Été de cristal 2025-Leçons historiques d’un été autrichien

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Été de cristal 2025

Leçons historiques d’un été autrichien

Par Nathalie Ohana

14 août 2025

Rien de nouveau sous le soleil, sinon l’ombre qui plane sur une Europe à nouveau en proie à ses éternels démons.

Aux feux de forêts et aux pics de chaleur désormais familiers, l’édition 2025 ajoute un millésime funeste: celui d’un antisémitisme décomplexé, ostentatoire, sûr de sa vertu.

Malheureusement rien n’a changé…

Pas un jour sans qu’un nouvel acte à connotation antisémite ne soit signalé. On n’a pas le droit d’être antisémite, mais l’antisionisme ne craint aucune loi. Alors, troquons gaiement le premier pour le second !

Juifs d’Europe et Israéliens en voyage, unis dans le même sort: celui d’incarner aux yeux du monde le mal absolu. Face à un tel déferlement, ils savent qu’un été tranquille se vit mieux sans Magen David autour du cou.

En arpentant la ville autrichienne de Graz, quintessence d’une culture européenne inscrite dans la pierre, je me laisse porter par cette douceur où le temps semble suspendu. Ici, pas de banderoles « Free Palestine », pas d’appel à manifester le samedi. Mais en cette journée ponctuée par le recensement de violences à l’encontre de personnes portant une kippa sur la tête, de Montréal à Livry-Gargan, une phrase du philosophe Hegel, longtemps oubliée, vient cogner à ma mémoire : « La seule chose que nous apprenons de l’histoire, c’est que nous n’en apprenons rien ».

Le charme de la ville opère, son architecture est raffinée, des concerts de musique classiques fleurissent à chaque coin de rue et pourtant, son musée de l’Histoire me rappelle ce que j’ignorais : Graz fut, jadis, la capitale revendiquée de l’hitlérisme.

Qu’importe. De l’eau a coulé sous les ponts et les vacances sont belles. Je quitte l’effervescence de la ville pour poser mes valises au vert, loin de ces réminiscences. Mon téléphone continue de vibrer de notifications et même à travers les Alpes autrichiennes, la rumeur antijuive ne s’étouffe toujours pas.

Ici, on a griffonné « Free Palestine » sur des plateaux-repas de passagers mangeant casher. Là, un contrôleur aérien s’est autorisé à répéter les mêmes mots. La France décide de ne pas renouveler les visas des agents de sécurité de la compagnie israélienne El Al, tandis que le président français profite de cet été délétère pour intenter à la communauté juive un procès en universalisme…, avant de démentir ses propos.

L’été sera chaud, nous avait-on prévenu.

Il n’est pas chaud, il est fiévreux.

Pas un jour de répit. L’Europe n’est plus la seule à être touchée. Un homme est battu devant ses enfants parce que juif, à Montréal. L’Australie n’est pas en reste. J’ai la tête qui tourne avant le dernier coup de chaud.

En Autriche, dans ce berceau de la vieille Europe, il n’y a pas de plage. Alors, on m’indique le seul endroit pour se rafraîchir: un Strandbad, une piscine extérieure face aux montagnes. Je m’y rends et arrive dans une ville au nom qui m’est inconnu, Edlach.

Merci Herzl !

La saison bat son plein, alors je fais plusieurs fois le tour du parking pour trouver une place. Au deuxième tour, mon œil s’accroche sur un panneau : « Denkmal Theodor Herzl ».

Je parle l’allemand et relis plusieurs fois le panneau. Je me gare en vitesse, j’oublie la piscine et je cherche la stèle mémorielle au nom de celui qui, marqué par l’Affaire Dreyfus, rêva de créer un État au début du siècle dernier dans lequel les Juifs pourraient enfin vivre dignement et en sécurité…

Je sais pertinemment qu’Herzl est enterré en Israël, à Jérusalem, sur le mont qui porte son nom. C’est d’ailleurs sur le mont Herzl que les enterrements militaires ont lieu. Ici, dans la ville de Edlach, dans la Styrie autrichienne, c’est une minuscule ruelle qui porte son nom. Ici, Theodor Herzl s’est marié et a passé tous ses étés. La stèle indique qu’il est mort un certain 3 juillet 1904 à quelques mètres d’ici.

Ces quelques traces de sa présence ont le mérite de me plonger dans l’histoire de ce prophète qui a su faire de son rêve une réalité au milieu d’un été cauchemardesque.

La synchronicité me frappe. C’est à croire que mon inconscient a appelé ce rendez-vous avec l’histoire. Aujourd’hui, plus d’un siècle plus tard, le monde balbutie à nouveau la même haine. Elle porte des habits adaptés aux temps nouveaux mais son fond est le même.

Les Zola sont aussi rares – et aussi éclatants de courage – qu’hier. On retourne le « J’accuse » contre le Juif – désigné sous la figure de l’Israélien – et on renoue ainsi avec délectation avec le fantasme du Juif affameur et tueur d’enfants.

Face à cette stèle discrète, aux côtés de mes enfants israéliens, dans cette ville où l’on pouvait jadis côtoyer toute l’aristocratie viennoise — jusqu’à l’empereur François-Joseph et l’impératrice Sissi —, je rends hommage au père du sionisme, ce mouvement émancipateur né de l’antisémitisme européen et devenu, par un retournement ironique de l’histoire, sa nouvelle cible. Je lui murmure que depuis sa mort, rien n’a changé, et puis je me ravise.

Rien n’a changé… et pourtant tout a changé… car aujourd’hui, Israël existe.

Source: Albert Soued
JForum.fr

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