Soudan : Derrière la guerre des chefs, « une projection des rivalités du Moyen-Orient »

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De l’or, des mines, des terres agricoles… Le Soudan regorge de richesses sur lesquelles ses voisins lorgnent depuis toujours. Derrière les sanglants combats qui déchirent le pays de la corne de l’Afrique entre les Forces de soutien rapide (FSR) et les Forces armées soudanaises (SAF), les puissances du Moyen-Orient tirent les ficelles, ou du moins apportent, plus ou moins discrètement, leur soutien économique et/ou militaire.

Situé sur un point central entre l’Afrique et le Moyen-Orient, le Soudan occupe une place géostratégique et géopolitique de premier plan pour la région et le conflit interne prend une dimension internationale. Ce « pays charnière » devient alors le terrain d’une « projection des tensions du Moyen-Orient », notamment entre les différentes monarchies du Golfe, explique Thierry Vircoulon, coordinateur de l’Observatoire pour l’Afrique centrale et australe de l’Institut français des relations internationales (IFRI), spécialiste du Soudan.

Des enjeux internationaux complexes

Les aides peuvent être économiques, matérielles, militaires ou de renseignement… Parmi les puissances, les Emirats arabes unis constituent « un soutien manifeste des FSR » et profitent depuis longtemps, même avant la guerre, du trafic d’or, ajoute Alice Franck, maîtresse de conférences en géographie à Paris-1. Derrière les paramilitaires du général Mohamed Hamdan Dogolo, dit Hemetti, on trouve aussi un soutien de la Libye voisine, le régime tchadien et politiquement, le Kenya, détaille Thierry Vircoulon.

Et d’ajouter que l’Egypte, la Turquie, l’Iran ou le Qatar se placent davantage du côté de l’armée soudanaise menée par le général Abdel Fattah al-Burhan. Derrière les combats, les enjeux sont donc complexes et plus lisibles sur la carte ci-dessous.

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Comme souvent dans les relations internationales, les frontières sont floues entre les intérêts défendus. « Certaines puissances peuvent se ranger derrière deux camps opposés au Soudan mais être alliées sur d’autres dossiers », nuance Lucie Revilla, chargée de recherche au CNRS et attachée à l’Institut des mondes africains (Imaf). C’est par exemple le cas de l’Egypte et des Emirats arabes unis sur la guerre à Gaza.

Le double jeu de la Russie

Le Soudan constitue depuis longtemps pour plusieurs acteurs une opportunité avec Port Soudan et son ouverture sur la mer Rouge, qui attire les monarchies de la péninsule arabique mais aussi la Russie, qui espère un accès promis depuis des années, sans concrétisation actuellement.

Alors en attendant de voir qui sortira vainqueur de cette guerre fratricide, Moscou « prend ce qu’elle a à prendre et manœuvre des deux côtés ». Le Kremlin avait des relations avec l’armée soudanaise avant la guerre et les paramilitaires qui combattent sous la bannière de Wagner sont proches des FSR. « Ils ont toujours eu un pied de chaque côté, et continuent », résume Thierry Vircoulon.

Qui pour arrêter les combats ?

S’il y a une « économie de la guerre qui se met en place, les ressources et intérêts extérieurs ne sont pas au cœur du conflit », martèle toutefois Alice Franck. Oui le trafic d’or continue son chemin vers Dubaï ou vers l’Egypte, mais il n’y a pas vraiment de gains immédiats, ces soutiens visent surtout à voir se concrétiser « des promesses sur l’avenir », précise Thierry Vircoulon. « Les monarchies arabiques pourront continuer leurs investissements et affaires qu’elles ont lancées depuis les années 1970 dans le pays, c’est un parti pris pour le long terme », développe-t-il.

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Tout le monde y gagnerait finalement à un arrêt des combats. Certains pays, comme les Etats-Unis, tentent d’ouvrir des négociations, n’essuyant que des échecs jusqu’à présent. Alice Franck appelle ainsi la communauté internationale « à intervenir et pas se contenter de jeter la faute sur les Emirats arabes unis ou autres soutiens ». « Qu’est-ce que fait l’Union européenne, l’ONU, Washington à part condamner ? Il faut appeler à faire pression », insiste-t-elle.

« Moins les puissances occidentales s’emmêlent, mieux c’est », estime au contraire Lucie Revilla car cela risque « d’être vécu comme quelque chose d’imposée par la société soudanaise ». La chercheuse milite davantage pour faire pression sur les gouvernements afin qu’ils arrêtent de vendre des armes aux pays indirectement impliqués.

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