Erdogan peut sourire : l’Allemagne prend une mesure spectaculaire
L’annonce récente de l’acceptation par l’Allemagne d’ouvrir des négociations pour la vente d’avions de combat Eurofighter Typhoon à la Turquie marque un tournant diplomatique majeur. Le ministre allemand des Affaires étrangères, Johann Wadephul, a qualifié cette démarche de « tout à fait naturelle » dans le cadre de la défense collective de l’alliance OTAN. En dépit des vives réserves exprimées par la Grèce, Berlin insiste : « La Turquie est un partenaire fiable au sein de l’OTAN ».
L’accord envisagé porterait sur la livraison de 24 à 40 Eurofighter à la Turquie, produits en coopération par Airbus, BAE Systems et Leonardo. Cette transaction survient alors que la Turquie cherche à combler un vide aérien depuis sa sortie du programme américain F‑35 Lightning II en 2019 à la suite de l’acquisition du système russe S-400.
Du côté turc, l’opération représente un enjeu stratégique : moderniser sa flotte et rehausser son influence régionale. En revanche, pour la Grèce, proche alliée d’Israël et membre de l’OTAN, ce projet est perçu comme une possible altération de l’équilibre militaire en mer Égée. La position grecque se fonde sur les antécédents de tensions maritimes et aériennes avec la Turquie, dans un contexte où toute supériorité militaire de l’une ou l’autre des deux nations peut avoir des répercussions régionales.
Berlin s’est efforcé de répondre aux inquiétudes d’Athènes : Wadephul a assuré que l’Allemagne ne tolérerait aucun déploiement de ces avions « contre un membre de l’OTAN ou de l’Union européenne ». Il a également insisté sur l’importance de la cohésion de l’OTAN face aux menaces actuelles, notamment russes. Pour l’Allemagne, la Turquie, en tant que géant stratégique au carrefour de l’Europe et du Moyen-Orient, constitue un pilier incontournable de la défense occidentale.
Pour Israël, cette dynamique présente un double visage. D’une part, un renforcement militaire turc peut être surveillé avec prudence : Ankara entretient des relations tendues avec Tel-Aviv, notamment sur les dossiers syrien et palestinien. D’autre part, le choix fait par Berlin de privilégier une coopération avec la Turquie au sein de l’OTAN sans condition stricte sur les restrictions d’usage en faveur d’Athènes souligne une réal-politique qui pourrait mettre en jeu la sécurité d’Israël en Méditerranée orientale. L’État hébreu observe donc de près les retombées de ce rapprochement germano-turc sur le plan régional et stratégique.
Ce mouvement s’inscrit aussi dans un contexte plus large de redéfinition des partenariats en Europe et au Moyen-Orient. La prise de décision à Berlin résulte d’un changement de cap politique : l’ancien gouvernement allemand s’était montré plus prudent sur les exportations d’armes à Ankara pour des motifs de droits de l’homme et de stabilité régionale. Le nouveau gouvernement a opté pour une logique plus pragmatique, favorisant l’ancrage de la Turquie dans l’OTAN plutôt que son éloignement. Cette approche vise à consolider le flanc sud-est de l’alliance en période d’instabilité, tout en admettant les risques diplomatiques.
La suite dépendra des modalités de l’accord : calendrier de livraison, conditionnalités d’utilisation, garanties d’emploi uniquement défensif. L’industrie aéronautique européenne travaille déjà sur les modalités contractuelles tandis que la Grèce promène ses réserves diplomatiques et réclame des clauses restrictives. Pour Israël, l’enjeu à moyen terme est de s’assurer que ce nouveau pacte ne se traduise pas par une menace accrue à son encontre ou à ses alliés de la Méditerranée orientale.
Alors que l’Allemagne s’engage à soutenir la Turquie dans l’acquisition des Eurofighter, Israël doit rester vigilant : une Turquie militairement renforcée sans garde-fous clairs pourrait compliquer la donne sécuritaire régionale. Toutefois, ce repositionnement offre aussi à Israël l’opportunité de consolider ses alliances et de rappeler que sa propre supériorité aérienne demeure un élément clé de la stabilité dans la zone. En faisant preuve de fermeté diplomatique et en renforçant ses partenariats stratégiques, Israël s’assure d’être bien placé face aux évolutions de pouvoir et de technologie dans son environnement immédiat.
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