Le Hamas a prévenu : sa décision pourrait mettre plusieurs jours à venir, tant la situation est complexe. Mais le mouvement palestinien n’a pas le choix : il devra donner une réponse au plan de paix à Gaza proposé lundi par les Etats-Unis. Soutenu par le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahou, ce projet comprend 20 points. Parmi eux, le retour de tous les otages dans les 72 heures, ou encore le fait qu’« Israël n’occupera ni n’annexera Gaza ». Le Hamas va-t-il y adhérer ?
La « meilleure chance pour mettre la fin à la guerre à Gaza », dixit Berlin, reste « très imprécise », souligne Alain Gresh, journaliste et spécialiste du conflit israélo-palestinien. Ainsi, « Benyamin Netanyahou a expliqué mardi matin qu’il n’y aurait pas d’Etat palestinien, c’est pourtant écrit dans le plan ! », développe l’auteur de Palestine, Un peuple qui ne veut pas mourir (Ed. Les Liens Qui Libèrent). Un plan qui emploie toutefois le conditionnel : « À mesure que le redéveloppement de Gaza progresse […], les conditions pourraient enfin être réunies pour ouvrir une voie crédible vers l’autodétermination et la création d’un État palestinien », est-il écrit dans le point 19.
Les otages, la dernière « carte » du Hamas
La question du retrait des troupes israéliennes reste, elle aussi, nébuleuse. « Les forces israéliennes se retireront jusqu’à la ligne convenue pour préparer la libération des otages », précise le point numéro 3 du plan. En marge de ce retrait progressif, il prévoit d’ailleurs le déploiement d’une « force de stabilisation internationale ». Pourtant, Benyamin Netanyahou a affirmé mardi dans une vidéo que « Tsahal restera dans la majeure partie de Gaza ». De plus, « il ne semble pas y avoir de mécanisme permettant d’arrêter ou de faire pression sur Israël », souligne Alain Gresh.
En parallèle, la partie sur les otages stipule le retour de tous ceux qui sont toujours piegés dans la bande de Gaza (soit 47 personnes aujourd’hui, dont une vingtaine serait encore en vie) dans les 72 heures. Or, « la seule carte que possède le Hamas [à l’origine des massacres du 7-octobre], c’est le chantage lié aux otages, et le Hamas le sait », souligne Alain Gresh.
D’autres signaux pourraient inquiéter le mouvement palestinien, comme la nomination de Tony Blair, l’ancien Premier ministre britannique, pressenti pour siéger dans un comité chargé de la transition à Gaza. « Tony Blair a été coordinateur du Quartet pour le Moyen-Orient durant près de huit ans [qui devait relancer le processus de paix israélo-palestinien], mais ses positions ont été tellement perçues comme pro-israéliennes qu’elles n’ont jamais abouti », rappelle Alain Gresh.
Le choix entre « le mauvais et le pire »
Le Hamas est donc pris « entre deux feux : d’un côté, ils ont la volonté que ça s’arrête, alors que la situation est absolument terrible à Gaza [où plus de 66.000 personnes ont perdu la vie d’après le ministère de la Santé du Hamas selon des chiffres jugés fiables par l’ONU]. De l’autre, la peur d’être mis de côté, voire annihilé dans ce processus », explique Alain Gresh. Toutefois, « dans la bande de Gaza, on se demande qui est encore en charge au Hamas vu l’ampleur des destructions », glisse l’expert. Le Hamas en exil, moins directement concerné, pourrait s’avérer plus souple.
Si le plan promet une amnistie aux membres du Hamas s’ils rendent les armes ou s’exilent, ils sont toutefois ouvertement exclus de l’avenir politique de la Palestine. Le point 13 stipule ainsi : « le Hamas et les autres factions s’engagent à ne jouer aucun rôle dans la gouvernance de Gaza, directement, indirectement ou sous quelque forme que ce soit ». L’Autorité palestinienne a de son côté salué les « efforts sincères et déterminés » du président américain, ajoutant « accorder sa confiance en sa capacité à trouver un chemin vers la paix ».
Examiner le plan de façon « responsable »
« Le Hamas a donc le choix entre le mauvais et le pire de son point de vue, décrypte Alain Gresh. Il est coincé. Il a perdu bon nombre de ses chefs militaires, de ses capacités militaires et est soumis à des pressions des pays arabes qui veulent la fin de ce massacre. » Le Qatar a d’ailleurs annoncé qu’une réunion était prévue mardi soir avec le Hamas et la Turquie, promettant que le mouvement palestinien examinerait la proposition de façon « responsable ».
Donald Trump a donné « trois ou quatre jours » au mouvement, prévenant que s’il ne donnait pas son feu vert, « cela se finira de manière très triste ». Même s’il est peu optimiste, Alain Gresh ne ferme pas la porte à un heureux dénouement : « Tous les acteurs ont envie que cette guerre cesse. C’est tellement abominable ce qu’il se passe à Gaza. Si cet espoir existe, il faut s’y accrocher. »
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