Nour Attalah, la partie émergée du nazisme des palestiniens

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Quand l’affaire de l’étudiante de Gaza ravive le spectre de la collaboration entre nationalisme palestinien et nazisme.

Idées. Alors qu’une étudiante gazaouie récemment expulsée avait relayé un discours de Hitler appelant à tuer « tous les juifs », un journaliste lui aussi originaire de Gaza a été identifié comme l’auteur de messages incitant à « faire comme Hitler ». Des références qui rappellent les heures sombres de l’alliance entre le grand mufti de Jérusalem et l’Allemagne nazie.

Huit décennies après sa mort, le Führer est toujours aussi radioactif. Depuis 1945, personne en France n’a par exemple osé baptiser son enfant Adolf avec cette orthographe et il n’y a que dans les films comme Le Prénom que l’on s’autorise à faire mine d’envisager un pareil projet. Que l’architecte d’un génocide soit toujours tabou a de quoi rassurer ; qu’il soit érigé en modèle ne peut à l’inverse que susciter l’effroi. Ainsi, les extraits d’un discours d’Adolf Hitler appelant à tuer les juifs, exhumés sur les réseaux sociaux d’une réfugiée gazaouie accueillie par Sciences Po Lille, ont-ils conduit Jean-Noël Barrot à ordonner le gel de l’accueil de Palestiniens. D’autant qu’à quelques jours d’intervalle, un autre réfugié gazaoui, collaborateur régulier de France 24, a été identifié comme l’auteur d’un appel à « faire comme Hitler ».

Teintées d’admiration, ces références à Adolf Hitler s’inscrivent dans un héritage idéologique bien antérieur à la résurgence du conflit israélo-palestinien et renvoient à un épisode de la Seconde Guerre mondiale toujours très débattu : la collaboration du nationalisme palestinien avec le régime nazi, impulsée par le grand mufti de Jérusalem, Mohammed Amin al-Husseini.

Les propos de ces deux réfugiés gazaouis ne sont d’ailleurs pas sans rappeler la rhétorique utilisée par ce chef religieux et leader du nationalisme palestinien qui, dans une allocution à l’Institut islamique central en novembre 1943, a exhorté les musulmans à suivre l’exemple de l’Allemagne nazie, celle-ci ayant « su se sauver du mal causé par les juifs ». Un an plus tard, le même al-Husseini déclare sans ambages que « l’islam et le national-socialisme sont très proches l’un de l’autre dans leur combat contre la juiverie ».

L’anéantissement du peuple juif comme horizon commun.

Pour comprendre la nature des relations entre l’autorité du grand mufti et l’Allemagne nazie, il faut se plonger dans le monumental The Mufti of Jerusalem and the Nazis : The Berlin Years (Vallentine Mitchell, 2015, non traduit), de l’historien allemand Klaus Gensicke. Deux mois seulement après l’arrivée à la chancellerie d’Adolf Hitler, Haj Amin al-Husseini, antijuif revendiqué, cherche à entrer en contact avec les nouvelles autorités allemandes. Un télégramme du consul général Heinrich Wolff relate sa première rencontre avec al-Husseini le 31 mars 1933 : « Le mufti m’a expliqué aujourd’hui que les musulmans, tant en Palestine qu’à l’étranger, saluaient le nouveau régime en Allemagne et espéraient la diffusion de formes de gouvernement fascistes dans d’autres pays. »

D’après le consul allemand, le chef religieux l’aurait également assuré, lors de ce même rendez-vous, du soutien « enthousiaste » du peuple palestinien à l’opération de « boycott » des juifs stigmatisés comme les plus redoutables « ennemis de l’Etat ». Si, dans les premiers temps, le régime nazi garde ses distances avec le mufti de Jérusalem, celui-ci parviendra, au fil des mois et des années, à élargir son réseau au sein de l’appareil nazi. Dans Nazi Propaganda for the Arab World (Yale University Press, 2009, non traduit), l’historien Jeffrey Herf rapporte par exemple qu’en juillet 1937, le grand mufti prit lui-même l’initiative d’approcher Heinrich Doehle, nouveau consul général d’Allemagne à Jérusalem, afin de solliciter un soutien explicite dans sa lutte contre les juifs. Pour la rencontre avec Adolf Hitler, il faut en revanche attendre la fin de l’année 1941.

