Canicule et solitudes mortelles en Israël

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Canicule et solitudes mortelles en Israël

En Israël, l’organisation de secours ZAKA tire une sonnette d’alarme qui dérange : en l’espace d’un peu plus de deux semaines, ses équipes ont évacué 29 corps de personnes décédées seules à leur domicile. La plupart des victimes avaient plus de 65 ans, mais des adultes plus jeunes — entre 35 et 57 ans — figurent aussi parmi les morts. Les bénévoles décrivent des scènes d’une dureté rare : des dépouilles découvertes « en état de décomposition avancée », signe que la mort est survenue loin des regards, sans que quiconque ne s’en aperçoive à temps.

Ce pic tragique survient au cœur d’une canicule, dans un contexte où la vigilance collective semble s’être effritée. Des proches mobilisés en service de réserve, des familles parties en vacances, un climat d’anxiété sécuritaire : autant de facteurs qui, combinés, ont laissé certaines personnes âgées sans visites, sans appels, sans la main tendue la plus simple. Le constat est d’autant plus choquant que, depuis le 1er août, des corps sont retrouvés quasiment chaque jour aux quatre coins du pays : Eilat, Holon, Jérusalem, Tel-Aviv, Beersheva, Dimona, Bat Yam, Petah Tikva, Givat Shmuel, Ramat Gan, Givatayim, Ma’alot, Netanya et Kiryat Gat. Dans de nombreux cas, ce sont les voisins, alertés par des odeurs inhabituelles, qui préviennent les services d’urgence.

Pour les équipes aguerries de ZAKA, ces deux dernières semaines ont eu un goût d’insoutenable répétition. Un bénévole expérimenté parle d’un « phénomène insupportable et douloureux », où l’on comprend que l’isolement, plus que la chaleur seule, tue silencieusement. L’organisation met en cause non pas un individu, mais une défaillance d’ensemble : la chaîne de l’attention — famille, voisinage, syndics, services locaux — s’est rompue au plus mauvais moment.

Le porte-parole de ZAKA, Israel Hasid, pointe un angle mort de la société israélienne : la responsabilité envers les plus vulnérables. La séquence actuelle, explique-t-il, mêle tensions sécuritaires, préoccupations liées à la guerre et relâchement estival ; autant d’éléments qui « font oublier ceux qui nous sont les plus chers ». Chaque décès découvert tardivement devrait être lu comme un avertissement : l’indifférence a un coût humain immédiat.

Face à ce constat, les remèdes existent et ne relèvent pas uniquement de l’État. Ils sont simples, concrets, à la portée de tous. Un « coup à la porte » pour vérifier si tout va bien. Un appel quotidien convenu à l’avance. La création d’un petit réseau de vigilance par palier, où deux ou trois voisins se relaient pour jeter un œil. L’échange d’un double de clé avec une personne de confiance. L’affichage discret d’un numéro d’urgence chez les plus âgés. Autant de micro-gestes qui, cumulés, sauvent des vies — surtout lorsque la température grimpe et que la déshydratation peut faucher en quelques heures.

Les collectivités locales peuvent, elles aussi, renforcer cette veille : listes de contacts volontaires, signalements facilités via des applications municipales, visites ciblées lors d’alertes météo, coordination avec les associations et les services de santé. Les médecins traitants et aides à domicile, lorsqu’ils existent, constituent des capteurs précieux ; leur alerte rapide doit être encouragée et simplifiée. Mais la première ligne reste le voisinage : personne n’est mieux placé qu’un voisin pour remarquer des volets qui ne s’ouvrent plus, un courrier qui s’accumule, un silence anormal.

Au-delà de l’émotion, l’appel de ZAKA invite à une révision de nos réflexes. La chaleur reviendra, les inquiétudes nationales perdureront peut-être ; l’enjeu est d’ancrer des routines de solidarité qui ne dépendent ni des saisons ni de l’actualité. La dignité d’une société se mesure aussi à sa capacité à protéger ceux qui ne peuvent plus, seuls, se protéger. Prévenir l’isolement mortel n’exige pas des moyens extraordinaires : un peu d’attention, régulièrement, suffit souvent à faire la différence.

ZAKA l’assure : aucun être humain ne devrait s’éteindre sans que quelqu’un s’en aperçoive. À chacun, désormais, de transformer cet avertissement en actes du quotidien.

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