Toutes les frontières doivent avoir des zones tampons

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L’armée israélienne opère dans la zone tampon entre Israël et la Syrie

Toutes les frontières doivent avoir des zones tampons

La stratégie israélienne redéfinie

Le 7 octobre 2023 a marqué un tournant stratégique pour l’armée israélienne. Presque deux ans plus tard, le chef d’état‑major, le lieutenant‑général Eyal Zamir, vient de présider une session exceptionnelle réunissant l’ensemble du haut commandement. Objectif : réévaluer de fond en comble la doctrine de défense nationale. Il en ressort une conviction : à l’avenir, toutes les frontières d’Israël devront disposer d’une zone tampon clairement définie, et la protection du territoire se fera d’abord par l’initiative offensive.

Des ceintures de sécurité sur chaque front
Jusqu’ici, Israël appliquait cette logique principalement à Gaza, au Liban et en Syrie. Le principe est simple : créer une profondeur stratégique où les forces hostiles ne peuvent s’installer ni amasser de moyens. L’armée reconnaît cependant que la situation diffère avec l’Égypte et la Jordanie : les traités de paix conclus respectivement en 1979 et 1994 limitent les effectifs militaires égyptiens près du Sinaï et instaurent un statu quo relativement stable à l’est. Pourtant, des incidents ponctuels — infiltrations de contrebandiers, tentatives terroristes — rappellent que ces frontières ne sont pas hermétiques.

« La meilleure défense, c’est l’attaque »
La deuxième inflexion majeure est d’ordre opérationnel : Tsahal recourt désormais systématiquement à l’attaque préventive pour répondre à ses besoins défensifs. Concrètement, cela signifie des frappes régulières pour empêcher les groupes adverses de reconstruire leurs stocks d’armes ou de prendre de nouvelles positions. À Gaza, cette politique vise à empêcher le Hamas de retrouver ses capacités militaires ; au Liban, elle cherche à repousser le Hezbollah au‑delà du sud du pays ; en Syrie, elle consiste à frapper ponctuellement plus en profondeur pour perturber la coopération irano‑syrienne. Chaque théâtre impose donc un niveau de pression différent, mais la logique reste la même : attaquer avant d’être attaqué.

Des critères de réussite différenciés
Avant octobre 2023, l’état‑major admettait qu’une victoire décisive contre ses ennemis était improbable ; le but se limitait à rétablir la dissuasion lors d’escalades brèves. Cette approche a changé. Tsahal établit désormais des objectifs spécifiques à chaque front :

Gaza : empêcher tout retour du Hamas en tant qu’autorité militaire.
Sud‑Liban : maintenir le Hezbollah hors de la zone frontalière et réduire sa marge de manœuvre plus au nord.
Syrie : interdire toute présence régulière de l’armée syrienne ou d’unités pro‑iraniennes dans la zone tampon, en gardant la possibilité de frapper plus loin si nécessaire.
Houthis au Yémen et Iran : définir des politiques à long terme, notamment sous l’égide du nouveau commandement de profondeur dirigé par le général de division Dan Goldfus.
Cette gradation permet de concentrer les moyens là où la menace est la plus immédiate tout en évitant un engagement total sur plusieurs fronts simultanés.

Dimension juridique et diplomatique
L’établissement officiel de zones tampons soulève inévitablement des questions de droit international. Les accords de Camp David limitent par exemple le déploiement égyptien dans le Sinaï ; toute modification de ces dispositions nécessiterait une renégociation difficile. Avec la Jordanie, la vallée du Jourdain joue déjà ce rôle de tampon naturel, mais elle ne protège pas les petites localités israéliennes disséminées plus au sud. Enfin, l’activité offensive proactive impose une veille diplomatique constante pour prévenir des tensions avec Moscou à propos de la Syrie ou avec Washington lorsque les frappes dépassent un certain seuil.

Un défi logistique et humain
Mettre en place des zones tampons permanentes implique plus que des cartes et des déclarations : il faut entretenir des routes, bâtir des postes avancés, déployer des radars et, surtout, conserver des unités aguerries capables de manœuvrer rapidement. Dans un contexte de mobilisation prolongée depuis 2023, la question du relief des réservistes devient cruciale. Le haut commandement devra équilibrer l’exigence opérationnelle avec la fatigue des soldats et la pression économique sur la société civile.

Perspectives : une doctrine fluide
En adoptant cette stratégie, Tsahal entérine une doctrine qu’elle pratiquait déjà partiellement : frapper loin pour sécuriser près. La nouveauté réside dans la formalisation et l’universalisation de cette approche sur tous les fronts, qu’ils soient chauds ou théoriquement paisibles. Si les zones tampons offrent une marge de sécurité physique, l’option offensive permanente laisse entendre qu’Israël entend rester maître du tempo, sans attendre qu’une menace mûrisse pour réagir.

Reste à voir comment cette doctrine s’adaptera à des adversaires qui, eux aussi, ajustent leurs tactiques : missiles à longue portée, drones low‑cost, cyber‑attaques. L’histoire militaire enseigne qu’aucune ligne défensive, aussi ambitieuse soit‑elle, ne suffit indéfiniment ; mais pour les stratèges de Tsahal, prendre l’initiative demeure, pour l’heure, le meilleur pari.

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