Zombies Mania : Pourquoi on adore autant voir les zombies dans les séries ou les films ?

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L’entendez-vous, le râle macabre des zombies qui s’apprêtent à vous déchirer les chairs ? L’image de la masse de morts-vivants poursuivant de manière désarticulée de pauvres humains continue à avoir du succès que ce soit au cinéma, comme dans la comédie Zombie Plane, sortie le 13 novembre, ou dans les séries, avec quatre spin-off de The Walking Dead en trois ans. Ou encore les héros Marvel, qui dans un univers réinventé, luttent contre une invasion zombie dans Marvel Zombies, une mini-série d’animation diffusée sur Disney+ cet automne.

Mais qu’a de si attachant pour les scénaristes cette figure pourtant repoussante ? Que dit-elle de nos imaginaires ? « C’est un être qui est un oxymore sur pattes, à la fois mort et vivant, souligne Clémentine Hougue, chercheuse associée en littérature à l’université du Mans, et spécialisée sur les représentations politiques en science-fiction, et notamment sur la figure du zombie. Cela apporte un questionnement métaphysique et permet des développements narratifs. »

A la fois tragique, comme le moment où un des personnages principaux, auquel on s’est attaché, se transforme en zombie. Ou qui crée « des ressorts narratifs autour du pouvoir d’agir des personnages », poursuit-elle, car le zombie reste « gérable », on peut le tuer d’une balle dans la tête, contrairement à d’autres catastrophes.

Des « récits d’itinérance » et de survie

Cela donne à voir des « récits d’itinérance », complète Fleur Hopkins-Loféron, historienne, spécialiste des imaginaires scientifiques, les personnages ne restant pas longtemps au même endroit. Et crée aussi un ennemi, et « surtout un ennemi qui est tout un chacun, ajoute-t-elle. Les films de zombies sont, à mon avis, des réécritures des Robinsonnades, en référence au Robinson Crusoé de Daniel Defoe, et donc de récits de survie ». Cette figure permet de penser différentes modalités de société lorsque la civilisation s’effondre, « en envisageant le temps d’après, et en interrogeant la manière dont les humains vont essayer ou pas de se réorganiser » souligne Clémentine Hougue.

Et c’est pourquoi le genre post-apocalyptique est particulièrement propice à l’apparition du zombie. Il vient structurer des récits partant de pandémies (The Last of Us, The Walking Dead, Resident Evil), de catastrophes industrielles, etc. Le zombie représente souvent quelque chose que les humains ont détraqué. Mais la raison de sa tonitruante arrivée est effleurée, ce n’est pas le sujet de l’intrigue. Sait-on comment et pourquoi le cordyceps a muté dans The Last of Us ? Non. Pareil pour le film fondateur La nuit des morts-vivants de Romero en 1968 qui a légué l’image du zombie telle qu’on la connaît.

« Au XXIe siècle, la figure du zombie va s’inscrire dans le post-apocalyptique au sens où les humains auraient une part de responsabilité dans la catastrophe, ce qui est symptomatique des discours sur notre responsabilité collective dans l’avenir à l’échelle planétaire », analyse Clémentine Hougue. Comme une métaphore du changement climatique ? A voir.

Et si les monstres, c’était nous ?

Le zombie dit aussi quelque chose de nous pour l’historienne Fleur Hopkins-Loféron. « Cela pose la question de notre propre monstruosité, explique-t-elle. C’est vraiment une thématique contemporaine qui ne cesse de réapparaître dans les œuvres de fiction. » Et qui soulève une multitude de questions pour les personnages : Sont-ils si différents du zombie ? Ne suis-je pas aussi un monstre quand je préfère abattre un compagnon plutôt que le laisser se transformer ? Qu’est-ce que je suis devenu au fond ?

« L’ennemi, ce n’est pas forcément celui que l’on croit, poursuit-elle. En fin de compte, le zombie nous mange parce qu’il n’a pas le choix et on l’oppose souvent à des figures d’humains bien réelles qui, eux, ont basculé du côté de la monstruosité parce qu’ils réduisent en esclavage, qu’ils violent, qu’ils cannibalisent. » Plus que le zombie, les récits montrent la menace que représente l’humain pour lui-même.

Un discours politique souvent assumé

« Certains cinéastes comme Romero vont justement montrer que ce n’est pas parce qu’on s’enferme qu’on ne va pas s’entretuer à l’intérieur, la menace est essentiellement humaine », abonde Clémentine Hougue. Le zombie peut aussi faire émerger une critique de notre société et montrer d’autres modèles. Dans The Last of Us, la communauté de Jackson, où trouvent refuge Ellie et Joël, assume une certaine horizontalité, réunit des conseils pour adopter des décisions, met en commun les biens. Romero a fait de cette figure une critique de la société de consommation.

Mais il n’y a pas un discours politique univoque, associé à des idées de gauche ou de droite, auquel on pourrait rattacher les zombies. En se protégeant avec des barrières, en s’enfermant, des fictions ont pu plutôt développer l’idée d’un ennemi intérieur ou glorifier une certaine forme de patriotisme ou de protectionnisme, comme The Walking Dead, populaire chez les trumpistes, ou Dawn of the Dead.

Un zombie de plus en plus humain ?

Cependant, le zombie ne mute pas toujours en objet politisé. « Le fait que les zombies auraient une fonction critique sur le monde contemporain reste assez variable selon les formats et les séries », note Clémentine Hougue. Elle cite ainsi les onze saisons de The Walking Dead : « Plus la série est longue, plus elle va avoir tendance à dépolitiser, argumente-t-elle. Et pour résumer, The Waking Dead, c’est un groupe qui échoue systématiquement à refaire société. »

Parfois aussi, les zombies deviennent plus humanoïdes, développent une intelligence. « La réhumanisation du zombie pose la question de l’intégration du différent dans la société, souligne Clémentine Hougue, avec une altérité assez radicale qu’on a pu voir dans la série Z Nation ou avec le personnage de Bub dans une des suites de Romero, Le jour des morts-vivants. Ces fictions ne considèrent pas la catastrophe comme un temps figé, mais dans un temps long qui permet une évolution. » Et c’est ce qui fait l’intérêt et le succès du zombie, on ne sait jamais à quelle sauce on va être mangé.

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