Un drone pour chaque soldat ?
L’armée israélienne franchit une nouvelle étape dans l’intégration massive des drones sur le champ de bataille. Selon des informations publiées par Globes, Tsahal a attribué à la société israélienne Extend (XTEND) un contrat portant sur la fourniture d’environ 5 000 drones d’attaque, dans le cadre d’un appel d’offres qui suscite déjà débats et critiques.
Une commande de grande ampleur
L’appel d’offres, estimé à près de 20 millions de shekels, prévoit l’acquisition de drones dits FPV (First Person View), pilotés à l’aide de lunettes de réalité virtuelle. Le prix unitaire est évalué à environ 3 500 shekels par drone, un coût relativement bas pour ce type de matériel militaire. Ces appareils, de 10 pouces, peuvent transporter une charge utile d’environ 2,5 kg, généralement suffisante pour une petite charge explosive. Leur usage envisagé laisse peu de doute : il s’agit de drones d’attaque suicides, destinés aux bataillons de combat.
L’accord inclut également la livraison de postes de commande et d’équipements de vision immersive permettant aux soldats de piloter directement les drones. En pratique, chaque unité de combat pourrait disposer de plusieurs dizaines de ces engins, augmentant considérablement ses capacités offensives et de reconnaissance.
Extend, un outsider devenu favori
Cette victoire place Extend devant des concurrents de poids tels que Elbit, Robotichan ou encore Dronix. La société n’en est pas à sa première innovation : il y a cinq ans déjà, elle avait utilisé des drones FPV pour neutraliser des ballons explosifs lancés depuis Gaza.
L’appareil choisi pour cet appel d’offres rappelle justement ces premiers modèles, simples et peu coûteux. À titre de comparaison, il est souvent mis en parallèle avec le Fly de la société Dronix, qui n’a finalement pas été retenu.
Des critiques sur le choix technologique
Le principal reproche adressé à Tsahal concerne le prix très bas fixé dans le cahier des charges. Selon plusieurs fabricants israéliens, cette contrainte a écarté les solutions plus sophistiquées et poussé à retenir un modèle minimaliste, parfois jugé peu rentable à produire.
La polémique s’est accentuée lorsqu’il a été révélé que le drone d’Extend intègre un composant chinois : un émetteur vidéo fabriqué par une société de Hong Kong. Initialement, le département de recherche et développement du ministère de la Défense (MAFAT) s’était opposé à l’introduction de ce matériel étranger, préférant des infrastructures de communication numériques développées en Israël. Mais l’argument économique a prévalu : le recours à cette pièce importée réduit significativement le coût global du projet.
Une dépendance technologique questionnée
Ce choix soulève des interrogations dans un contexte international où les États-Unis interdisent déjà l’utilisation de composants chinois dans les infrastructures sensibles et l’équipement militaire. Israël, pourtant proche allié de Washington, avait déjà commandé par le passé des drones de marque DJI ou Otel, tous deux fabricants chinois. Cette dépendance aux importations à bas coût contraste avec la volonté affichée de promouvoir l’industrie de défense nationale.
Pour certains experts, l’appel d’offres reflète la tension permanente entre innovation locale et contraintes budgétaires. Produire un drone 100 % israélien, doté d’une communication sécurisée et sans composants étrangers, reviendrait plusieurs dizaines de dollars plus cher par unité. Or, l’armée mise ici sur une approche de masse : équiper rapidement ses bataillons, quitte à privilégier un matériel moins sophistiqué mais immédiatement disponible.
Vers une “drone-isation” de l’infanterie
L’acquisition de 5 000 drones FPV marque un tournant pour les forces terrestres israéliennes. L’idée est d’intégrer ces engins au niveau des bataillons, voire des compagnies, transformant chaque soldat en potentiel opérateur de drone kamikaze.
Cette stratégie répond à l’évolution du champ de bataille moderne, où les drones FPV sont devenus omniprésents, notamment en Ukraine, où ils ont démontré une efficacité redoutable face aux blindés et aux positions fortifiées. Pour Tsahal, il s’agit donc d’adapter ses unités à un mode de combat qui privilégie la rapidité, la précision et le coût réduit par rapport aux systèmes d’armement classiques.
Un pari audacieux mais risqué
Si cette décision permet à Israël d’accélérer sa modernisation tactique, elle comporte aussi des risques : dépendance à des composants étrangers, vulnérabilité potentielle des communications et fragilité économique des fabricants israéliens évincés.
Le succès de cette initiative dépendra autant de la capacité de Tsahal à intégrer efficacement ces drones sur le terrain que de sa faculté à garantir leur sécurité technologique. Quoi qu’il en soit, l’achat massif de drones FPV confirme une tendance mondiale : dans les guerres du XXIe siècle, le drone est en passe de devenir l’arme du soldat ordinaire.
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