Jeux paralympiques 2024 : Après la cata de Rio, comment le para cyclisme français est devenu le boss final du jeu

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De notre envoyé spécial à Médailles Land,

Le village olympique ne sert pas qu’à manger, dormir et échanger ses fluides corporels, il permet aussi aux différentes équipes de France de se jauger, comparer leurs sensations et partager leurs joies ou leurs peines. Et accessoirement de se lancer des paris. C’est ce qu’on fait les para nageurs et les paras cyclistes. Gloutons parmi les gloutons, les athlètes de ces deux disciplines stars de la délégation tricolore se tirent la bourre pour savoir qui terminera en tête du classement des médailles. « Ouais, on se fait une petite guéguerre entre nous », rigolait Dorian Foulon en zone mixte après avoir décroché le bronze sur le contre-la-montre (catégorie C5).

Et dans ce match à distance, les bikers ont probablement plié le jeu ce mercredi, du côté de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), où se sont enchaînées les courses à un rythme effréné tout au long de la journée. Avec une moisson de onze médailles, les Bleus du para cyclisme sur route ont envoyé un gros high kick dans la face de l’histoire des Jeux paralympiques.

Pour que vous preniez bien la mesure de l’exploit, dites-vous qu’à Tokyo, il y a trois ans, les routards avaient ramené onze médailles… au total. Un record qui sera explosé d’ici la fin de ces Jeux puisqu’il reste encore masse de courses à venir en indiv et par équipe. On ne va pas ici vous mettre toutes les réactions glanées au fil de la journée dans une zone mixte aux allures de moulin, sachez simplement qu’on a vu plus de sourires sur les visages que de têtes baissées.

Le réveil qui pique pour Gaugain et Léauté

Oh, il y a bien Heïdi Gaugain, l’ultra-compétitrice médaillée d’argent aux premières heures du jour, pour regretter sa performance, comme elle l’avait déjà fait trois jours plus tôt après avoir fini deuxième derrière Marie Patouillet lors de la poursuite. Passée à quatre secondes de l’or, la Lavalloise l’avait encore (un peu) mauvaise mercredi.

« Putain, fait chier, quatre secondes, lâcha-t-elle en souriant après sa course. Bon, si on m’avait dit ce matin qu’elle ne me mettrait que quatre secondes, j’aurais pris. L’année dernière, elle m’avait mis plus d’une minute. Pour moi, elle était intouchable. Je suis quand même contente. Je vais essayer de savourer plus le podium. » »

Première du clan tricolore à passer en contre-la-montre, à 8 heures, Gaugain avait hâte d’aller taper une petite sieste. « Je me suis levée à 4h20, j’ai mangé à 4h50 et on a pris la navette à 5 heures, ce n’était pas facile. Là, je vais aller prendre le petit déjeuner et me rendormir. Courir à 8 heures, c’est pas cool », dira-t-elle dans un éclat de rire, avant de filer.

Alexandre Léauté termine sa nuit après avoir dû se lever aux aurores pour choper l'or.
Alexandre Léauté termine sa nuit après avoir dû se lever aux aurores pour choper l’or.  - Ed Sykes/SWpix.com//SIPA

Croisé au McDo du coin quelques heures après sa médaille d’or, Alexandre Léauté nous confiait aussi avoir eu du mal à se lever avec les étoiles. « C’est pas humain de nous faire courir aussi tôt », se marre-t-il en attendant sa commande. « Ils ne doivent pas être habitués à avoir autant de clients », embraye alors le champion avant de nous quitter. Anecdote parfaitement éclatée au sol mais qui nous permet de glisser ici qu’on peut être quadruple médaillé paralympique et se soucier du bien-être des employés de fast-food.

