À Marseille, dans les coulisses de l’opération de police « Regain », qui a permis de saisir près de 8 millions d’euros

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C’est une saisie record qui avait attiré l’attention. Le 12 novembre dernier, plus d’1,5 million d’euros ont été découverts dans une maison à Marseille, après une enquête sur un garage automobile qui employait, entre autres, des travailleurs sans-papiers. Coup de théâtre : il ne s’agissait pas d’une action isolée des policiers de l’OLTIM (Office de lutte contre le trafic illicite de migrants), mais d’une opération vaste et cordonnée baptisée « Regain », révèle ce mardi le parquet de Marseille.

Dans un point presse, entouré des représentants de différents services mobilisés, Jean-Yves Lourgouilloux, procureur adjoint et chef de la division économique et financière, a ainsi dévoilé les contours de cette opération dont le nom, en plus d’être un clin d’œil à Jean Giono, traduit l’idée de « regagner l’argent de la fraude et des trafics ». L’objectif : sensibiliser sur le thème de la saisie et de la confiscation des avoirs criminels afin de déstabiliser les réseaux en touchant « le nerf de la guerre », l’argent, souligne le magistrat. La question est brûlante, alors que la situation de la cité phocéenne a fait l’objet d’une réunion de crise à l’Elysée, après la mort du frère d’Amine Kessaci, militant engagé contre le narcotrafic.

Dix affaires variées

« Regain » a été menée durant la première quinzaine de novembre, mobilisant différents services : de la police aux frontières aux douanes, en passant par l’Office national antifraude (Onaf) et la gendarmerie. La mission donnée à cette task force : être la plus efficace possible sur une période courte, en identifiant à l’avance des dossiers prometteurs.

Dix affaires aux contours variés vont ainsi être sélectionnées : deux affaires d’abus de faiblesse commis sur des personnes âgées, une fraude en bande organisée dans le secteur des énergies renouvelables, une escroquerie à la CPAM commise par deux infirmières pour un montant de 160.000 euros, un détournement de fonds publics présumé commis par une association pour un préjudice de 400.000 euros… L’opération a également permis de se pencher sur deux cas de blanchiment d’argent présumés en révélant l’achat de biens immobiliers de valeur importante dans les Bouches-du-Rhône, qui ne coïncidaient pas avec les revenus déclarés des individus concernés, dont deux étaient proches de narcotrafiquants.

Au total, près de 8 millions d’euros ont été saisis, sous la forme d’argent, mais aussi de biens mobiliers et immobiliers ou encore de véhicules. « C’est une bonne opération lorsque l’on sait qu’en 2024, on a saisi près de 43 millions d’euros. En quinze jours, nous atteignons ainsi 20 % du total de l’année dernière », calcule Jean-Yves Lourgouilloux.

Coup psychologique

Une telle opération pourrait être amenée à se reproduire, traduisant non pas un changement de doctrine mais « une meilleure perception de l’importance de la lutte contre la criminalité économique et financière », souligne Jean-Yves Lourgouilloux. Autre preuve de cette nouvelle stratégie : en mai 2025 le Groupe d’évaluation et de suivi de la saisie des avoirs criminels (Gessac) a été créé au parquet de Marseille, regroupant les acteurs dédiés. Des formations et des séminaires se sont également multipliés dans les différents services pour sensibiliser à l’intérêt des actions sur le patrimoine des prévenus.

Entre 2020 et 2024, le tribunal judiciaire de Marseille affiche une augmentation de 43 % en matière de saisies, avec des confiscations (mesures définitives après un jugement) également en hausse. « C’est un aspect que nous voulons mettre en avant car c’est pour nous ce qui permet de lutter efficacement contre toutes les formes de délinquance », poursuit le magistrat. « Une amende, une peine de prison… L’expérience nous démontre que ces sanctions peuvent être intégrées dans un parcours criminel, ajoute-t-il. Mais si les biens sont identifiés, saisis voire confisqués, alors le criminel revient à l’état zéro. Il y a une véritable perte d’intérêt et une atteinte psychologique ».

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S’en prendre aux portefeuilles des narcotrafiquants reste aussi un des leviers pour assécher et déstabiliser les réseaux. « L’argent c’est l’essence qui permet à la machine de fonctionner. Ils sont organisés comme des entreprises, qui ont ainsi besoin de fonds pour s’approvisionner, de trésorerie pour investir, pour payer leurs salariés…, explique Jean-Yves Lourgouilloux. Il faut parvenir à les mettre en cessation de paiements. »

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