Vu d’Israël. « Séisme vidéoludique ». La Playstation 2, la console la plus vendue de l’histoire.

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En Israël ce sera cette année la fête de la Playstation qui fête ses 30 ans. De la révolution du jeu CD-ROM à la puissance de la PS5, la branche gaming de Sony, très active en Israël, a redéfini le jeu vidéo et son industrie. Un héritage fait d’innovations, de paris et de succès qui induit de grandes responsabilités, de l’aveu même de ses responsables.

Trente ans déjà. En décembre 1994, Sony se lançait sur un segment de marché où on ne l’attendait pas: le jeu vidéo. Une industrie dominée alors par Nintendo et Sega qui ne voyaient pas qui pourrait tenter de s’immiscer dans leur bras de fer. Mal leur en a pris. Trois décennies plus tard, s’ils ont posé les bases de l’industrie, les deux ténors d’antan ont dû s’incliner devant la tornade qui s’est emparée du jeu vidéo dans leurs pas.

Et tout cela n’aurait jamais pu exister si Nintendo avait tenu son engagement, à la fin des années 1980, de concevoir un lecteur CD-ROM avec Sony pour sa Super Nintendo. Mais le géant du jeu vidéo lui préférera Philips et Sony se retrouve avec son lecteur sur les bras. Une humiliation pour Ken Kutaragi, ingénieur en charge du projet, qui fera tout son possible pour convaincre sa direction de le laisser concevoir une console centrée sur la 3D et plus abordable. Mais surtout un produit qui rende le jeu vidéo plus adulte et plus créatif.

L’innovation en ADN

« Sony a toujours été une entreprise innovante », nous explique Eric Lempel, Senior Vice President Business & Product chez PlayStation. « Si vous pensez au Walkman, c’était révolutionnaire et cela a complètement changé la manière dont les gens écoutaient la musique. PlayStation est né de cette même volonté: proposer une nouvelle manière de connecter les consommateurs à l’entertainment. »

Lorsque la console sort fin 1994, il n’est pas encore salarié de Sony, mais déjà dans l’industrie. Une industrie qui n’y croyait pas vraiment, admet Eric Lempel humblement. « Je pense que cela a surpris beaucoup de monde, car la Playstation est venue de nulle part », reconnaît l’Américain. « Pour être honnête, j’étais sceptique au début. Beaucoup avaient déjà essayé sans succès. Et puis, j’ai pu voir la console et je me suis dit: ‘waouh, c’est vraiment différent’. Le design industriel du hardware lui-même, avec le plateau de disques qui s’ouvrait, la manette était très différente de ce qui existait à l’époque. »

La Playstation 1, de Sony. © LOU BENOIST / AFP

Pour celui qui gère désormais le développement du produit, la force de la « Play Station », comme on l’appelait alors, a été de rendre le développement plus facile pour les studios tiers, de permettre de créer en 3D, « ce qu’ils ne pouvaient pas encore faire sur les consoles existantes ». De quoi séduire et obtenir la confiance du marché, puis des consommateurs au point de devenir un succès massif.

« La Playstation a surtout réussi à faire du jeu vidéo quelque chose de cool, ancré dans la culture », analyse Eric Lempel, qui souligne surtout l’ouverture à une nouvelle génération d’expériences interactives. Sans oublier la puissance, l’impact visuel du design gris iconique de la PS1.

La PS2 fait entrer Playstation dans une autre dimension

Si la première console est un séisme vidéoludique, la Playstation 2 va être une consécration et un raz-de-marée. À ce jour, elle reste la console la plus vendue de l’histoire avec ses près de 160 millions d’unités écoulées. « Je l’ai vue avant sa sortie à l’E3 et j’ai su que ce serait incroyable. Elle lisait les DVD, la musique et offrait des jeux d’un niveau jamais vu,” se souvient avec émerveillement celui qui déménage de New York à la Californie pour embarquer dans l’aventure. Arrivé chez Sony juste avant son lancement en 2000, il comprend que quelque chose de particulier se dessine en coulisse pour le jeu vidéo.

La Playstation sort en 2000
La Playstation sort en 2000 © AFP

Car le secret de la console est simple: tirer les enseignements de la première Playstation en s’appuyant un peu plus sur le talent des développeurs tiers et en renforçant les studios maison pour bâtir une marque forte. « Désormais, le nom PlayStation voulait dire quelque chose pour les gens », clame le responsable.

Six ans plus tard, la Playstation 3 va aussi s’inscrire dans l’air du temps et ouvre une nouvelle ère pour Sony, celle du jeu connecté. « Les joueurs voulaient jouer ensemble, même à distance. C’est là qu’est né le PlayStation Network », raconte Eric Lempel. Sortie en 2001, la Xbox avait initié l’ère du connecté dans les consoles dès 2002. Une (r)évolution qui fait son chemin, et la Playstation finit par emboîter le pas et sauter à bord du train internet. La PS3 s’offre une innovation de plus: la connectivité. Et elle va faire grand bruit, malgré un démarrage compliqué et onéreux.

