Bayrou a un long parcours de trahisons, et de positionnements opportunistes. Il s’est imposé par le chantage, mais çà lui coutera cher. Personne ne lui tendra la main pour le sauver. Ni le centre qu’il a trahi ni les LR, encore moins le RN. La possibilité qu’il pactise avec LFI n’arrangera rien. Après ce qui s’est passé vendredi dernier, Macron risque de lui faire payer son chantage.
Qui est Bayrou le traitre ?
«Je connais tout de son passé et de ses trahisons» : quand Simone Veil réglait ses comptes avec François Bayrou.
François Bayrou a succédé vendredi à Michel Barnier au poste de premier ministre. Durant sa longue carrière politique, l’ancien patron de l’UDF ne s’est pas fait que des amis, même au centre.
Suite au renversement de Michel Barnier par l’Assemblée nationale le 4 décembre dernier, François Bayrou lui a succédé. Nommé Premier ministre par Emmanuel Macron, le président du MoDem (et ancien membre de l’UDF, Union pour la Démocratie Française) s’est imposé, en près de quarante ans, comme l’une des figures majeures de la politique française. Pourtant, au fil de sa longue carrière, il ne s’est pas fait que des amis, même au sein du centre. En 2007, l’ancienne ministre de la Santé, Simone Veil, avait réglé ses comptes avec son confrère dans les colonnes du Monde.
Cette même année, environ un mois avant les élections présidentielles, celle qui soutenait le candidat Nicolas Sarkozy (du parti UMP) avait vivement critiqué son rival, qui briguait également Matignon. «Bayrou, c’est pire que tout», avait-elle déclaré. Figure respectée de la politique, notamment pour son combat en faveur des droits des femmes, elle dressait alors le portrait d’un homme qu’elle jugeait perfide et opportuniste. «Je connais tout de son passé et ses trahisons successives», avait-elle asséné, faisant référence au coup de fil de François Bayrou à Jacques Chirac au lendemain de sa qualification pour le premier tour de la présidentielle de 1995, devançant alors le président sortant Édouard Balladur. Simone Veil avait ainsi jugé «indécent de se précipiter de la sorte» pour soutenir le concurrent de celui qui l’avait pourtant nommée ministre de l’Éducation.
« Il a répondu qu’il s’en fichait »
Nommé à ce poste de 1993 à 1997, François Bayrou avait également annoncé lors de sa première année, un projet de réforme de la loi Falloux sur l’enseignement public. Le Figurant Etudiant explique qu’il était question de «déplafonner les subventions des collectivités locales au bénéfice des écoles privées» suscitant «un important mouvement de contestation dans l’enseignement public, avant d’être annulé par le Conseil constitutionnel». À cette période, Simone Veil l’avait ainsi confronté. «Il a répondu qu’il s’en fichait, qu’il voulait pouvoir mettre ses enfants dans le privé. Il a surtout mis un million de personnes dans la rue», avait-elle ajouté.
Enfin, la question du port du voile à l’école faisait débat dans les années 1990. Encore non tranchée juridiquement, François Bayrou, toujours ministre de l’Éducation nationale, avait publié en 1994 une circulaire visant à réglementer le port de signes religieux à l’école, en ciblant notamment le foulard islamique. Une initiative qui n’avait pas été du goût de Simone Veil, qui lui reprochait de ne pas avoir écouté ses conseils pour régler au mieux la situation. «Là non plus, il n’a rien voulu faire et il n’a rien réglé», expliquait-elle encore au Monde en 2007. À noter que la loi interdisant le port de signes religieux ostensibles dans les établissements publics sera finalement adoptée en 2004, mettant un terme à ces débats.
« Ils sont complètement fous à l’Élysée, ça va péter » : l’incroyable matinée où Bayrou a fait plier Macron
Alors que le président aurait préféré un autre Premier ministre, le maire de Pau s’est « imposé » à Matignon. Sous menace de voir son camp se réduire comme peau de chagrin, le chef de l’État s’est résolu à nommer son allié historique.
