100 000 $ pour antisémitisme sur des enfants
Une décision de justice sanctionne une école de Virginie pour discrimination
La Nysmith School for the Gifted, établissement privé réputé du nord de la Virginie, vient de conclure un accord avec le bureau du procureur général de l’État, acceptant de verser environ 100 000 dollars d’indemnisation à une famille juive. Cette sanction fait suite à l’expulsion de trois enfants après que leurs parents eurent signalé des incidents de harcèlement antisémite dont ils étaient victimes. L’affaire remonte à mars dernier, seulement deux jours après qu’une réunion eut été organisée entre les parents et la direction de l’école pour dénoncer ces comportements discriminatoires.
Les événements ayant conduit à cette expulsion illustrent une atmosphère hostile qui s’était développée dans cet établissement considéré comme l’une des meilleures écoles élémentaires privées des États-Unis, avec des frais de scolarité dépassant 46 000 dollars par an. Dès octobre de l’année précédente, des signes inquiétants étaient apparus lorsque des élèves avaient présenté en classe d’histoire un dessin représentant Adolf Hitler comme exemple de dirigeant historique fort. À l’époque, les parents avaient préféré ne pas porter plainte, pensant qu’il s’agissait d’un incident isolé.
Cependant, la situation s’est aggravée au fil des mois. Une fillette de sixième année, scolarisée dans cet établissement avec ses deux frères, a subi des attaques verbales répétées de la part de camarades de classe. Les enfants l’interpellaient de façon péjorative en la qualifiant d’Israélienne et l’accusaient, elle et les autres Juifs, d’être des tueurs de bébés. Les harceleurs sont allés jusqu’à se moquer du décès d’un membre de sa famille, prétendant être contents que cette personne soit morte lors des attentats du 7 octobre, alors qu’elle était en réalité décédée plusieurs années auparavant. Des autocollants pro-palestiniens avaient été apposés sur les ordinateurs et les casiers de l’école, servant de prétexte à de nouvelles provocations.
Face à l’ampleur du harcèlement, les parents ont finalement rencontré le directeur de l’établissement, Kenneth Nysmith, en février dernier pour lui demander d’intervenir. La réponse de l’école a été surprenante et dévastatrice : quarante-huit heures plus tard, les trois enfants de la famille recevaient une notification d’expulsion, sans explication claire sur les raisons de cette décision brutale. Les parents et leurs enfants, âgés de huit et douze ans, se sont retrouvés dans l’incompréhension totale, se demandant ce qu’ils avaient pu faire de mal.
Cette affaire s’inscrit dans un contexte plus large de montée de l’antisémitisme dans les établissements scolaires américains. L’Anti-Defamation League a recensé plus de 9354 incidents antisémites aux États-Unis en 2024, soit plus de 25 cas par jour, incluant des agressions physiques, du vandalisme et du harcèlement. Les campus universitaires ont connu une augmentation particulièrement préoccupante avec 1694 incidents, soit une hausse de 84% par rapport à l’année précédente. Dans les écoles primaires et secondaires, 1162 incidents ont été signalés en 2023, représentant une augmentation de 135% par rapport à l’année précédente.
L’accord conclu entre l’école et le procureur général de Virginie, Jason Miyares, va au-delà d’une simple compensation financière. L’établissement s’est engagé à publier une déclaration officielle condamnant toute forme de violence fondée sur la race ou la religion. Un comité spécialisé sera créé pour examiner les plaintes de nature similaire, et l’école devra adopter la définition de l’antisémitisme établie par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste. Cette définition reconnaît notamment que certaines manifestations d’antisionisme peuvent constituer des expressions d’antisémitisme.
Par ailleurs, un superviseur externe sera nommé pour contrôler les travaux de ce comité et s’assurer de la mise en œuvre effective des mesures correctives. Le personnel de l’école devra suivre des formations annuelles obligatoires sur l’antisémitisme afin de mieux identifier et prévenir de tels comportements à l’avenir. Kenneth L. Marcus, président du Brandeis Center for Human Rights Under Law qui a représenté la famille, a qualifié les mesures prises par l’école d’honteuses, soulignant que l’administration avait envoyé un message clair selon lequel les intimidations sont tolérées tant qu’elles visent des familles juives.
Le procureur général Jason Miyares a insisté sur le fait qu’aucun enfant ne devrait se sentir menacé ou indésirable dans une salle de classe en Virginie, et qu’aucun parent ne devrait craindre des représailles pour avoir défendu son enfant. Cette affaire soulève des questions fondamentales sur la responsabilité des établissements privés dans la protection de tous leurs élèves contre la discrimination et le harcèlement, indépendamment de leur origine religieuse ou ethnique. Elle rappelle également l’importance d’une vigilance constante face à la banalisation de comportements antisémites, particulièrement dans les environnements éducatifs où les jeunes esprits se forment.
L’ampleur du phénomène aux États-Unis interpelle. Une enquête menée auprès de jeunes Américains juifs révèle que 83% d’entre eux ont été témoins ou victimes d’antisémitisme depuis octobre 2023. Plus inquiétant encore, 56% des Juifs américains déclarent avoir modifié leur comportement quotidien par crainte pour leur sécurité, une proportion en forte augmentation par rapport aux années précédentes. Dans les établissements scolaires, nombreux sont les élèves juifs qui adoptent des stratégies d’invisibilité, dissimulant leur origine ou leur religion, tandis que d’autres quittent leur établissement par peur pour leur sécurité.
Cette décision de justice pourrait établir un précédent important pour d’autres familles confrontées à des situations similaires dans des établissements privés à travers le pays. Elle démontre que les écoles privées, bien qu’autonomes dans leur gestion, restent soumises aux lois contre la discrimination et peuvent être tenues responsables lorsqu’elles échouent à protéger leurs élèves ou, pire encore, lorsqu’elles sanctionnent les victimes plutôt que les harceleurs. La lutte contre l’antisémitisme en milieu scolaire nécessite une mobilisation collective de tous les acteurs éducatifs pour garantir un environnement d’apprentissage sûr et respectueux pour tous les enfants.
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