Les israéliens le savent depuis longtemps. L’économie est un champ de confrontation stratégique entre États.

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EDITORIAL. XERFI (copyrights). C. Moleux. La croyance dans une  mondialisation heureuse régulée par les marchés et les règles du libre-échange s’est effondrée. L’économie n’est plus une sphère autonome. Elle est redevenue un champ de confrontation stratégique entre États. Les entreprises ne sont plus seulement des acteurs économiques : elles sont enrôlées dans des logiques de puissance.

Le retour de la géoéconomie

Le terme « géoéconomie », forgé par Edward Luttwak, désigne l’usage d’outils économiques à des fins géopolitiques. Ce que l’on observe aujourd’hui, c’est le basculement global des États vers cette approche. Tarifs douaniers, contrôles d’exportation, relocalisations, sanctions, investissements sous surveillance : le commerce devient une arme.

Dalio ou le réveil du politique

Ray Dalio, dans le livre qu’il vient de publier, How Countries Go Broke, souligne un changement radical : ce ne sont plus les marchés mais les États qui veulent dicter la valeur de la monnaie et les règles du jeu. Il alerte sur le danger d’un cocktail explosif : dette publique colossale, rivalités géopolitiques, polarisation intérieure.

La guerre des chaînes d’approvisionnement

L’industrie devient un territoire à défendre. L’Inflation Reduction Act aux États-Unis, les restrictions chinoises sur les terres rares ou les plans européens pour la souveraineté numérique montrent que les supply chains ne sont plus neutres. Chaque entreprise est sommée de « choisir son camp ».

L’entreprise, otage ou soldat ?

Les grandes entreprises multinationales doivent désormais arbitrer entre marchés, valeurs et pressions étatiques. Elles ne peuvent plus se contenter d’optimiser leurs coûts et leur chaîne de valeur. Leur responsabilité s’élargit : sécurité nationale, souveraineté technologique, patriotisme économique.

Capitalisme responsable ou patriotisme stratégique ?

Le rejet croissant aux États-Unis des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance ne traduit pas un simple retour au culte exclusif de l’actionnaire. Il signale plutôt une reconfiguration des priorités : aux côtés des consommateurs et des salariés, la sécurité nationale, la souveraineté énergétique ou les valeurs patriotiques deviennent des parties prenantes à part entière.

Un impératif de lucidité stratégique

Nous sommes entées dans une nouvelle phase de l’économie mondiale où chaque conteneur peut être bloqué, les flux d’information surveillés, des câbles sous-marins sectionnés, des sources de matière premières coupées, et chaque maillon logistique utilisé comme levier de pression. Dans ce monde-là, piloter une entreprise sans grille de lecture géoéconomique revient à avancer à l’aveugle dans un champ de mines.

À la moindre erreur d’anticipation, la chaîne de valeur peut se rompre brutalement — rupture d’approvisionnement, embargo technologique, guerre des normes — et déclencher une riposte économique sans sommation. Ignorer ces enjeux n’est plus une option. Mais c’est un vrai défi stratégique pour les entreprises

Annexe – Références
• Gillian Tett, La nouvelle ère de la géoéconomie, Financial Times, 12 juillet 2025.
• Ray Dalio, How Countries Go Broke, 2024.
• Edward Luttwak, From Geopolitics to Geo-Economics, The National Interest, 1990.

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