Les éleveurs de volaille s’opposent au projet d’une grande entreprise agroalimentaire d’importer pour la première fois du poulet congelé en Israël. Ils avertissent que cela mettra au chômage les agriculteurs et les autres employés du secteur, en particulier dans les zones frontalières nord et sud, ravagées par la guerre déclenchée par par le pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre 2023. Cela aura également un impact sur la sécurité alimentaire et la santé publique.
Le consortium Baladi, basé près de la ville méridionale de Kiryat Malachi, importe, fabrique et commercialise des produits alimentaires, notamment de la viande, du poisson et des légumes surgelés.
Il a informé la Bourse de Tel Aviv, plus tôt cette année, avoir signé un accord de cinq ans avec une usine brésilienne pour la production et la commercialisation de poulet casher. Il a précisé qu’il investirait 21 millions de shekels dans des adaptations.
« Nous agissons par responsabilité sociale et économique, et nous nous engageons à fournir aux Israéliens du poulet casher de haute qualité à un prix équitable. Une concurrence loyale dans tous les secteurs, y compris dans celui de la consommation de poulet en Israël, profitera aux consommateurs », a déclaré l’entreprise au Times of Israel.
Cependant, l’Association des éleveurs de volaille craint tellement l’impact potentiel de cette mesure qu’elle a lancé une campagne sur les ondes pour s’y opposer.
Moti Elkabetz, secrétaire de l’association, a accusé Baladi de vouloir « faire s’effondrer le marché israélien et nous rendre dépendants du Brésil, dont le président n’a même pas approuvé l’ambassadrice israélienne ». (Le mois dernier, Israël a annoncé qu’il rétrogradait ses relations avec le Brésil après que ce pays d’Amérique du Sud aurait refusé d’approuver les lettres de créance de la candidate de Jérusalem au poste d’ambassadrice à Brasilia).
La viande de bœuf est importée en Israël car l’industrie locale n’est pas en mesure de répondre à la demande.
Cependant, Israël produit un excédent de viande de volaille, comme l’explique Elkabetz : le pays élève en effet quelque 260 millions de poulets de chair par an, dans une industrie dont le chiffre d’affaires annuel s’élève à 10 milliards de shekels.
Israël affiche la consommation de poulet par habitant la plus élevée, avec 58,2 kg par habitant et par an.
« Si les prix sont élevés, le problème vient des chaînes de distribution », a déclaré Elkabetz, faisant écho aux doléances des producteurs de fruits et légumes.
« Dans le meilleur des cas, la chaîne paie 6,5 shekels par kilogramme à l’éleveur, alors que les coûts s’élèvent à 6 shekels pour les 40 jours nécessaires à l’élevage d’un poulet. L’abattoir est payé à peu près au même prix, mais lorsque la chaîne facture 20 shekels par kilogramme, elle réalise un bénéfice de 8 shekels, tandis que l’État perçoit la TVA. »
Elkabetz a expliqué que la congélation des poulets en excédent était le seul moyen dont disposait l’industrie pour empêcher les chaînes de faire pression sur les abattoirs afin qu’ils ne vendent pas la viande de poulet à perte. Environ 30 % des poulets israéliens sont congelés. Ces poulets étaient vendus à des institutions telles que les hôtels et les cuisines de l’armée israélienne, et mis à la disposition du public lors de rares occasions où les travailleurs arabes, qui constituaient la majorité des abatteurs, ne pouvaient pas travailler, comme lors de la fête musulmane de l’Aïd al-Fitr.
« L’importation de poulet congelé supprimera cet outil de régulation des prix », a déclaré Elkabetz, ajoutant que cela ne ferait pas baisser le coût de la vie.
Elkabetz s’attend également à ce que Baladi n’importe que les parties rentables du poulet, telles que les cuisses, ce qui laisserait les agriculteurs dans l’incapacité de fournir des ailes moins chères s’ils ne pouvaient pas rivaliser sur les parties plus coûteuses.
Elkabetz a indiqué qu’il existait 600 grands élevages de poulets en Israël, tous situés dans des kibboutzim et des moshavim, la plupart à la frontière libanaise et à la frontière de Gaza. Il a également précisé que les petits éleveurs avaient été contraints d’arrêter leur activité au fil des ans, en raison de leurs faibles marges bénéficiaires. Il a également indiqué que plusieurs des vingt abattoirs casher pour volailles étaient situés à la frontière, notamment à Kiryat Shmona et à Shlomi, dans le nord, ainsi qu’à Sderot, dans le sud.
Environ 6 000 personnes sont liées à ce secteur d’activité, notamment dans les domaines de l’abattage, du transport et de la fourniture d’aliments pour poulets.
« Le ministère de l’Agriculture nous soutient », a déclaré Elkabetz.
« Il est clair que le secteur israélien s’effondrera si les importations de poulet ne sont pas limitées. »
« Il n’y a pas de pénurie de production de viande de poulet en Israël. L’industrie de la volaille constitue un pilier central de la sécurité nationale, à la fois en tant que source de volaille fraîche, de haute qualité et sûre pour le public et le marché institutionnel, et en tant qu’industrie stratégique qui fournit de nombreux emplois dans les zones périphériques et des infrastructures pour la capacité de production indépendante de l’État d’Israël », a déclaré le ministère de l’Agriculture dans un communiqué.
En revanche, le ministère des Finances a déclaré soutenir l’augmentation des importations de poulet congelé dans le cadre d’une initiative visant à réduire le coût de la vie. Il a toutefois ajouté que cela ne serait possible qu’avec des changements réglementaires de la part du ministère de l’Agriculture et du Grand Rabbinat.
Ce dernier aurait retardé l’octroi de la certification casher à une usine brésilienne et déclaré qu’il n’était pas nécessaire d’importer du poulet.
En juillet, Baladi a déposé un recours auprès de la Haute Cour, exigeant que le Grand Rabbinat applique les règles existantes pour l’abattage de la volaille à l’étranger ou publie des procédures alternatives.
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