En 1721, le philosophe Montesquieu posait la célèbre question « Comment peut-on être persan ? » dénonçant par-là l’incompréhension de ce qu’est le monde musulman. Cette incompréhension, qui perdure jusqu’à ce jour, est la source des innombrables bourdes géo-politiques perpétrées par l’Europe au Proche-Orient. Ces jours-ci, la communauté internationale en commet une nouvelle, due une fois encore à sa lecture erronée de la carte.
Comptant sur un terroriste islamiste avéré pour qu’il instaure un régime consensuel unissant tous les Syriens, elle oublie tout simplement une donnée de poids : la Syrie n’est pas un pays. Pas plus que la Jordanie, le Liban, l’Irak, la Palestine qui font historiquement partie de ladite Syrie, laquelle désigne une étendue géographique. Créée de toutes pièces en 1916 des suites des accords secrets de Sykes-Picot, elle ne constitue pas une nation au sens propre du terme.
C’est une région. Avec en son sein, une mosaïque intriquée d’ethnies, de tribus et de clans, aujourd’hui artificiellement dispersés de part et d’autre de frontières qui font fi de leurs singularités respectives, qu’ils soient bédouins, kurdes, sunnites, chiites, alaouites, turkmènes, assyriens, chrétiens.
Il existe entre ces ethnies et tribus aussi bien des haines ancestrales que des accords tacites que ne délimitent aucun territoire national, mais des domaines du patrimoine traditionnel régis par des familles dominantes ayant plus d’influence et de pouvoir, au niveau local, que les gouvernements centralisateurs. Lorsque Thomas Barrack, l’ambassadeur américain en place à Ankara, leur demande de s’unir tous en une seule nation sous l’égide d’un djihadiste issu du clan Salamat de la tribu Anizah, il ne précise pas ce qui doit les souder. Un sentiment patriotique ? Barrack, pour sa part, est un patriote américain d’origine libanaise. Ce qui n’est une bonne référence ni à Damas ni à Ankara. Unir, souder ? Encore faudrait-il que le régime en place à Damas exerce effectivement un contrôle sur les différentes composantes du pays.
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