La planète ne cale pas, mais les vieux moteurs faiblissent. Ceux qui tiraient hier – commerce des biens, immobilier chinois, argent gratuit – n’entraînent plus. Résultat : une croissance plus lente, plus chère, plus fragmentée. Entre relocalisations vers des pays « amis » et barrières douanières, réglementaires, normatives qui s’empilent, le commerce mondial n’est plus le moteur suralimenté d’autrefois. Les volumes échangés stagnent. Moins d’économies d’échelle, moins de productivité, moins d’investissements transfrontaliers aussi. La mondialisation n’est pas finie, elle est devenue plus courte, plus rugueuse. Le commerce international des services progresse, mais pas assez pour compenser.
Le pilier chinois en perte de vitesse
De son côté, le BTP, longtemps pilier de l’économie chinoise, s’enlise. La demande de logements chute sous l’effet du déclin démographique, du ralentissement de l’urbanisation, des errements des promoteurs et de la perte de confiance des ménages. Le climat des affaires dans l’immobilier est descendu à son plus bas niveau depuis près de trente-cinq ans. Et le logement n’est pas seul en crise : la construction d’infrastructures, autre pilier du développement, cale, elle aussi. Le pays est désormais largement équipé, la rentabilité des nouveaux projets s’effrite et la dette des collectivités locales, qui finançaient ces chantiers, a explosé. Cette double impasse freine la Chine qui ne parvient pas à retrouver un rythme de croissance élevé : la cible des 5% ne sera pas atteinte cette année. Or, depuis plus de trente ans, chaque tour construite faisait tourner les aciéries, les usines de machines-outils et les fabricants d’équipements du monde entier. Quand Pékin n’empile plus d’étages, le monde perd des points de PIB.
Des consommateurs occidentaux plus prudents
Autre frein à la bonne marche des affaires : le cycle de consommation des biens durables touche à sa fin dans les pays occidentaux. Après la pandémie, les ménages ont suréquipé leurs salons et leurs cuisines. Place aujourd’hui au « suffisamment bon » : reconditionné, location, arbitrages prix/usage. Avec des taux d’intérêt plus élevés, le neuf n’est plus la norme. En Europe, pour une majorité de ménages, la conjoncture n’est pas ou n’est plus propice aux achats importants. L’industrie s’ajuste, les marges se normalisent. C’est aussi la fin de l’argent gratuit. L’illusion des taux à zéro a porté l’immobilier, les fusions-acquisitions et les start-up à forte intensité de cash. Le retour des primes de risque et la dette publique massive rendent le capital plus rare, plus cher. Les projets doivent réellement accroître la productivité. Beaucoup ne passent plus la barre.
Un modèle industriel européen en repli
Autre épine dans le pied de la croissance mondiale, le modèle export-industriel européen tourne au ralenti. Énergie chère, demande mondiale molle, automobile en transition heurtée : l’« usine Europe » produit, mais sans atteindre son régime de croisière : sa part de marché dans le commerce mondial est coincée sous son niveau d’avant Covid ; les excédents plafonnent. C’est un signe qui ne trompe pas : la Chine dégage désormais un excédent commercial plus important vis-à-vis de l’Europe que des États-Unis. L’avantage prix a disparu ; l’avantage qualité ne suffit pas partout. Les investissements se reportent, les chaînes se redessinent ailleurs.
Une démographie qui freine durablement
Dernier facteur de ralentissement, la démographie : vieillissement accéléré, participation au marché du travail stagnante, le dividende démographique s’éteint dans l’OCDE et en Chine. À défaut d’un saut de productivité, le potentiel de croissance s’abaisse. La surépargne grise entretient la prudence, pas l’élan. Les vieux moteurs patinent. Le prochain cycle se gagnera sur 3 leviers : productivité utile, énergie abordable, prévisibilité des règles. Faute de quoi, la croissance restera au ralenti.
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