Balagan politique. La Knesset part en vacances tranquillement. Netanyahou aura 3 mois de repos (!) jusqu’en octobre

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La décision des partis orthodoxes Judaïsme de la Torah et Shas de quitter le gouvernement Netanyahou est l’aboutissement d’une crise en grande partie artificielle. Explication : tandis que les orthodoxes ashkénazes (Judaïsme de la Torah) ont pris les devants en démissionnant à la fois du gouvernement et de la coalition, le parti sépharade Shas a choisi un compromis : quitter le gouvernement, mais rester dans la coalition. Et ce n’est certainement pas un hasard.

Cette posture mi-figue mi-raisin reflète le dilemme cornélien dans lequel s’est trouvé le leader de Shas, Arié Derhy : d’un côté, son attachement à ses alliés ashkénazes de toujours ; de l’autre, sa volonté farouche de ne pas trahir Benjamin Netanyahou. En maintenant Shas dans la coalition, Derhy envoie un signal politique fort tout en préservant à Netanyahou une majorité de 61 députés, soit une légitimité parlementaire intacte. Bref, Judaïsme de la Torah et Shas ont joué la carte du coup d’éclat… sans jamais risquer de faire tomber un gouvernement qui demeure, pour eux, la seule option politique crédible. Désormais la Knesset peut partir en vacances tranquillement. Benjamin Netanyahou aura 3 mois jusqu’à la fin octobre pour tenter de rédiger une loi qui puisse satisfaire les orthodoxes sans fâcher le reste de son électorat traditionnel.

2. Il n’en reste pas moins que les partis orthodoxes méritent pleinement le prix de l’ingratitude et de la “houtzpa” (du toupet), pour avoir choisi ce moment — en pleine guerre — pour quitter le gouvernement, et ce, sur un dossier aussi central que celui de l’enrôlement des élèves des yechivot (écoles talmudiques) dans Tsahal.

Ce geste renforce le malaise d’une partie croissante de la population israélienne face à l’attitude de ces partis : leur refus catégorique — et inacceptable — de participer à l’effort de guerre. Une position qui sonne comme une gifle pour l’ensemble des soldats engagés dans la bande de Gaza depuis des mois, et plus encore pour les réservistes et les soldats qui, dans leur vie civile, étudient ou enseignent eux aussi la Torah.


3. Les partis orthodoxes ne sont toutefois pas les seuls à blâmer. Il est temps de pointer un doigt accusateur en direction de Yuli Edelstein, président de la Commission de la Défense à la Knesset, et membre du Likoud, à qui l’on avait confié la rédaction du projet de loi.

Depuis près d’un an, Edelstein n’a cessé de pousser les orthodoxes dans leurs retranchements : augmentation des quotas annuels d’enrôlement, durcissement des sanctions personnelles et institutionnelles contre les élèves refusant de s’enrôler, ou contre les yéchivot refusant les contrôles de présence. Il se défend en expliquant qu’il fallait forcer les orthodoxes à répondre aux convocations. Mais dans les faits, il a savouré la scène de Netanyahou s’agitant ces derniers jours pour gérer la crise. Car Edelstein n’a pas oublié l’humiliation que lui a infligée Netanyahou il y a trois ans, lorsqu’il lui a refusé un portefeuille ministériel. Pour lui, la vengeance est un plat qui se mange froid.

Durant la pause parlementaire, Netanyahou pourrait bien mettre fin à cette saga en remplaçant Edelstein par un autre député du Likoud, plus loyal — Boaz Bismuth est pressenti — et plus souple dans l’élaboration d’une loi acceptable pour les formations orthodoxes.

4. Sur cette fameuse loi, il faut aussi dénoncer l’attitude d’une partie des médias israéliens, qui induisent sciemment le public en erreur par l’usage d’une terminologie biaisée. Parler de « loi des réfractaires au service militaire » est non seulement inexact, mais trompeur. Pour la première fois dans l’histoire d’Israël, une loi va officialiser l’enrôlement de milliers d’élèves des yechivot.

Certes, beaucoup seront dispensés — en particulier ceux qui étudient sérieusement — mais des milliers d’autres porteront l’uniforme de Tsahal dans les années à venir, transformant ainsi en profondeur l’équilibre entre monde religieux et armée. Il est regrettable que les médias passent sous silence cette évolution historique, uniquement par hostilité envers les partis orthodoxes.

5. Enfin, il faut souligner un point essentiel. Ceux qui suivent depuis plusieurs décennies le parcours du parti Shas constateront, avec une certaine amertume, que ce dernier se retrouve une fois de plus à la remorque des orthodoxes ashkénazes. Et c’est particulièrement regrettable dans le contexte actuel, car Shas avait une occasion unique de se démarquer de l’intransigeance de Judaïsme de la Torah.

Shas pouvait démontrer qu’il n’était pas inféodé à cette formation, qu’il avait sa propre vision — plus ouverte, moins rigide — du rôle des religieux dans la société israélienne. La guerre offrait à Shas une chance rare de déclarer : « Notre électorat sert dans Tsahal. Beaucoup de nos jeunes combattent à Gaza. Nos députés ont servi, certains dans des unités combattantes — comme le député francophone Yossi Taïeb. Nous continuerons de valoriser l’étude de la Torah, mais en temps de guerre, il faut aussi savoir combattre. »

Un tel message aurait trouvé un écho bien au-delà de son électorat traditionnel, jusqu’aux rangs du sionisme religieux. Au lieu de cela, la direction de Shas a choisi un compromis purement politique, entre retrait du gouvernement et maintien dans la coalition. Elle aurait dû défendre un autre compromis, bien plus noble : une main sur la Torah, l’autre sur le fusil.

Il est profondément regrettable qu’Arié Derhy n’ait pas su entendre ce que ressent son électorat. Et il est encore plus navrant que, plus de 40 ans après avoir fondé le parti Shas avec le rav Ovadia Yossef et le rav Menahem Cha’h, celui qui demeure l’un des hommes politiques les plus brillants d’Israël reste encore aujourd’hui aussi dépendant des formations orthodoxes ashkénazes.

I24NEWS. DANIEL HAIK.

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