Toiture et peut-être Mini Cooper pour Le Cunff

Parmi les autres réactions sympas, on a celle de Kévin Le Cunff, lui aussi médaillé d’or dans la catégorie C4, lequel nous expliquait qu’il allait « pouvoir refaire [sa] toiture » avec sa prime de médaille. « Et si j’en gagne une autre après-demain, ça sera peut-être la Mini Cooper pour madame. » Quant à Gatien Le Rousseau, l’argent autour du cou après sa deuxième place derrière Le Cunff, ça sera « une soirée en boîte et une bouteille de champ’ pour les potes, et le reste pour les études de kiné. »

Ils pourraient même faire un beau voyage tous ensemble vu la razzia de médailles à Clichy-sous-Bois. Ce serait l’occasion de se remémorer le chemin parcouru en huit ans. A Rio, en 2016, les Bleus étaient rentrés au pays avec une seule médaille, le bronze de Joël Jeannot en handbike. Que s’est-il donc passé pendant ce laps de temps ? Pour le savoir, doté de notre légendaire flair de chien truffier, on avait posé la question à Laurent Thirionet avant même le début des Paras. Notre question ne l’avait pas étonné, lui-même avait annoncé que son équipe avait de fortes chances de claquer les vingt-cinq médailles, ce qui, aujourd’hui, ne semble plus si déconnant que ça.

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Alors, Laurent, c’est quoi le secret ? « On peut remercier la Fédération française de handisport et l’ANS pour les moyens qu’ils ont mis à notre disposition et qui nous ont permis de recruter des staffs et de créer une vraie structure autour de cette équipe, avait-il répondu. Aujourd’hui, on n’a pas à rougir de notre équipe par rapport aux valides, on travaille avec des entraîneurs, un staff médical, une préparatrice mentale, des kinés, des ostéos, on a vraiment toutes les compétences qu’on peut retrouver dans une structure de haut niveau. »

Sans parler du matos qui va avec et qui est indispensable quand on veut jouer dans la cour des grands. « Quand vous faites des épreuves qui se jouent à quelques dixièmes de secondes, si vous n’avez pas le dernier matériel performant, si vous n’avez pas emmené vos athlètes en soufflerie pour étudier leurs positions, vous n’y arrivez pas, acquiesce-t-il. Tous ces petits gains marginaux qu’on a mis les uns derrière les autres font qu’aujourd’hui on a une équipe compétitive. »

Enfin, cette équipe ne serait rien sans les formidables athlètes qui la composent. Car vous pouvez avoir tout l’argent du monde, vous ne transformerez jamais des ânes et chevaux de course à coups de biftons. « Ils sont exceptionnels, confirme Thirionet. Et on a aussi un gros réservoir qui fait que l’effectif se renouvelle sans cesse. A la fin des Jeux, on aura tellement parlé du para cyclisme que ça va susciter énormément de vocations chez les jeunes porteurs de handicap et on aura encore plus de monde, ça va faire un appel d’air. On a déjà des problèmes de riche mais ça va être encore pire dans quatre ans à Los Angeles. »

Outre leurs perfs de chameaux, les Tricolores forment un groupe soudé comme jamais. « On est des potes avant tout », affirme Dorian Foulon. Et voir les autres faire un résultat les poussent toutes et tous à se donner encore plus à fond. « Dans les appartements, on est mélangés entre ceux qui font du vélo et les handbike, ça crée une émulation, c’est sympa », poursuit-il. Une ambiance de potes qui se ressent quand on a la chance de les côtoyer de près.

En témoigne cette petite scène sympa, alors qu’on interrogeait Thomas Peyroton-Dartet en zone mixte après sa victoire chez les C3. Fou de joie pour leur copain, le trio infernal Léauté-Le Cunff-Le Rousseau, qui passait par là à l’improviste, n’a pas hésité à interrompre la séance de questions-réponses pour le prendre dans leurs bras. Et Alexandre Léauté de lui susurrer à l’oreille : « On va tout bousiller sur la course en ligne [vendredi], gros ». On a déjà hâte d’y être.

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