Gaza ; Comment Golda Meir voulait régler le problème

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Gaza ; Comment Golda Meir voulait régler le problème

« Opération Paraguay » : un pari discret de Golda Meïr qui a tourné court

À la fin des années 1960, alors que Gaza vient de passer sous administration israélienne après la guerre de 1967, l’entourage de Golda Meïr explore une piste inattendue : favoriser l’émigration volontaire de Gazaouis vers l’Amérique latine. Dans le huis clos des réunions gouvernementales de 1969, naît un dispositif discret — que l’on appellera plus tard « Opération Paraguay » — destiné à offrir une porte de sortie à des habitants enfermés dans une économie asphyxiée et à réduire, côté israélien, une pression démographique jugée explosive.

Le schéma est d’une simplicité redoutable : l’État d’Israël prend en charge le billet d’avion, promet une prime unique de 100 dollars à chaque émigrant, et verse 33 dollars par personne au gouvernement du Paraguay, alors dirigé par Alfredo Stroessner. En échange, Asuncion ouvre la voie à un statut de résident puis, après cinq ans, à la citoyenneté. Pour « commercialiser » le projet, une agence de voyages est discrètement montée à Gaza : brochures ensoleillées, promesses d’intégration, et la perspective d’un nouveau départ loin des tensions régionales. Sur le papier, le Paraguay se dit prêt à accueillir jusqu’à 60 000 personnes — un volume considérable pour un pays en quête de bras et désireux de se développer.

La logique, telle qu’elle est défendue à l’époque, se veut pragmatique : offrir une migration légale et subventionnée, donc choisie, à des Gazaouis tentés par l’aventure, tout en diminuant le risque de radicalisation dans une bande exiguë où le chômage flambe. C’est aussi un calcul de realpolitik : traiter avec un régime autoritaire, mais qui, en pratique, « règle » rapidement les problèmes administratifs et accepte un contingent précis de nouveaux arrivants. L’opération reçoit même, selon des documents exhumés bien plus tard, un premier acompte financier pour amorcer l’accueil des dix premiers milliers de candidats.

Mais la mécanique se grippe presque aussitôt. D’abord parce que la promesse latino-américaine se révèle moins rose que ne l’annonçaient les brochures : emplois incertains, peu de relais communautaires, difficultés de langue. Ensuite et surtout, parce qu’un événement tragique vient tout faire basculer : le 4 mai 1970, deux assaillants palestiniens ouvrent le feu dans l’enceinte de l’ambassade d’Israël à Asuncion. Edna Pe’er, l’épouse d’un diplomate, est mortellement atteinte ; une seconde employée est grièvement blessée. Pour le pouvoir paraguayen, c’est l’alarme rouge. Craignant l’importation du conflit et l’arrivée de réseaux violents, il ferme le robinet migratoire et débranche l’accord. Le programme, déjà fragile, s’éteint pratiquement sur-le-champ.

Avec le recul, « Opération Paraguay » ressemble à une tentative brève, partiellement improvisée et rapidement dépassée par la réalité. Les estimations du nombre de Gazaouis effectivement partis varient, mais l’on parle de quelques dizaines tout au plus — preuve que le projet n’a jamais pris l’ampleur envisagée. Dans les archives, on retrouve pourtant l’architecture d’un dispositif complet : subventions, guichet d’orientation, horizon de naturalisation. Il manque ce que toutes les politiques migratoires exigent pour durer : un écosystème d’accueil solide, des garanties d’emploi crédibles et un contexte sécuritaire maîtrisé.

La séquence s’inscrit aussi dans une géopolitique sud-américaine de l’époque peu reluisante : le Paraguay de Stroessner a servi de refuge à des criminels nazis, et l’appareil israélien réévalue alors ses priorités entre traque des bourreaux de la Shoah et menace terroriste contemporaine. Dans cette zone grise, l’idée d’un « corridor » migratoire a pu paraître à Jérusalem comme une option transitoire — ni expulsion, ni statu quo — avant que l’irruption de la violence ne la rende politiquement inassumable.

Que retenir, aujourd’hui, de cet épisode ? D’abord, qu’il ne s’agissait pas d’un « plan de transfert » forcé mais d’une filière d’émigration choisie, subventionnée et contractualisée avec un État tiers. Ensuite, que toute solution durable suppose deux conditions sans lesquelles les scénarios les plus sophistiqués déraillent : la sécurité des diplomates et des civils, et la sincérité du pays d’accueil à bâtir de vraies opportunités. Enfin — et c’est la leçon la plus actuelle — que les impasses de Gaza ne se résolvent ni par l’illusion ni par la terreur.

Cet épisode rappelle que la sécurité des Israéliens et la protection de leurs représentants à l’étranger sont non négociables. Toute initiative humanitaire ou migratoire ne peut prospérer que là où l’État d’Israël est assuré que la violence ne suivra pas ses ressortissants, et où les partenaires tiennent leurs engagements. Face aux menaces persistantes, Israël a raison de privilégier des solutions transparentes, légales et respectueuses des choix individuels — et de renoncer sans hésiter dès que le terrorisme tente d’en détourner le sens.

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