont été consacrées au sujet. En 1999, le psychiatre Eric Corbobesse a rédigé un mémoire sur « les pousseurs de métro » et étudié, dans ce cadre, les dossiers médicaux d’une trentaine d’auteurs. Pour lui, leurs motivations sont un « mélange de causes médicales et de sociales », explique-t-il à 20 Minutes. Le médecin remarque qu’il existe « des profils types », qu’il divise en deux catégories. D’un côté, les « personnes très alcoolisées », qui passent à l’acte alors qu’elles se trouvent « dans une sorte de confusion mentale ».
De l’autre, « les personnes atteintes de troubles psychotiques sévères » et qui se trouvent « dans un contexte social très précaire ». « Il n’y a pas obligatoirement de volonté de tuer », souligne-t-il. « Ce sont des personnes qui passent beaucoup de temps à délirer et qui, à un moment donné, vont élire une victime sur le quai qu’elles vont prendre pour le diable, quelqu’un qui leur veut du mal et qu’il faut éliminer. Tous les cas sont très différents. »
Le psychiatre observe que ces affaires concernent souvent « toutes ces personnes laissées-pour-compte » qui se réfugient dans les couloirs du métro, « notamment les SDF qui se retrouvent dans des lieux publics, de plus en plus malades, de plus en plus violents ». « Cela pose la question de savoir comment soigner les personnes les plus précaires à Paris, qui sont atteintes de pathologies mentales », insiste-t-il.
« Leurs actes ne sont pas prévisibles »
Une autre étude, réalisée en 2005, s’est intéressée à huit cas hospitalisés au Centre Paul-Guiraud à Villejuif (Val-de-Marne). Ces personnes avaient « tenté ou réussi à pousser une ou plusieurs personnes sous une rame de métro », entre 1981 et 2005. Les auteurs notaient qu’il se dégageait « un profil de patient schizophrène sans-abri, en rupture de soins ». Tous étaient « des hommes, célibataires, sans enfant », âgés de la trentaine. L’immense majorité était « sans emploi au moment des faits » et percevait « l’allocation adulte handicapé ».
Interrogée en 2011 par 20 Minutes, l’une des autrices de l’étude, la psychiatre Magali Bodon-Bruzel, reconnaissait qu’il était aussi difficile d’anticiper ce type de faits. « C’est le problème des malades dangereux. Leurs actes ne sont pas prévisibles sauf si on les examine avant car on peut les soigner, on a des médicaments, des traitements contre les psychoses ». Par prudence, si des portes palières ne sont pas installées sur le quai, on vous conseillera d’attendre le métro près du mur plutôt que près du quai.
Contactées, ni la RATP, ni la Préfecture de police n’ont, à cette heure, répondu à nos questions.
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