Concernant la technologie, cette voie passe par l’encadrement de l’intelligence artificielle. L’IA offre un «potentiel de croissance fantastique, car elle automatise des tâches et la production d’idées», a déclaré lundi matin l’enseignant au Collège de France et à l’Insead. Mais elle doit être cadrée, notamment par une politique sur la concurrence, sans quoi «quelques géants continueront à être dominants et l’arrivée de nouveaux acteurs sera limitée», a encore expliqué Philippe Aghion.
Cet accompagnement de l’IA passe aussi par le développement d’une «flexisécurité» comme il en existe déjà dans les pays nordiques, c’est-à-dire des politiques qui combinent flexibilité pour les entreprises et sécurité pour les travailleurs.
Tirer le meilleur de la révolution technologique
C’est en minimisant ses effets négatifs que l’on peut permettre à une technologie comme l’IA de lancer un cercle vertueux, selon le chercheur français: «Chaque révolution, que ce soit le moteur à vapeur, l’électricité ou l’informatique, a généré des craintes pour les emplois, mais elle provoque aussi des gains de productivité qui font que la demande pour les produits augmente, que les marchés s’élargissent, ce qui nécessite davantage de besoins de main-d’œuvre.» C’est ce que l’on pourrait appeler une «destruction créatrice 2.0», une modernisation de la théorie de l’économiste autrichien Joseph Schumpeter.
Appelé à commenter le contexte économique global, Philippe Aghion a relevé que «des nuages noirs s’accumulent. La globalisation et les tarifs douaniers constituent des obstacles à la croissance, qui a besoin de plus grands marchés et de transferts de technologie; l’ouverture est le vecteur de la croissance».
En conséquence, l’Europe doit réagir, a-t-il poursuivi: «Les pays européens doivent comprendre qu’on ne peut pas laisser les Etats-Unis et la Chine être les leaders technologiques», regrettant que le Vieux-Continent ait échoué à mettre en place des innovations révolutionnaires dans la haute technologie depuis les années 1980, se contentant de pas en avant «d’ampleur moyenne».
Pour changer cette situation, il est impératif d’instaurer un système de financement de l’innovation, comme d’autres pays le font pour la défense, le climat ou les biotechnologies. Des domaines dans lesquels «la recherche européenne est très forte, mais qui ne sont pas traduits en avancées majeures», regrette encore le Français. Qui va dédier sa part de la récompense financière du Prix Nobel à des projets de recherche de son laboratoire.
Philippe Aghion, la rénovation du capitalisme par l’innovation
D’ancien membre du Parti communiste à conseiller économique du président Emmanuel Macron, avant de s’en éloigner: le Français Philippe Aghion, lauréat du Prix Nobel d’économie lundi, veut mieux réguler le capitalisme en favorisant l’innovation au détriment des rentes de situation.
«La croissance au long terme, c’est l’innovation, pas l’accumulation de capital, qui au bout d’un moment s’essouffle», explique le chercheur français de 69 ans, disciple de l’économiste autrichien Joseph Schumpeter, connu pour sa théorie sur la destruction créatrice.
Ce père de deux enfants – divorcé – estime que «l’important, c’est d’adopter des politiques qui renforcent l’innovation, mais en même temps de construire un système avec une réelle mobilité sociale»: un «capitalisme régulé» à la manière des modèles scandinaves, qui doit «penser aux plus vulnérables». (AFP)
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