En Israël, le bras de fer entre politiciens et responsables de la défense et de la sécurité s’intensifie de jour en jour.

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Moins de 15 % de la population ferait encore confiance à la Knesset, alors que celle manifestée à l’égard de Tsahal est de l’ordre de 75 %

Raphaël Jerusalmy
Raphaël JerusalmyAncien officier du renseignement militaire israélien, auteur de « Tribunes de guerre  » chez David Reinharc
La KnessetNoam Moshkowitz / Knesset Spokesperson

Face à l’incapacité des élus, tant de la coalition gouvernementale que de l’opposition, à former un gouvernement d’union nationale durant les deux dernières années de guerre, on note aujourd’hui une perte de confiance des électeurs. D’après les sondages publiés ces jours-ci par le Times of Israel, moins de 15 % de la population ferait encore confiance à la Knesset. Le pays subit une crise institutionnelle causée par des scissions politiques néfastes à l’unité indispensable pour la sécurité du pays. Ce sont ces zizanies internes qui, perçues comme le symptôme d’une défaillance nationale, ont encouragé le Hamas à passer à l’action le 7 octobre 2023. Les principaux corps civils et ministères de l’État sont infestés par la corruption, le manque d’efficacité, la priorisation des intérêts partisans sur l’intérêt des citoyens. Dans un pays normal, les personnes publiques et fonctionnaires impliqués dans des poursuites judiciaires interrompraient l’exercice de leurs fonctions jusqu’à l’atteinte du verdict les concernant. Ce chaos est inacceptable dans un pays en guerre, menacé de toutes parts.

Parallèlement, la confiance et la popularité manifestées à l’égard de Tsahal sont en hausse constante. Selon le même sondage, elles sont de l’ordre de 75 %. L’armée demeure le pilier inébranlable du projet sioniste autour duquel cimenter la société israélienne. Car Tsahal est l’armée du peuple. On y trouve toutes les ethnies, toutes les opinions de l’éventail politique, toutes les strates économiques, unies pour la défense du pays et la protection d’un mode de vie juif et démocratique. Les combattants donnent l’exemple, mettant de côté leurs différences pour accomplir leur mission et protéger la patrie. Dans le même temps, la coalition œuvre à courtiser les milieux ultraorthodoxes refusant de servir sous les drapeaux, scindant le peuple plus encore. Le ministre Yuli Edelstein, du parti Likoud, a déclaré hier que « si l’on n’engage pas les ultraorthodoxes dès maintenant, d’ici 15 à 20 ans la nation ne pourra pas survivre ». Le gouvernement encourage une réforme judiciaire qui, s’il elle a lieu, permettra à n’importe quel pays au monde et aux Cours internationales de poursuivre et arrêter les soldats et officiers de Tsahal sous prétexte qu’Israël ne dispose plus d’un système judiciaire indépendant. L’affaire du Qatargate montre à quel point le problème institutionnel est grave. L’affaire de la procureure militaire l’est aussi, certes. Mais son enjeu est aujourd’hui politique. Au point que le chef de la police et ses assistants légaux fassent rempart aux ingérences du ministre de la Justice, Yariv Levin, qui vont à l’encontre de la loi et menacent la démocratie. Les hauts commandants de la police parlent d’un véritable « coup d’état ».

Qatargate : véritable affaire d’État ?

Le chef national de la police israélienne, Danny Lévi, ainsi que le chef de la police du district de Tel-Aviv, bloquent désormais les ingérences du ministre de l’Intérieur, Itamar Ben Gvir, dans le travail et le fonctionnement de leur institution. Le commandant de Tsahal, le général Eyal Zamir, multiplie les altercations avec les membres du cabinet de sécurité qui l’injurient souvent en des termes honteux. Il protège courageusement Tsahal et ses soldats des ingérences du ministre de la Défense, Israël Katz. Le niveau politique donne les consignes, certes. Mais c’est au niveau militaire de décider de la manière de les exécuter au plan professionnel. De fait, le général Zamir a obéi à l’ordre d’une offensive sur la ville de Gaza. Mais à sa manière, c’est-à-dire le plus prudemment possible, très lentement, afin de préserver ses troupes et les otages. Les officiers du Shin Beth s’opposent au chef qui vient de leur être imposé de l’extérieur, le général Zini, qu’ils considèrent inapte et politisé. Et ils entendent garder le contrôle de l’enquête du Qatargate. Le chef du Mossad, David Barnéa, est même allé plus loin. Il a carrément refusé de prendre part à l’opération d’élimination des chefs du Hamas vivant à Doha, la trouvant insuffisamment préparée. Il a formellement interdit à ses agents sur le terrain d’y participer, les protégeant à son corps défendant. Le bras de fer entre politiciens et responsables de la défense et de la sécurité s’intensifie de jour en jour.


Il n’y aura cependant pas de coup d’état militaire en Israël. Mais un glissement institutionnel qui mènera à la prise en mains par l’armée des domaines négligés par les politiciens. Une sorte de passation des pouvoirs, du moins tant que la situation sécuritaire l’exigera et sera prioritaire. En d’autres termes, plutôt que de voter pour d’anciens généraux reconvertis en députés peu compétents, mieux vaut mettre à la barre, ceux qui, plus jeunes, en plein élan, sont encore en activité. Et que l’immense majorité du peuple d’Israël s’accorde à soutenir et admirer.

Tribunes de guerre, par Raphaël Jerusalmy, commentaires de Mohamed Sifaoui, éditions David Reinharc. Tribunes de guerre 2023-2025 – broché – Raphaël Jérusalmy – Achat Livre | fnac

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Ardouth…

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