Israël autorise l’euthanasie sous conditions
Un cas exceptionnel d’euthanasie autorisé en Israël : le débat relancé
La semaine dernière, un événement rare et controversé est survenu à l’hôpital Sheba Tel Hashomer : un patient en phase terminale, atteint d’une maladie musculaire incurable, a vu son euthanasie autorisée par une décision de tribunal spéciale – un geste qui contrevient à la loi israélienne en vigueur mais qui marque un tournant potentiel dans le débat sur la fin de vie dans le pays.
Interdiction légale et exceptions judiciaires
Selon la législation israélienne actuelle, l’euthanasie active – c’est-à-dire un acte médical délibéré provoquant la mort – est strictement interdite. Toute personne participant à cet acte encourt des poursuites pour homicide selon le code pénal. En revanche, la loi autorise le refus de traitement : un patient peut demander à ce que sa vie ne soit pas prolongée par des moyens artificiels (comme la réanimation). En d’autres termes, la loi israélienne distingue entre l’omission de soins et l’action directe visant à faire mourir.
Dans ce cas exceptionnel, le tribunal a délivré une autorisation spéciale il y a environ deux mois et la procédure a été réalisée la semaine passée. Ce patient souffrait d’une maladie neurodégénérative en phase terminale, ce qui l’a mené à demander à mettre fin à ses souffrances. On précise qu’il s’agirait seulement du deuxième cas connu en Israël où cette forme d’euthanasie a été permise – le premier remontant à 2014 dans une affaire similaire impliquant un patient atteint de SLA (amyotrophie spinale) soumis à un protocole de diminution progressive de ventilation.
Contexte légal et limites de la loi
Depuis 2005, la « Dying Patient Act » (Loi sur le patient mourant) encadre les droits des patients en fin de vie. Elle interdit l’euthanasie active, mais permet aux patients d’exprimer à l’avance leur refus de traitements excessifs, notamment en demandant la non-prolongation artificielle de la vie, et impose aux établissements médicaux de proposer des soins palliatifs. Toutefois, la loi connaît des difficultés d’application : de nombreux patients ignorent ses dispositions, et la mise en œuvre des directives anticipées reste faible dans la population.
Par exemple, moins de 0,5 % des adultes israéliens ont rempli les formulaires légaux permettant de faire connaître leurs volontés pour la fin de vie, comme le refus de réanimation.
La décision du tribunal récent pose une difficulté : elle semble franchir la ligne de ce que la loi permet explicitement. Certains analystes soulignent la distinction entre « euthanasie active » et « retrait de traitement » : dans des cas antérieurs (notamment celui de 2014), le tribunal avait autorisé la réduction progressive d’assistance respiratoire — un geste interprété comme un retrait de traitement, non une injection létale directe.
En 2014, la Cour de district de Tel Aviv avait autorisé cette approche dans la mesure où le patient avait explicitement demandé le retrait du ventilateur. Ce cas avait été qualifié de « euthanasie passive » plutôt que d’acte actif, pour rester en cohérence avec la loi en place.
Opinion publique et défis éthiques
Les sondages récents montrent que l’opinion publique israélienne est divisée mais en évolution : une majorité relative se dit favorable à autoriser l’euthanasie institutionnelle dans les cas de patients en fin de vie, tandis qu’une minorité y est opposée – souvent pour des raisons religieuses ou morales. Les attitudes varient fortement selon le degré de laïcité ou de religiosité des répondants.
Le débat éthique est complexe. Pour les partisans de cette décision, permettre l’euthanasie dans des cas extrêmes relève du respect de la dignité humaine — offrir une issue pour éviter des souffrances insoutenables. Pour les opposants, l’interdiction de l’acte actif protège la valeur sacrée de la vie et empêche des dérives potentielles.
Risques et perspectives
Ce deuxième cas autorisé pourrait ouvrir une pente glissante : si d’autres patients demandent une permission judiciaire similaire, le système légal et éthique israélien devra clarifier les critères, définir des garde-fous et décider s’il faut amender la législation. Les risques sont multiples : contester le monopole de la vie, créer des pressions sociales sur les malades, ou établir des précédents dangereux.
Mais en l’absence d’amendement, de tels cas resteront des exceptions rares accordées par des tribunaux, sans statut légal clair. Le véritable changement — si changement il y a — devra venir du Parlement israélien, qui pourrait proposer une réforme encadrée du droit de fin de vie, en conciliant dignité, liberté individuelle et protection des plus vulnérables.
Dans cette affaire délicate, Israël est confronté à un dilemme moral et juridique. Le pays ne peut se permettre d’ignorer les cas extrêmes de douleur lancinante que certains patients vivent. Toutefois, toute ouverture vers l’euthanasie exige des restrictions rigoureuses pour protéger la dignité de la vie et éviter les abus. Israël, en tant qu’État moderne et ancré dans des valeurs humanistes, doit œuvrer pour un cadre équilibré : défendre les droits des patients, mais maintenir la sécurité juridique, éthique et protectrice de ses citoyens.
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