Qatargate ; Quand l’influence étrangère s’installe
Depuis la guerre déclenchée le 7 octobre 2023, la question de la vulnérabilité intérieure d’Israël ne se limite plus aux menaces militaires. Deux dynamiques, distinctes mais inquiétantes, se superposent : d’un côté, l’affaire dite du « Qatargate », qui met en cause des liens présumés entre des proches du pouvoir et des intérêts qataris ; de l’autre, une hausse des tentatives de recrutement d’Israéliens par l’Iran à des fins d’espionnage. Le point commun, selon plusieurs observateurs sécuritaires, est le risque de banaliser la trahison et d’éroder les réflexes de protection nationale.
Le scandale baptisé « Qatargate » a explosé lorsque des médias israéliens ont évoqué une enquête visant des figures gravitant autour du bureau du Premier ministre. L’accusation centrale : des intermédiaires liés au Qatar auraient cherché à influencer le récit public en Israël, y compris sur des sujets ultra-sensibles comme les négociations d’otages, les rapports avec l’Égypte ou la perception de Doha sur la scène internationale. Dans ce dossier, des noms reviennent régulièrement : conseillers, communicants, personnes ayant eu accès à des circuits d’information ou à des espaces de décision.
La portée politique d’une telle affaire est évidente. D’abord parce que le Qatar, acteur régional influent, joue un rôle ambigu au Moyen-Orient : médiateur sur certains fronts, soutien sur d’autres, et objet de critiques persistantes en Israël à propos de l’argent ayant transité vers Gaza avant le 7 octobre. Ensuite parce que l’épisode touche à un sanctuaire : la chaîne de confiance au sommet de l’État. Lorsque l’opinion a le sentiment que des proches du pouvoir ont pu travailler, volontairement ou non, pour un intérêt étranger, la question ne se limite pas à la justice ; elle devient une question de sécurité nationale, de filtrage des habilitations, et de contrôle des fuites.
L’un des angles les plus explosifs concerne la diffusion d’informations, vraies ou fausses, pouvant fragiliser la relation avec l’Égypte. Le traité de paix israélo-égyptien demeure un atout stratégique majeur, et toute campagne visant à dépeindre Le Caire comme acteur hostile – si elle s’avérait manipulée – aurait un coût diplomatique direct. À ce stade, le débat se joue autant sur les preuves que sur la responsabilité : qui a autorisé quoi, qui a eu accès à quels canaux, et comment l’appareil de sécurité a-t-il pu laisser passer des opérations d’influence présumées au cœur même du pouvoir ?
En parallèle, le contre-espionnage israélien fait face à une autre réalité : des tentatives iraniennes de recruter des citoyens israéliens se multiplient. Les schémas décrits par la presse et des spécialistes reposent souvent sur des approches « à grande échelle » via messageries, promesses d’argent, missions d’abord anodines (photos de sites, repérages), puis escalade vers des demandes plus graves. Le phénomène surprend par sa diversité sociologique : il ne se limite pas à un profil marginal, mais touche différents milieux, âges et niveaux de revenu. Le moteur semble fréquemment financier, parfois accompagné de chantage ou de manipulation.
Ces deux affaires ne sont pas identiques : l’une concerne une influence étrangère soupçonnée au niveau politique et médiatique, l’autre un recrutement clandestin par un adversaire stratégique. Mais elles produisent le même danger : la normalisation de l’idée qu’on peut « jouer » avec des puissances étrangères sans conséquence. Or, dans une période de guerre ou de tension extrême, cette perception est toxique. Elle affaiblit la dissuasion intérieure, met sous pression les services, et pousse la société à douter de ses propres garde-fous.
La réponse attendue n’est pas seulement judiciaire : elle est institutionnelle. Renforcement des procédures d’habilitation, traçabilité des contacts et financements, contrôle des fuites, pédagogie publique sur les zones rouges, et sanctions nettes lorsqu’une ligne est franchie. Car une sécurité robuste commence souvent par une règle simple : au sommet comme à la base, la loyauté envers l’État ne doit jamais être négociable.
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