Depuis combien de temps en rêve-t-il ? Des lustres. À peine nommé Premier ministre, François Bayrou rappelle que sa route vers Matignon fut « un long chemin ». Faut-il y voir son empressement à savourer le moment. Sans même attendre la passation de pouvoir avec Michel Barnier, le président du MoDem assure face aux micros et caméras qu’il est possible de « réunir les gens et non les diviser ».
Ce disant, il cite un président et pas celui attendu. Le chef du MoDem n’a pas un mot pour Emmanuel Macron, mais compare ce jour au 10 mai 1981 de François Mitterrand. Et de citer une phrase prêtée à l’ex-président socialiste, « enfin, les ennuis commencent ». Pour François Bayrou. Comme pour Emmanuel Macron… Après des jours de tergiversations et au terme d’une matinée sous très, très, haute tension, « le chemin » du maire de Pau vers la rue de Varenne a pris le tour d’un passage en force.
8h30, ce vendredi matin. François Bayrou arrive à l’Élysée, à l’invitation d’Emmanuel Macron. Lorsque sa voiture passe l’imposant porche, le maire de Pau ne sait pas s’il vient pour être nommé ou éconduit. Mais ces dernières heures, ses soutiens sont de plus en plus pessimistes. À observer la valse-hésitation du chef de l’État jeudi — c’est alors l’hypothèse Roland Lescure qui montait en flèche, provoquant une levée de boucliers à droite et chez une partie de Renaissance — Bayrou était déjà lui-même « furieux », selon plusieurs témoins. « Il a l’impression qu’on se fout de sa gueule », indique alors l’un d’entre eux. Et ce sentiment est décuplé en ce vendredi matin, ses partisans pressentant (à juste titre) que Sébastien Lecornu est l’option envisagée.
« Le rendez-vous a tourné à l’humiliation pour Bayrou »
Sans jamais citer le nom du ministre des Armées, ni dévoiler son jeu, face au centriste, le président dresse son portrait-robot. Quelle orientation politique ? Un nouveau chef du gouvernement, mais pour quoi faire ? François Bayrou dit comment il voit les choses, la situation. « C’était viril mais correct », rapporte un témoin aux premières loges.
Problème, au cours de cet échange d’1h45, le maire de Pau comprend que l’heureux élu sera Sébastien Lecornu, ex-LR honni au MoDem. « Je suis venu avec vous pour faire de grandes choses, pas des petites », rétorque-t-il, amer, au chef de l’État. Dans une colère froide, il annonce prendre acte de leur rupture. « Je vous rappelle », promet le président. Il est 10h15, le patron du MoDem quitte l’Élysée irrité, avec le sentiment que ce ne sera pas lui.
« Le rendez-vous ce matin a tourné à l’humiliation pour Bayrou, raconte une source au fait des tractations de la matinée. Le président était vraiment dans l’optique de ne pas le nommer. C’est parti très violemment entre les deux. François était en mode : Retiens-moi ou je fais un malheur. Il a menacé de faire exploser la majorité si ce n’était pas lui. »
Les esprits s’échauffent
Dans les couloirs du pouvoir, les esprits sont en ébullition. « Il aurait nommé Bayrou en 48 heures la semaine dernière, cela n’aurait été un drame pour personne. Là, il a quand même mis tout le système en hypertension », soupire l’un de ses proches. Folle matinée, qui s’écoule sur des montagnes russes. Le président échange, encore une fois, avec Roland Lescure, sans jamais lui faire de proposition formelle.
À cette heure, François Bayrou ne donne plus de nouvelles aux siens. Lesquels en déduisent alors que les nouvelles étaient mauvaises. « Ils sont complètement fous à l’Élysée, ça va péter entre eux et nous. Il y a vraiment un sujet de confiance », s’échauffe alors un élu MoDem. Manière de sous-entendre que le groupe des 36 députés MoDem pourrait aussi sortir du « socle commun » et rendre la vie impossible à Emmanuel Macron.
