Nouvelle usine turco-israélienne en Samarie

Samarie : ouverture d’une usine turco-israélienne pour le marché américain
Malgré un climat politique et commercial tendu entre Ankara et Jérusalem, une collaboration industrielle inattendue a vu le jour en Samarie. Une nouvelle usine textile, fruit d’un investissement conjoint turc et israélien, a commencé sa production dans la zone industrielle de Barkan. Sa mission : fournir des matières premières à l’industrie textile égyptienne, qui exportera ensuite vers les États-Unis sans droits de douane.

Un contexte politique paradoxal
L’ouverture de cette unité survient alors que le président turc Recep Tayyip Erdogan a instauré un boycott total des échanges commerciaux avec Israël et que la guerre à Gaza accentue les tensions diplomatiques. Pourtant, l’accord commercial qui rend ce projet possible ne relève pas d’une coopération bilatérale classique, mais d’un dispositif régional plus large : le Qualified Industrial Zone Agreement (QIZ).

Cet accord, signé fin 2024 entre Israël, l’Égypte et les États-Unis, permet aux produits fabriqués conjointement par Israël et l’Égypte d’entrer sur le marché américain sans frais de douane. Pour bénéficier de cet avantage, la composition du produit final doit inclure au moins 10,5 % d’intrants israéliens et jusqu’à 24,5 % d’intrants égyptiens.

Les acteurs du projet
Le partenariat à l’origine de cette usine associe le président de la Chambre de commerce Turquie-Égypte, Mustafa Deniz, côté turc, et l’homme d’affaires israélien Avichai Hamiel. Ensemble, ils ont financé la création de l’entreprise IL Fabrics, spécialisée dans la teinture de tissus, ainsi que dans la production de fils à coudre et de fermetures à glissière.

Ces composants sont ensuite acheminés vers l’Égypte, où ils sont utilisés pour fabriquer des vêtements destinés au marché américain. L’exportation se fait dans le cadre du QIZ, garantissant ainsi l’exonération totale de droits de douane.

Une implantation stratégique à Barkan
La zone industrielle de Barkan, en Samarie, est déjà un centre névralgique de l’activité manufacturière israélienne. Près de 200 usines y opèrent, employant en grande majorité des travailleurs palestiniens issus des territoires. Cette main-d’œuvre, combinée à une localisation stratégique et à l’accès aux avantages commerciaux du QIZ, rend le site particulièrement attractif pour des investisseurs étrangers.

Pour IL Fabrics, Barkan offre aussi une proximité logistique avec les points de transit vers l’Égypte, facilitant l’intégration dans la chaîne d’approvisionnement régionale.

Un pari économique malgré les tensions
Si la coopération turco-israélienne dans ce contexte surprend, elle illustre le rôle de l’économie comme passerelle, même en période de tensions politiques. Le projet repose sur des intérêts pragmatiques : les investisseurs turcs trouvent un débouché privilégié vers le marché américain, tandis que les partenaires israéliens bénéficient d’un réseau de production élargi et de nouveaux investissements.

Cette ouverture discrète témoigne également du fait que certains circuits commerciaux peuvent contourner les blocages bilatéraux en s’inscrivant dans des accords multilatéraux structurés, à l’image du QIZ.

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