Dans la vie, il y a les secrets les mieux gardés au monde, comme la recette du Coca-Cola, il y a ceux qui le sont moins et, à côté, à un niveau encore bien supérieur, il y a le Ballon d’or, où le suspense est à peu près aussi insoutenable que l’issue de votre match de ping-pong avec mémé du Gers. Pourtant, cette année, France Football avait tout fait pour que l’identité du vainqueur ne fuite pas avant le début de la cérémonie.
Le grand gagnant lui-même, et ce pour la toute première de l’histoire de ce trophée, n’était pas au courant de sa victoire à venir. Le but étant d’éviter de se retrouver avec le vainqueur, au premier rang du Théâtre du Châtelet, entouré comme un chef d’Etat en visite diplomatique, et les perdants, seuls comme la solitude et tirant une tronche de quinze mètres de long. Et encore, quand ils daignaient se pointer à la cérémonie.
Malheureusement pour les organisateurs, les précautions n’ont pas suffi et, à mesure que la journée avançait, une rumeur a enflé : annoncé comme le grand favori de ce Ballon d’or 2024, Vinicius allait se voir coiffer au poteau par le Citizen Rodri. Furieux de voir son poulain doublé dans la dernière ligne droite, le Real, qui est réputé pour exercer un lobbying de forcené chaque année pour ses joueurs, a choisi de transformer ce qui n’était alors qu’un couac en véritable scandale, en annulant purement et simplement le voyage de sa délégation à Paris.
Une gêne palpable au théâtre du Châtelet
Nos confrères de L’Equipe et leurs consultants ont bien tenté de faire comme si de rien n’était, voir le plus grand club du monde boycotter une cérémonie qu’il a l’habitude d’animer, alors même que son buteur est pressenti pour l’emporter, ça la fout mal. « Ce n’est pas bon pour le football qu’une entité comme le Real Madrid ne soit pas présente à un gala de cette dimension », soulignait, gêné, Luis de la Fuente, le sélectionneur espagnol champion d’Europe en titre.
Dans la foulée, pour ne rien arranger, le Real décidait carrément de partir en guerre, sabre au clair, contre le Ballon d’or, à travers un communiqué muy caliente. « Si les critères d’attribution ne désignent pas Vinicius comme vainqueur, ces mêmes critères devraient désigner Carvajal comme vainqueur. Comme cela n’a pas été le cas, il est évident que le Ballon d’Or de l’UEFA ne respecte pas le Real Madrid. Et le Real Madrid n’est pas là où il n’est pas respecté », a déclaré sans exagération aucune le club vainqueur de la Ligue de champions en 2024.
Rappelons tout de même que les organisateurs du Ballon d’or n’ont aucunement la main sur l’élection et que ce sont cent journalistes de cent pays différents qui élisent les vainqueurs parmi une liste de nominés. On voit difficilement ce que tonton Florentino et sa cour peuvent bien avoir à reprocher à France Football et l’UEFA. Qu’importe finalement, le principal étant que le vestiaire tout entier suive la route tracée par son président, ce qui semble avoir été le cas à la lecture des tweets de plusieurs joueurs madrilènes, comme Eduardo Camavinga.
Pendant la cérémonie, la gêne était palpable au moment d’attribuer le trophée du meilleur coach de l’année, attribué à un certain… Carlo Ancelotti. « Quelle déception de ne pas l’avoir avec nous », évacuait rapidement Didier Drogba, le maître de cérémonie à peine gêné aux entournures dans son costard de garçon de café. Restait encore à savoir si les prémonitions du Real allaient se réaliser. Imaginez deux minutes la tête de l’auditoir si le nom de Vinicius était finalement sorti du chapeau.
La classe de Rodri éclipse le caca nerveux du Real
Mais sans surprise, ce fut bien Rodrigo l’heureux élu. On ne pourra pas reprocher aux votants d’avoir déjoué les pronostics et remis dans ce trophée un peu de romantisme à l’ancienne, en hommage à une époque où l’on ne sacrait pas exclusivement des buteurs à 250 pions par saison. Quant à savoir si Carvajal, vainqueur de la Ligue des champions avec le Real et champion d’Europe avec la Roja, méritait lui aussi de l’emporter, le débat est ouvert. Rodri n’a d’ailleurs pas hésité à rendre hommage à son coéquipier en sélection, resté à Madrid à cause de sa « blessure » (mais bien sûr).
« J’ai reçu des messages d’amis qui m’ont dit que ‘c’est le foot qui a gagné’. Merci à tous ces milieux de terrains, à Xavi, à Iniesta. Nous sommes souvent éclipsés par des joueurs d’autres postes, mais ce soir nous sommes en pleine lumière », a-t-il joliment déclaré. Une classe que n’aura donc pas eue le Real Madrid qui, en choisissant la bouderie dans ce qu’elle a de plus pathétique, a montré qu’on pouvait être un grand club avec des petites manières.
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