Missiles houthis à fragmentation ; un défi pour Israël
La récente utilisation de missiles balistiques équipés d’ogives à fragmentation par les Houthis marque une étape inquiétante dans l’évolution du conflit régional. Cette tactique, qui s’est traduite par une frappe sur le centre d’Israël vendredi dernier, révèle une sophistication croissante des capacités militaires du groupe yéménite, appuyé par l’Iran, et soulève de nouvelles interrogations sur la solidité du bouclier antimissile israélien.
Une rupture tactique majeure
Jusqu’à récemment, les Houthis recouraient principalement à des ogives unitaires ou à des essaims de drones. L’introduction de missiles à sous-munitions constitue un saut qualitatif. Contrairement aux charges classiques qui explosent en un seul impact, ces ogives se fragmentent en vol, libérant des dizaines, voire des centaines de bombettes. Celles-ci s’éparpillent sur une vaste zone, compliquant non seulement l’interception par des systèmes comme l’Arrow ou la Fronde de David, mais aussi la gestion des dégâts au sol.
Un exemple frappant en est la chute d’une sous-munition dans le moshav de Ginaton, au centre d’Israël. Si les dommages furent limités, cet incident illustre la difficulté pour la défense aérienne d’intercepter efficacement des projectiles se fragmentant en plein vol. Le danger réside dans la multiplication des zones touchées et la persistance de sous-munitions non explosées, créant des menaces à long terme pour les populations civiles.
L’empreinte iranienne
L’Iran dispose déjà de plusieurs types de missiles balistiques à fragmentation, tels que les Qadr ou les Khoramshahr, utilisés notamment lors de la guerre des Douze Jours. Le transfert de technologie et d’armement aux Houthis est documenté depuis plusieurs années. La frappe récente apparaît comme une démonstration de la doctrine iranienne de guerre par procuration, où le Yémen sert de terrain d’expérimentation pour de nouveaux systèmes d’armes.
Au-delà de l’effet militaire immédiat, les Houthis affirment avoir visé l’aéroport Ben Gourion, centre névralgique du trafic israélien. Cette revendication, qu’ils répètent régulièrement lorsqu’ils attaquent le centre du pays, s’inscrit dans une stratégie psychologique : maintenir la pression sur Israël, perturber les lignes aériennes internationales et projeter l’image d’une menace persistante.
Une doctrine de saturation
Pour Téhéran, l’enjeu est clair : éroder la supériorité technologique israélienne. L’Iran et ses alliés – du Hezbollah au Hamas en passant par les milices en Irak et en Syrie – cherchent à saturer les systèmes de défense israéliens en multipliant les vecteurs d’attaque. Les Houthis s’ajoutent désormais à cet « axe de résistance », leur portée géographique et leur arsenal renforçant la capacité iranienne à ouvrir un front supplémentaire contre Israël.
Cette évolution change la donne. Israël se retrouve face à un adversaire indirect capable de projeter des armes sophistiquées sur son territoire depuis plus de 1 500 kilomètres. Une telle menace place les Houthis dans une catégorie nouvelle, nécessitant une réponse militaire et stratégique adaptée.
Les réponses israéliennes
En représailles, l’armée israélienne a frappé dimanche plusieurs infrastructures au Yémen, visant à la fois des installations militaires et des sites civils, dont deux centrales électriques et un dépôt de carburant. Cette réaction rappelle la doctrine israélienne avant le 7 octobre : frapper les capacités de l’ennemi tout en envoyant un message de dissuasion.
Cependant, la comparaison avec le passé interroge. Au début des années 2000, les tirs sporadiques de roquettes Qassam depuis Gaza avaient été initialement tolérés par Israël, avant de se transformer en menace chronique. Certains analystes craignent que l’évolution actuelle des Houthis n’annonce une trajectoire similaire, mais avec des armes d’une puissance et d’une précision bien supérieures.
Un défi pour la défense aérienne
L’incapacité à intercepter efficacement le missile avant sa fragmentation met en lumière les limites du système multicouche israélien. Si le Dôme de fer, la Fronde de David et Arrow ont prouvé leur efficacité contre une grande variété de menaces, ils ne sont pas conçus pour gérer la dispersion en vol de sous-munitions.
Cela oblige Israël à envisager de nouvelles adaptations technologiques et doctrinales. Il s’agit non seulement d’améliorer les capacités d’interception, mais aussi de renforcer la résilience civile : protocoles d’urgence, déminage des zones contaminées par des munitions non explosées, et protection accrue des infrastructures critiques.
Une guerre asymétrique en mutation
Au fond, cette escalade illustre l’évolution de la guerre asymétrique au Moyen-Orient. Les Houthis, longtemps considérés comme un acteur périphérique, deviennent un levier stratégique pour l’Iran. Le Yémen se transforme en plateforme de projection régionale, permettant à Téhéran de maintenir une pression constante sur Israël malgré ses propres vulnérabilités internes.
Pour Jérusalem, le défi dépasse la simple interception du prochain missile. Il s’agit d’anticiper les progrès futurs des mandataires de l’Iran, d’adapter ses réponses et de garantir que son architecture de défense reste résiliente face à une menace en constante mutation.
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