Mobiliser des volontaires

Le « père » du nationalisme palestinien vient de s’installer à Berlin, où, persécuté au Moyen-Orient, il a trouvé refuge. Le 28 novembre, il est convié à la chancellerie du Reich pour un tête-à-tête avec le Führer en présence du ministre des Affaires étrangères, Joachim von Ribbentrop. Le compte rendu de la rencontre révèle que le mufti se dit rapidement prêt à « coopérer pleinement » à la victoire allemande et propose de mobiliser des volontaires parmi les prisonniers arabes, algériens, tunisiens, marocains détenus en Allemagne pour venir à bout des ennemis communs ; à savoir, les Anglais, les communistes et, bien sûr, les juifs. Sensible aux panégyriques et constatant les convergences idéologiques antijuives qui le lient à son interlocuteur, Adolf Hitler s’engage à fournir un soutien matériel concret aux Arabes impliqués dans cette lutte. « Les simples sympathies ne suffisent pas dans un conflit pour la survie », aurait déclaré le chancelier allemand. D’autant que le Reich, qui avait échafaudé un plan visant à exterminer les juifs de Palestine, savait l’avantage que constituerait le soutien du grand mufti dans la région.

Fruit d’une haine commune à l’endroit des juifs, la collaboration entre al-Husseini et le régime nazi relève ainsi du « win-win », dirait-on aujourd’hui. Dans un télégramme adressé au grand mufti en 1943, Heinrich Himmler assure à son interlocuteur que l’hostilité au « judaïsme mondial » demeure l’un des fondements idéologiques du parti nazi : « La reconnaissance commune de l’ennemi et le combat commun contre lui est ce qui fonde la base solide entre les nationaux-socialistes de la Grande Allemagne et les musulmans du monde entier épris de liberté. » Pour le philosophe et spécialiste de l’antisémitisme Pierre-André Taguieff, « il y a là un parfait résumé des raisons de l’alliance islamo-nazie, concrétisée par la création, le 10 février 1943, de la 13e division de la Waffen SS, composée majoritairement de musulmans de Bosnie-Herzégovine ».

Plus qu’un simple allié ?

Non content de se borner à soutenir le régime nazi au Proche-Orient, le grand mufti aurait en outre agi délibérément pour empêcher les juifs de fuir l’Europe. Pendant la guerre, Berlin et ses alliés tolèrent sous certaines conditions l’émigration de juifs européens en Palestine. C’est par exemple le cas de la Bulgarie qui, en 1943, autorise quelque 4 000 enfants juifs et 500 adultes accompagnateurs à quitter le Vieux Continent. Dès l’annonce, le projet suscite l’ire du mufti qui se fend alors d’un courrier aux ministres des Affaires étrangères bulgare, italien et allemand. C’est ce dernier qui transmet aussitôt un télégramme à l’ambassadeur allemand à Sofia, soulignant « l’intérêt commun germano-arabe à empêcher l’opération de sauvetage » des juifs vers la Palestine.

Au sortir de la guerre, un fonctionnaire du ministère des Affaires étrangères allemand témoigne : « le mufti surgissait partout pour protester ; dans le bureau du ministre, dans la salle d’attente du vice-ministre et dans d’autres départements, comme l’Intérieur, le bureau de presse, le service de radiodiffusion, et même auprès des SS ». Et l’historien Klaus Gensicke d’achever dans son ouvrage : « Il est particulièrement monstrueux que al-Husseini se soit opposé aux rares cas où les nationaux-socialistes étaient disposés, pour une raison ou une autre, à autoriser l’émigration de juifs… Pour lui, seule la déportation en Pologne était acceptable, car il savait parfaitement qu’il n’y aurait aucune échappatoire pour les juifs là-bas. »

La rédaction de JForum, retirera d’office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

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