A Washington, la présentation du plan de paix élaboré par l’administration Trump pour mettre fin à la guerre en Ukraine n’a pas seulement provoqué l’inquiétude des alliés européens : elle a déclenché une véritable tempête au cœur même du Parti républicain. Plusieurs élus, pourtant membres du camp présidentiel, ont dénoncé un texte qui accorderait à la Russie ce qu’elle réclame depuis des années et qui, selon eux, trahirait la tradition américaine de fermeté face à Moscou.
Le premier à rompre ouvertement les rangs est le sénateur Roger Wicker, figure respectée du parti et président de la commission des Services armés. « L’Ukraine ne devrait pas être forcée de céder ses terres à l’un des criminels de guerre les plus flagrants au monde, Vladimir Poutine », a-t-il affirmé. Ses mots, lourds de sens, montrent l’ampleur du fossé qui s’est soudain creusé entre les républicains historiques et Donald Trump.
Même colère du côté des représentants
Dans les couloirs du Sénat, la même stupéfaction s’exprime chez Mike Rounds, élu du Dakota du Sud et proche du courant conservateur. Lui aussi a découvert un texte qui, selon ses termes rapportés par Reuters, « ne ressemble en rien à une proposition américaine ». Sa formule devient l’un des symboles de la fronde. « Ce n’est pas notre recommandation, ce n’est pas notre plan… On aurait dit qu’il avait été écrit en russe à l’origine. » Rarement un sénateur républicain aura suggéré de manière aussi directe qu’un document défendu par un président de son propre parti pourrait être inspiré par le Kremlin.
La contestation a gagné rapidement la Chambre des représentants. Le député Don Bacon, ancien général de l’US Air Force, s’est indigné publiquement sur X, repris par The Independent. Il accuse l’administration de pousser « un plan de reddition » imposé à Kiev et d’exposer l’Ukraine à de futures attaques. « Ils sont en train de pousser un plan de reddition pour l’Ukraine… On dirait que c’est la Russie qui l’a écrit », écrit-il. Pour cet élu, réputé modéré et généralement mesuré, la charge est pour le moins spectaculaire.
La « liste des souhaits » de Moscou
A cette colère s’ajoutent les révélations rapportées par AP News, selon lesquelles plusieurs sénateurs auraient compris, lors d’un briefing confidentiel, que le texte qu’on leur présentait correspondait en réalité à la « liste de souhaits » de Moscou.
Ces parlementaires affirment que le secrétaire d’Etat Marco Rubio leur aurait décrit les grandes lignes du document comme un ensemble d’exigences déjà formulées par le Kremlin. L’administration dément catégoriquement, mais les doutes persistent. « On nous demande de valider un plan qui donne à la Russie ce qu’elle n’a pas obtenu sur le champ de bataille », témoigne anonymement l’un des sénateurs présents.
La Russie, ennemie de toujours des Etats-Unis
Ce malaise interne prend une dimension idéologique. En effet, depuis Ronald Reagan jusqu’à John McCain, la droite américaine a toujours construit son identité internationale sur la résistance à l’impérialisme russe. Voir aujourd’hui un président républicain soutenir un texte perçu comme une concession majeure à Moscou est vécu par certains comme une trahison doctrinale. La fracture ne se résume pas à une différence de stratégie : elle touche au sens même du rôle de l’Amérique dans le monde.
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L’opposition républicaine embarrasse désormais la Maison-Blanche, qui a minimisé la portée du document en le décrivant comme une « base de discussion ». Mais les élus les plus expérimentés ne semblent pas disposés à avaliser un texte qu’ils jugent dangereux pour l’Ukraine, pour l’Otan et pour la crédibilité stratégique des Etats-Unis. Dans une atmosphère devenue électrique, un conseiller du Sénat confie sous anonymat à plusieurs médias américains. « Ce plan a ouvert une brèche. Pour beaucoup d’élus, la Russie reste l’ennemi historique. Et ils n’accepteront jamais de lui offrir une victoire diplomatique. »
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