Guerre en Ukraine : Avec ses assassinats ciblés, Kiev met en lumière les « négligences stupéfiantes » de la Russie

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En matière d’élimination à l’étranger, Vladimir Poutine reste roi. Sous sa houlette, au moins une vingtaine de ses adversaires ont été assassinés. Et bon nombre d’entre eux ont péri hors de Russie. Mais depuis l’invasion de ses territoires, Kievs’essaye aussi à l’exercice. En une semaine, l’Ukrainea revendiqué deux assassinats sur le territoire russe. Celui de Mikhaïl Chatski, un ingénieur qui concevait des missiles, le 12 décembre, et celui, plus retentissant, d’Igor Kirillov, mardi matin.

Le commandant des forces russes de défense radiologique, chimique et biologique a été tué dans l’explosion d’une trottinette électrique piégée. « Depuis deux ans, les Ukrainiens se sont lancés dans des éliminations ciblées », note Igor Delanoë, directeur adjoint de l’observatoire franco-russe et chercheur associé à l’IRIS. « Kiev a clairement des capacités de renseignement en Russie et ce n’est pas surprenant : les Ukrainiens et les Russes se ressemblent physiquement, ils parlent la même langue [de nombreux Ukrainiens parlent Russe] et Moscou est une mégalopole de plus de dix millions d’habitants, c’est une zone facilement accessible. Il est probable qu’ils bénéficient aussi de l’aide de services occidentaux. »

« Pas de garde rapprochée »

Le service de sécurité ukrainien, le SBU, a revendiqué l’assassinat d’Igor Kirillov, que Kiev accuse d’avoir ordonné l’utilisation d’armes chimiques. Les autorités ukrainiennes se débarrassent ainsi publiquement d’un symbole de l’oppression russe. Mais leur objectif est protéiforme. « Cet assassinat leur permet d’abord d’afficher la vulnérabilité de leur adversaire et, donc, d’entraîner un effet psychologique », explique Igor Delanoë. C’est-à-dire instiller la peur chez les membres de l’administration Poutine.

Et il a de quoi s’interroger quand on voit avec quelle facilité ce haut gradé a pu être assassiné. « C’est stupéfiant de voir que près de trois ans après le début du conflit, la Russie souffre encore de telles négligences. Igor Kirillov ne faisait visiblement pas l’objet de mesures de protection spéciales. Il n’avait pas de garde rapprochée », précise Igor Delanoë. Sur les images de l’attentat, on voit en effet le général sortir de chez lui, uniquement accompagné de son secrétaire, avant que la bombe n’explose.

Repousser les pourparlers

Kiev espère toutefois peut-être aussi peser sur les négociations à venir. D’après Ryhor Nizhnikau, spécialiste de l’Ukraine à l’Institut finlandais des affaires internationales cité par notre confrère de France 24, « l’Ukraine a besoin d’accentuer la pression sur la Russie avant que Donald Trump ne devienne officiellement président ». « On peut imaginer que l’un des objectifs est en effet de repousser les pourparlers que le président élu appelle de ses vœux. Voire de les saboter », abonde Igor Delanoë.

Un tel assassinat pourrait aussi « provoquer une réaction disproportionnée et violente de la Russie », note le directeur adjoint de l’Observatoire franco-russe. Tellement disproportionnée qu’elle pourrait accoucher d’un « nouvel élan en faveur de l’Ukraine » sous la forme d’aide militaire, financière ou simplement géopolitique. Sur le champ de bataille en revanche, la mort d’un seul homme ne modifiera pas la dynamique défavorable pour Kiev.

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« La mort de Mikhaïl Chatski, qui avait un rôle majeur dans le développement du programme d’armement russe et une formation de haut niveau, pourrait avoir un impact sur le moyen et long terme. Le Mossad avait d’ailleurs tué plusieurs responsables du programme nucléaire iranien pour cette raison », analyse Igor Delanoë. Mais qu’il s’agisse de Mikhaïl Chatski ou d’Igor Kirillov, « sur le front, ça ne changera absolument rien ».

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