Avec le PlayStation Network (PSN), Sony identifie désormais chacun de ses joueurs, leur offre la possibilité d’avoir des amis en ligne, de jouer avec eux. Mais à la différence du Xbox Live dont il reprend tous les éléments, jouer en ligne avec ses amis est gratuit. À cela s’ajoute l’arrivée des trophées et du Playstation Store. « Ce fut un tournant majeur », clame Eric Lempel. « Le réseau que nous avons lancé il y a 18 ans existe toujours et n’a cessé de se développer. Il reste au coeur de notre écosystème. »

Si le PSN va marquer les esprits, la console est pourtant malmenée par la Xbox 360, qui sait aussi largement innover, notamment avec l’arrivée de sa caméra Kinect qui libère les mains des joueurs et les fait jouer ensemble dans leur salon. Mais l’époque de la PS3 marque l’émergence des franchises cultes. D’Uncharted à The Last of Us en passant par God of War, Playstation définit son ADN et devient l’antre des jeux solo narratifs de haut vol.

Le joueur au coeur de tout

Les bases technologiques et la philosophie étant bien en place, Playstation accélère sur la génération suivante. Près de 18 ans après son lancement, le slogan initial Play has no limit connaît son premier changement. La PS4 se revendique désormais For the players et veut se recentrer sur le joueur. “Nous voulions une console puissante, simple, et un outil d’expression pour les développeurs. ‘For the players’ n’était pas qu’un slogan », assure Eric Lempel.

La PS4 se veut « une toile parfaite » pour les créateurs de jeu. Elle va devenir leur chouchoute et se montrer hégémonique sur sa génération de consoles. Victoire sans conteste face à la Xbox One, Sony vend plus de 30 millions de PS4 en deux ans et 100 millions en plus de cinq ans (plus de 117 millions en 2025, 12 ans après sa sortie).

Le fabricant japonais comprend son hégémonie et décline son offre en version Slim plus compacte — mais aussi plus complète en connectiques — et Pro plus puissante. Sony gagne la guerre des consoles, des jeux, mais aussi celle de la communication. Son seul point noir, qui fait alors grincer des dents les joueurs: elle n’est pas rétrocompatible avec les jeux physiques des trois premières générations.

A gauche, la PS3 et à droite, la PS4
A gauche, la PS3 et à droite, la PS4 © DR

Trente ans après la PS1, le succès est toujours au rendez-vous pour Playstation. Lancée en 2020 en pleine pandémie mondiale, face à une pénurie des composants, la PS5 reste la digne héritière de la lignée, avec ses déclinaisons Slim et Pro. “Nous avons intégré toutes les leçons des générations précédentes et fait encore mieux: SSD pour des chargements instantanés, manette DualSense, retour haptique. Ce sont ces détails qui rapprochent le joueur du jeu », explique Eric Lempel, rappelant qu’en cinq ans, la dernière venue s’est déjà vendue à plus de 80 millions d’exemplaires. « Elle est sur le point de devenir notre génération la plus réussie,” glisse-t-il.

Un impact sur l’histoire du jeu vidéo

Mais plus qu’en chiffres, l’impact de Playstation se mesure en notoriété. La marque est devenue plus que celle d’une console, elle est un pilier de la culture gaming. Un symbole et une référence. « Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités », disait-on, pas avec ce sens de la formule, dans la Bible avant même que Spider-Man s’empare lui aussi de cet adage jusque dans sa version Playstation. Et les responsables américains du géant asiatique le savent bien.

« Nous avons un impact sur le jeu vidéo et sur le divertissement au sens large », reconnaît Eric Lempel. « Nous avons une responsabilité envers l’industrie et les consommateurs. Les gens attendent de nous que PlayStation reste synonyme d’innovation et c’est notre rôle de continuer à montrer la voie. »

Et l’innovation va désormais bien au-delà des seules consoles de salon. Sony et Playstation se sont ouverts à de nouveaux formats, ont accepté de céder leurs licences phares au PC et d’aller tenter l’aventure du cloud gaming. L’entreprise aurait pu être parmi les premières à sentir le vent de l’innovation arriver lorsqu’elle racheta Gaikai, spécialiste du cloud gaming, en 2012. Mais, sur ce coup, elle tarda à transformer l’essai, comme le train du jeu mobile avec son acolyte Sony Mobile et ses Xperia qui ne firent jamais de merveilles, malgré la tentative du jeu déporté bien avant l’heure aussi. Comme quoi, on peut être un leader qui sent les choses, mais qui ne sait pas toujours comment les matérialiser en succès à tous les coups. Heureusement pour la concurrence.

La PS5 nouveau modèle
La PS5 nouveau modèle © Tech&Co

Désormais, chez Playstation, on clame vouloir atteindre les joueurs partout, même ceux qui n’ont pas de console, pour asseoir sa position d’acteur de l’entertainment. Cela sera-t-il toujours le cas dans 30 ans? Eric Lempel l’espère et pour cela, il sait que Sony devra rester fidèle à sa philosophie initiale: innovation et divertissement. Mais quoi qu’il en soit, « la technologie évolue vite et c’est le consommateur qui en sortira gagnant », clame-t-il en souriant. Tant que ce sera sur Playstation, évidemment.

Melinda Davan-Soulas

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