Soyons clairs : la France vit aujourd’hui son premier boycott d’artistes en raison de leur appartenance religieuse ou ethnique depuis le régime de Pétain.
Rien d’officiel — les nouveaux collabos préfèrent les formes feutrées — mais un boycott réel, corrosif, rampant, organisé par omission, par prudence, par lâcheté souriante.
On ne dit plus « On ne veut pas de Juifs ».
On dit « Ce n’est pas le moment” » « Le climat est tendu », « On préfère reporter« .
L’effet, lui, est parfaitement clair : des artistes juifs écartés, déprogrammés, sanctionnés pour leur identité.
Ainsi, des appels au boycott ont visé Amir — chanteur aimé, populaire, inoffensif — comme si sa seule naissance constituait un acte politique.
Et qui s’est levé en France pour dire « non » à cette infamie ?
Une poignée.
Une poignée seulement.
Il y eut Arthur,
il y eut Philippe Lellouche,
il y eut Élie Semoun,
il y eut Élie Chouraqui,
il y eut quelques autres, dignes mais isolés.
Ils ont parlé, eux. Ils ont dénoncé l’absurdité du boycott, rappelant que les artistes juifs ne sont pas des délinquants ethniques.
Et parmi les artistes non juifs installés, Sheila — seule, mais debout — a eu ce courage élémentaire : refuser qu’un chanteur soit jugé sur son identité.
Au-delà de ces Justes… plus rien.
Pas de Collectif.
Pas de Tribune.
Pas de Texte commun.
La France culturelle, si généreuse en proclamations lorsqu’il s’agit de « défendre l’humanité », s’est dissoute dans le silence.
Juliette Binoche — muette.
Biolay — volatilisé.
Agnès Jaoui — silencieuse.
Oui, Agnès Jaoui, qui jadis, en 2002, signait dans Le Monde avec Jean-Pierre Bacri un texte intitulé « Nous ne pouvons pas rester silencieux » au moment précis où les attentats-suicides pleuvaient sur Israël, explosant dans des mariages, des cafés, des bus, des restaurants, des fêtes familiales, faisant des dizaines de morts civils innocents.
À l’époque, elle trouvait sa voix pour condamner Israël au moment même où les Israéliens ramassaient leurs morts par dizaines dans des salles de fête éventrées.
Aujourd’hui, quand ce n’est plus Israël qu’il faut pointer du doigt, mais un boycott anti-juif en France,
elle ne peut plus « rester silencieuse« .
Or Elle se tait.
Nagui — soudain aveugle.
Mathieu Pigasse — introuvable.
Et où sont passés les traqueurs de fachos, ces héros de carton qui voient des nazis dès qu’un type a une mauvaise coupe de cheveux ?
Évanouis.
Ceux qui traquent le fascisme imaginaire n’ont rien vu du fascisme réel.
Leur radar moral ne fonctionne que lorsqu’il ne s’agit pas de Juifs.
Et que dire du pouvoir politique ?
Dans tout le gouvernement, une seule voix : Rachida Dati, disant simplement : « Trop, c’est trop ».
Elle seule a rappelé que la France n’a pas vocation à devenir un pays où l’on intimide des artistes en fonction de leur identité.
Mais où est le Premier ministre ?
Où est le Président de la République, si prompt à condamner la moindre injustice cosmétique ?
Rien.
Silence méticuleux.
Absence totale.
Quant aux dirigeants des partis de gauche — mieux vaut ne pas s’attarder.
On n’attend plus rien de ceux qui voient dans chaque jihadiste un « dominé »,
et dans chaque Juif menacé un sujet trop « sensible » pour risquer un tweet.
Pendant ce temps, en Allemagne, les artistes non juifs se lèvent :
Grönemeyer, Maffay, Sarah Connor, Die Ärzte, Die Toten Hosen.
Ils disent : « Pas d’antisémitisme ici ».
Et ils le disent sur scène, devant des milliers de personnes, pas dans un murmure.
L’Histoire adore ses renversements :
en 2025, ce sont les artistes allemands qui défendent les Juifs,
et ce sont les artistes français qui se taisent.
Depuis Pétain, jamais la France n’avait connu cela :
un boycott ethnique déguisé en arbitrage artistique,
un boycott religieux maquillé en prudence,
un boycott anti-juif enveloppé dans la neutralité.
Le silence n’est pas une absence.
C’est une complicité.
Et la lâcheté culturelle reste, quoi qu’on en dise,
une forme d’antisémitisme.
© Paul Germon
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