Le succès des missiles Rampage israéliens
Missiles israéliens en Inde : de l’effet « Rampage » au pari industriel
Le succès opérationnel du missile israélien Rampage lors de l’« opération Sindoor » a fait plus que valider un concept : il a accéléré un rapprochement stratégique déjà dense entre New Delhi et l’écosystème de défense israélien. À la faveur d’un protocole d’accord signé début novembre entre le directeur général du ministère israélien de la Défense, Amir Baram, et son homologue indien Rajesh Kumar Singh, les deux pays ont clarifié leur feuille de route : allonger la portée, la précision et la résilience des frappes indiennes, tout en maximisant le contenu local.
D’un point de vue capacitaire, l’Inde a déjà intégré le Rampage sur plusieurs plateformes (Su-30MKI, MiG-29, voire Jaguar), profitant d’un armement supersonique à guidage inertiel/GNSS pensé pour frapper vite et loin à plus de 200 km. Mais cette portée, efficace contre des cibles non protégées, expose encore les vecteurs aux couches avancées de défense aérienne — notamment lorsqu’elles combinent radars chinois et missiles sol-air de dernière génération. D’où l’intérêt marqué pour deux briques complémentaires : l’Air LORA d’IAI et l’Ice Breaker de Rafael.
L’Air LORA relève la barre : enveloppe de 400 km environ, très haute précision, profil balistique optimisé et navigation durcie contre le brouillage. Sa philosophie est simple : neutraliser des sites critiques (batteries SAM, dépôts, QG) sans faire entrer les avions dans la bulle ennemie. Pour New Delhi, c’est un multiplicateur de puissance qui rééquilibre le calcul risque/bénéfice sur des théâtres denses, qu’ils soient occidentaux (Pakistan) ou septentrionaux (Tibet/Xinjiang).
En parallèle, l’Ice Breaker de Rafael propose une approche « furtive et intelligente » de la frappe stand-off : environ 300 km de portée, capacité multirôle terre/mer, imagerie infrarouge avec corrélation de scène et algorithmes embarqués pour reconnaître la cible dans un environnement contesté (leurres, saturation, guerre électronique). Le tandem Air LORA/ Ice Breaker offre ainsi une panoplie complémentaire : coup de boutoir balistique contre cibles dures d’un côté, pénétration discrète et discrimination fine de l’autre.
Le cœur du dossier, toutefois, n’est pas que technique : il est industriel. L’Inde ne veut plus seulement acheter, elle veut fabriquer. Les discussions en cours portent sur des montages « Make in India » associant transferts de savoir-faire, production locale et maintien en condition opérationnelle sur le sol indien. La création à New Delhi d’une filiale dédiée d’IAI pour le soutien, l’intégration et la coopération avec l’écosystème DRDO/entreprises publiques envoie un signal clair : ces missiles ne seraient pas de simples « boîtes noires », mais des systèmes ancrés dans la base industrielle indienne, avec des chaînes MRO et des capacités d’adaptation au standard IAF.
Le contexte géopolitique renforce cette trajectoire. Sur la période récente, l’Inde s’est affirmée comme le premier client des exportations israéliennes d’armement, ce qui s’explique par la complémentarité des besoins : munitions stand-off, systèmes sol-air, radars, drones et suites de guerre électronique, tous éprouvés en opérations. Pour Israël, le partenariat indien sécurise des volumes et ouvre un champ d’itération technologique ; pour l’Inde, il apporte des solutions disponibles « sur étagère » mais modifiables, dans des délais compatibles avec ses impératifs stratégiques.
Reste l’équation de mise en service : intégrations avion-missile (interfaces, pylônes, logiciels), essais de séparation, campagnes de tir, dégagements de sécurité et—surtout—arbitrages sur les niveaux de transfert. La feuille de route est ambitieuse, mais réaliste si les étapes industrielles avancent de concert avec l’opérationnel. À terme, le succès de ce paquet capacitaire se mesurera moins au nombre de missiles livrés qu’à la profondeur de l’empreinte locale : lignes d’assemblage, souveraineté MCO, et capacité de rafraîchir vite les bibliothèques de mission face à des défenses adverses en évolution rapide.
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