Le consommateur israélien s’est inquiété plus d’une fois d’une possible pénurie d’œufs dans les supermarchés. Si la pénurie a été évitée, c’est grâce à la réaction du gouvernement israélien qui a rapidement autorisé l’importation d’œufs étrangers, en espérant que la grippe aviaire qui sévit aux Etats-Unis et en Europe permette à Israël de trouver un (ou plusieurs) fournisseur à prix raisonnable.
Des stocks remplis.
Le consommateur israélien n’est pas resté insensible à la pénurie d’œufs qui secoue les pays occidentaux ; lui-même est un gros amateur d’œufs.
Les Israéliens peuvent dire un grand merci à Avi Dichter, leur ministre de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire. Une fois n’est pas coutume : en contrôlant le prix des œufs et en autorisant leur importation, Dichter a rempli les stocks à bas prix, tournant le dos à la guerre des œufs qui sévit dans certains pays occidentaux.
Il y a quelques semaines déjà, la ruée sur les boîtes d’œufs a commencé dans les supermarchés d’Israël. L’œuf est un des aliments préférés de l’Israélien : il en est un gros consommateur avec une moyenne de 200 millions d’œufs par mois. Durant les fêtes, la demande d’œufs fait un bond de 20% à 240 millions le mois ; c’est un aliment relativement bon marché en Israël et ses bienfaits pour la santé ne sont plus à démontrer.
D’autant plus qu’au moment où la cherté de la vie ampute le pouvoir d’achat des Israéliens, la forte consommation d’œufs permet à beaucoup de foyers de ne pas dépasser leur budget de fête.
La demande est aussi encouragée par les prix de l’œuf qui sont fixés par le gouvernement, comme d’autres produits de base (pain et laitage). La boîte d’une douzaine d’œufs (taille L) est à 14,09 shekels soit 3,50 euros – un prix abordable pour les petits budgets. On reste très loin de l’ « œuflation » qui fait rage outre-Atlantique où la boîte a dépassé les 15 dollars dans certains magasins.
Opération « rayons pleins ».
Le prix bas des œufs en Israël ne garantit pas pour autant qu’il y en ait pour tout le monde, surtout à Pessah. Au contraire, la demande locale fait un bond mais les poules pondeuses n’en tiennent pas forcément compte, d’autant plus que de nombreux poulaillers du Nord et Sud du pays ont été détruits ou endommagés par la guerre en cours.
Pour éviter une crise inutile, le gouvernement a pris les devants. Dès le 16 février dernier, le ministère de l’Agriculture et de la Sécurité alimentaire a lancé une opération qui répond au nom attractif de « rayons pleins » : il s’agit d’encourager l’importation d’œufs de table pour combler les lacunes de la production locale et assurer un approvisionnement continu au public.
Le ministère a donc autorisé un quota d’importation de 105 millions d’œufs en franchise de droits de douane – de quoi suffire à répondre à la demande en prévision de Pessah. Et pour combler les différences de prix, le ministère a aussi décidé de subventionner les importateurs israéliens, ce qui leur permet d’abaisser le prix de l’œuf étranger qui arrive en Israël.
Certes, l’opération ne fait pas que des heureux : les éleveurs israéliens de poules pondeuses estiment que la production locale est suffisante pour faire face à la demande et que les importations leur feront une concurrence déloyale.
En ce début 2025, la Pologne est devenue le principal fournisseur étranger d’œufs à Israël.
à propos de l’auteur
Jacques Bendelac est économiste et chercheur en sciences sociales à Jérusalem où il est installé depuis 1983. Il possède un doctorat en sciences économiques de l’Université de Paris. Il a enseigné l’économie à l’Institut supérieur de Technologie de Jérusalem de 1994 à 1998, à l’Université Hébraïque de Jérusalem de 2002 à 2005 et au Collège universitaire de Netanya de 2012 à 2020. Il est l’auteur de nombreux ouvrages et articles consacrés à Israël et aux relations israélo-palestiniennes. Il est notamment l’auteur de « Les Arabes d’Israël » (Autrement, 2008), « Israël-Palestine : demain, deux Etats partenaires ? » (Armand Colin, 2012), « Les Israéliens, hypercréatifs ! » (avec Mati Ben-Avraham, Ateliers Henry Dougier, 2015) et « Israël, mode d’emploi » (Editions Plein Jour, 2018). Dernier ouvrage paru : « Les Années Netanyahou, le grand virage d’Israël » (L’Harmattan, 2022). Régulièrement, il commente l’actualité économique au Proche-Orient dans les médias français et israéliens.
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