Quand le monde des affaires côtoie la géopolitique, un voile de suspicions se jette sur les réels intérêts des parties. C’est exactement ce qui est en train de se passer entre les Etats-Unis et la Russie. Donald Trump a envoyé son émissaire Steve Witkoff à Moscou ce mardi pour négocier directement avec Vladimir Poutine d’une solution pour mettre fin à la guerre en Ukraine.
Pourtant, Steve « Witkoff n’est absolument pas un diplomate, il n’a aucune formation pour cela. C’est un business man », rappelle Corentin Sellier, historien spécialiste des Etats-Unis et chroniqueur Les Jours, dans l’émission « C dans l’air » du 29 novembre. Et pas n’importe quel business man.
Steve Witkoff et le président des Etats-Unis sont « associés, partenaires en affaires, en particulier dans ce qui rapporte le plus d’argent à [Donald] Trump en ce moment, les cryptomonnaies. Witkoff c’est l’associé des Trump père et fils » dans ce secteur, développe le spécialiste des Etats-Unis.
« Profond respect pour le président Poutine »
Alors pourquoi avoir choisi Steve Witkoff pour négocier sur un dossier qu’il ne connaît pas bien ? La réponse peut être simple mais pas plus rassurante. Depuis le 25 novembre dernier et la publication par Bloomberg de l’intégralité d’une conversation entre l’émissaire américain et le conseiller diplomatique de Vladimir Poutine, Iouri Ouchakov, une bienveillance évidente a été mise en avant entre les deux hommes. « J’ai le plus profond respect pour le président Poutine », a notamment déclaré l’Américain lors de cet échange sur le dossier ukrainien. Sans qu’une seule fois le rôle d’agresseur de la Russie ne soit rappelé.
Un autre appel a également fuité dans la presse. L’échange entre Iouri Ouchakov et un émissaire du Kremlin pour les questions économiques, Kirill Dmitriev, mettait en évidence le rôle des Russes dans le plan de paix proposé par les Etats-Unis quelques jours plus tard, et largement favorable à Moscou.
Même dans le camp républicain du président, la position de Steve Witkoff a surpris. « Pour ceux qui s’opposent à l’invasion russe et veulent que l’Ukraine l’emporte en pays démocratique et souverain, il est clair que Witkoff favorise entièrement les Russes. On ne peut lui faire confiance pour conduire ces négociations. Est-ce qu’un agent payé par les Russes ferait moins que lui ? Il devrait être renvoyé », s’est emporté Don Bacon, représentant républicain du Nebraska à la Chambre, sur le réseau X.
Des intérêts personnels en Russie ?
Pour qui roule réellement Steve Witkoff ? « Ce qu’on apprend dans cette bande ce n’est pas simplement qu’il se fait rouler, c’est qu’il roule pour les Russes, répond alors Corentin Sellin. Ça pose vraiment une question : est-ce que monsieur Witkoff a des intérêts d’affaires avec la Russie, et en particulier sur les cryptomonnaies ? Quels sont les liens anciens de monsieur Witkoff avec la Russie ? ». Si elles ont été minimisées par la Maison Blanche et Donald Trump en personne, ces révélations mettent en évidence une connivence pour le moins gênante entre le représentant de Trump et le président russe, déjà visible lors de leurs rencontres précédentes.
En avril dernier, une longue réunion de 4h30 avait concerné les deux hommes à Saint-Pétersbourg, et la télévision russe ne s’était pas embarrassée au moment de montrer Witkoff en train de porter la main sur son cœur l’air admiratif, avant de la tendre chaleureusement à Vladimir Poutine. Une mise en scène qui avait déjà inquiété sur la force de persuasion du négociateur américain auprès de la Russie.
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De plus, cet homme d’affaires est accompagné en Russie du gendre du président américain, Jared Kushner le même qui était déjà parvenu à conclure les accords d’Abraham lors du premier mandat Trump, réconciliant Israël et les Emirats arabes unis, le Bahreïn, puis le Maroc et le Soudan. Une victoire diplomatique qui lui a au passage ouvert des possibilités financières et notamment un investissement de 10 % dans une firme israélienne d’investissement, Phoenix Holdings, dont il dit avoir multiplié la mise. Désormais, sa fortune est estimée par le magazine Forbes à 1 milliard de dollars (dont la moitié héritée de son père), rapporte Le Monde.
Ce n’est pas la première fois que le clan Trump est accusé de prioriser ses intérêts financiers dans le règlement de conflits. A Gaza, déjà, le président américain a l’ambition d’en faire une « Riviera » du Moyen-Orient en y construisant un nouvel empire immobilier.
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