Chez François Bayrou, le sentiment d’humiliation est d’autant plus fort qu’il s’est toujours considéré comme le « faiseur » d’Emmanuel Macron. Celui qui s’est retiré de la campagne présidentielle en 2017 au profit du jeune candidat. En somme, c’est grâce à lui. « J’avais défriché le terrain, arraché les vieilles souches, préparé la terre, planté et taillé la vigne… et au moment de la vendange, voilà ce jeune homme qui arrive », répétait-il lors du précédent quinquennat du chef de l’État à la plus grande exaspération des marcheurs de la première heure.
Bayrou revient à l’Élysée à 11h30
Quel contraste avec la confiance et la joie affichées, les jours précédents, dans le camp du centriste. « Je suis le plus grand dénominateur pour discuter avec la gauche et avec la droite », avait estimé Bayrou lui-même cette semaine, devant des parlementaires. Lucide, aussi, sur les réserves du chef de l’État, dont l’entourage confiait ces jours-ci chercher « un animateur »… Comprendre, une personnalité plus effacée, dont le rôle aurait plutôt été de mettre de l’huile dans les rouages d’un gouvernement composé de fortes personnalités.
« Il ne me nommera jamais, si ce n’est pas dans des circonstances exceptionnelles », devisait le maire de Pau devant des proches, il y a six mois. C’est désormais la douche froide. « La situation est tellement folle… » lâche l’un de ses soutiens, écœuré.
Nul ne le sait alors, mais au milieu de la matinée se joue un spectaculaire retournement de situation. Emmanuel Macron rappelle François Bayrou pour lui dire de revenir au Palais à 11h30. Cette fois, l’entretien est nettement moins électrique. Et pour cause. Le président nomme son premier allié chef du gouvernement. « Il s’est imposé comme la personnalité la plus consensuelle et rassembleuse », explique-t-on après coup à l’Élysée.
Les mots ne sont pas choisis au hasard : François Bayrou s’est donc « imposé ». Aux forceps, face à la levée de boucliers de Nicolas Sarkozy et d’une partie de la droite, face aux herses dressées par les socialistes. Et face aux réticences du président, donc. De fait, tous ont en tête les récurrentes ruades du centriste, notamment contre la récente réforme des retraites. « Je pense que Macron n’arrive pas à se résoudre à nommer Bayrou, qui a du caractère », souriait d’ailleurs un fin connaisseur des arcanes du pouvoir jeudi.
Mais François Bayrou se retrouve donc là sur le perron de Matignon, à la nuit tombée, en fin d’après-midi ce vendredi. Alors que Michel Barnier lui passe le relais, le centriste promet de « faire court ». Il prend finalement son temps. Face à toute la famille MoDem massée dans un froid glacial, il dit « ne rien ignorer de l’Himalaya » qui l’attend. Durant les quinze minutes de monologue, il ne remercie pas le président. Un oubli ? Il ne semble pas, en tout cas, avoir inscrit « saluer Macron » sur sa petite fiche qu’il tient dans sa main glacée.
Cette folle matinée aura à coup sûr laissé des traces entre le président et son nouveau Premier ministre. « La thèse Macron cède au chantage, je n’y crois pas. Le président, plus vous essayez de l’acculer, plus il vous fait un bras d’honneur. Et si Bayrou est emporté, il reste respectueux des institutions », contre un intime du chef de l’État. Mais tout de même. Un autre alerte : « C’est dangereux pour Macron. L’entrée en matière de Bayrou, c’est quand même celle d’un homme qui n’était visiblement pas le choix naturel du président. »
Bayrou paiera chèrement ce chantage et toutes ses trahisons.
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Apocalypse 3:16 Ainsi, parce que tu es tiède, et que tu n’es ni froid ni bouillant, je te vomirai de ma bouche.
LE CENTRE n’est QUElke point de friction de ce qui tourne autour de lui, fixe et poly-invalent et inopérant