Les soldats tombent après la guerre
Une information divulguée par la radio militaire israélienne et reprise par plusieurs médias indique qu’au moins 18 soldats de Tsahal se sont donné la mort entre le 1ᵉʳ janvier et le 20 juillet 2025, dont trois rien que ce mois‑ci (alquds.com). Ce total, deux fois supérieur à celui enregistré sur la même période en 2024, confirme une tendance tragique déjà perceptible l’an dernier : le conflit déclenché en octobre 2023 pèse lourdement sur la santé mentale des forces armées.
Une hausse spectaculaire
En 2024, neuf suicides avaient été comptabilisés sur les sept premiers mois ; en 2023, ils étaient onze sur le premier semestre, alors que la guerre n’avait pas encore commencé. Le bond enregistré en 2025 représente donc une augmentation de plus de 100 % par rapport à l’année précédente. L’armée n’a pas confirmé ces chiffres dans l’immédiat : conformément à sa politique, Tsahal publie un bilan global uniquement en début d’année, invoquant la nécessité de vérifications par des professionnels de santé. Mais le silence de l’institution ne fait qu’alimenter l’inquiétude des familles et des associations de soutien.
Les réservistes en première ligne
La plupart des cas concernent des réservistes rappelés à plusieurs reprises depuis octobre 2023 pour des missions de combat prolongées. Ces hommes et ces femmes, souvent engagés dans la vie civile, se retrouvent projetés au front pendant des semaines, puis renvoyés brusquement à la routine quotidienne sans préparation adéquate. Les spécialistes israéliens de la santé mentale soulignent qu’un tel va‑et‑vient favorise l’apparition de stress post‑traumatique : troubles du sommeil, hypervigilance, sentiment d’isolement et idées suicidaires. Un article de Haaretz révélait déjà en mai que certains réservistes souffrant de PTSD avaient néanmoins été rappelés faute d’effectifs, un choix critiqué par des psychiatres militaires (Haaretz).
Des dispositifs encore insuffisants
Officiellement, tout combattant de retour d’opération peut bénéficier de séances avec un psychologue ou un psychiatre ; des lignes d’écoute fonctionnent 24 h/24. Mais sur le terrain, l’accès reste inégal : horaires limités, centres éloignés, crainte du stigmate professionnel. De nombreux réservistes préfèrent taire leurs difficultés afin de ne pas compromettre leur carrière militaire ou civile. La Direction du personnel multiplie pourtant les messages encourageant la consultation préventive, rappelant que « demander de l’aide est un signe de force ».
Appels à plus de transparence
Au Parlement israélien, plusieurs députés ont demandé la création d’une commission d’enquête et la publication de statistiques mensuelles, afin d’identifier rapidement les unités ou fonctions à risque (i24NEWS). Les associations de familles endeuillées réclament également une réforme budgétaire : plus de psychologues, davantage de programmes de réinsertion et un suivi systématique six mois après chaque mission. Sans transparence, estiment‑elles, les solutions resteront partielles.
Le rôle du commandement
Dans les bases, les officiers sont formés à repérer les signaux d’alerte — isolement, propos fatalistes, négligence de l’équipement. Néanmoins, la pression opérationnelle réduit le temps consacré à l’écoute individuelle. Certains commandants de brigade ont instauré des « pauses résilience » de 48 heures après les combats les plus intenses ; d’autres organisent des ateliers de cohésion animés par des psychologues militaires. Ces initiatives locales existent, mais sans doctrine commune, leur efficacité varie d’une unité à l’autre.
Ressources pour ceux qui souffrent
ERAN : ligne d’assistance 1201 (hébreu, russe, arabe, anglais) et chat en ligne, 24h/24.
Ministère de la Défense : numéro *8944 pour soldats, réservistes et vétérans.
Les deux services répondent même durant Shabbat et les fêtes nationales. Ils assurent l’orientation vers un professionnel et, en cas d’urgence, l’envoi d’une équipe de soutien.
Quel avenir ?
Alors que l’armée reste engagée dans la bande de Gaza et qu’un nouvel appel de réservistes se profile, la question de la santé mentale devient un facteur stratégique. Sans soldats aptes et motivés, la supériorité technologique perd de sa pertinence. Le chef d’état‑major a d’ailleurs reconnu, lors d’une récente réunion à huis clos, que « maintenir le moral est désormais aussi crucial que gagner un combat ».
Avec 18 vies déjà perdues cette année, le défi est clair : il faudra combiner transparence statistique, prévention proactive et accompagnement durable pour endiguer ce fléau silencieux. À défaut, les cicatrices psychiques de la guerre risquent de s’élargir bien au‑delà des lignes de front.
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