Entre Oslo et Jérusalem, le froid s’installe

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Le Premier ministre norvégien Jonas Gahr Støre

Entre Oslo et Jérusalem, le froid s’installe

La formule est polie, mais le message est brutal : pour Jérusalem, le moment n’est « pas opportun ». Derrière cette diplomatie du sous-entendu, Israël a tout simplement fermé la porte au Premier ministre norvégien Jonas Gahr Støre, qui souhaitait se rendre dans le pays pour des entretiens politiques après des rencontres régionales. Le refus, confirmé par le chef du gouvernement norvégien lui-même, consacre une rupture ouverte entre les deux pays depuis le déclenchement de la guerre à Gaza.

Aux yeux de Støre, la cause de cette fin de non-recevoir ne fait guère de doute. La Norvège s’est placée à la pointe de plusieurs démarches jugées profondément hostiles par Israël : soutien actif aux procédures devant la Cour internationale de Justice, appui aux démarches de la Cour pénale internationale visant à poursuivre des dirigeants israéliens, et reconnaissance officielle de l’État de Palestine en mai 2024, aux côtés de l’Espagne et de l’Irlande. Oslo a clairement assumé cette décision comme un moyen de « faire avancer » la solution à deux États en pleine guerre, provoquant la colère du gouvernement israélien.

À cela s’ajoute un front économique et symbolique. Le gigantesque fonds souverain norvégien, l’un des plus puissants au monde, a déjà désinvesti d’un certain nombre d’entreprises israéliennes et subit la pression de syndicats et d’ONG pour aller plus loin. Dernier signal en date : l’annonce de la sortie de plusieurs sociétés israéliennes de son portefeuille, officiellement pour des raisons de vigilance éthique liées à la situation à Gaza et en Cisjordanie. Pour Israël, qui voit la campagne de désinvestissement comme une arme politique, ce mouvement nourrit l’idée d’une Norvège engagée dans une stratégie de pression globale.

La personnalité et le discours du ministre des Affaires étrangères Espen Barth Eide ont joué un rôle central dans cette dégradation. À plusieurs reprises, Eide a comparé la conduite d’Israël à celle de la Russie en Ukraine, dénonçant ce qu’il qualifie de « doubles standards » occidentaux et avertissant que l’Europe perd en crédibilité lorsqu’elle ne traite pas les deux situations avec le même vocabulaire juridique. Lors d’une conférence internationale au Caire, il avait été le seul chef de diplomatie occidental à condamner exclusivement Israël sans rappeler simultanément la question des otages. Ces prises de position lui ont valu à Jérusalem une réputation de responsable ouvertement hostile, parfois décrit comme plus problématique encore que certains ministres irlandais.

Sur le terrain juridique, Oslo a multiplié les initiatives. La Norvège a participé aux démarches devant la CIJ sur les obligations d’Israël dans les territoires occupés et soutient les demandes d’avis consultatifs sur l’accès de l’aide humanitaire à Gaza. S’agissant de la CPI, le gouvernement norvégien a clairement indiqué qu’en cas de mandats d’arrêt confirmés contre Benyamin Netanyahou ou Yoav Gallant, il serait lié par ses engagements internationaux et agirait en conséquence si les responsables visés entraient sur son territoire. Une position qui a profondément choqué en Israël, pour qui ces procédures sont perçues comme une criminalisation politique de sa défense face au Hamas.

Dans ce climat déjà extrêmement tendu, la participation de Jonas Gahr Støre à une commémoration alternative de la Nuit de Cristal, organisée avec des groupes très critiques d’Israël, a mis de l’huile sur le feu. Le ministère israélien des Affaires étrangères est allé jusqu’à parler de « corruption morale », accusant le Premier ministre norvégien de cautionner un discours assimilant l’État juif à ses persécuteurs d’hier. Støre s’est défendu en réaffirmant son opposition à l’antisémitisme et en soulignant la présence de son gouvernement aux cérémonies officielles, mais la confiance politique était déjà largement entamée.

Dans ce contexte, la demande de visite du chef du gouvernement norvégien tombait au plus mauvais moment. Elle avait germé, selon la presse norvégienne, en marge d’un sommet international à Charm el-Cheikh, où Støre avait multiplié les échanges avec des dirigeants arabes sur la reconstruction de Gaza et « la prochaine phase du développement régional ». Israël, lui, n’a vu dans ce projet de déplacement qu’une occasion pour un dirigeant très critique de se donner une stature supplémentaire au cœur du conflit, après avoir soutenu toutes les démarches juridico-politiques contre l’État hébreu.

Le refus israélien n’est donc pas un simple détail de protocole, mais un signal politique clair : Oslo est désormais classé parmi les capitales les plus hostiles à Jérusalem. Reste à savoir si cette glaciation restera cantonnée au terrain symbolique, ou si elle débordera sur des dossiers concrets où la Norvège, traditionnellement très active au Proche-Orient, joue un rôle de bailleur et de facilitateur. Pour Israël, la ligne est nette : il n’est pas question de dérouler le tapis rouge à un partenaire qui, sous couvert de droit international, multiplie les initiatives perçues comme une mise en accusation unilatérale de l’État juif.

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2 Commentaires

  1. La Norvège, moins peuplée que la Bretagne, ne vit que la rente pétrolière, comme les monarchie du Golfe. Ce que pensent les norvégiens, tout le monde s’en fout.

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