Triste jour pour la France qui perd définitivement le contrat du siècle à 25,8 milliards d’euros en République tchèque dans le nucléaire civil
- La France perd une bataille à 25,8 milliards d’euros dans son domaine de prédilection : le nucléaire civil
- La France s’allie au Canada pour renforcer ses positions sur un marché à 4 000 milliards d’euros d’ici 2050 : les réacteurs nucléaires
La compétition féroce autour du futur réacteur nucléaire tchèque débouche sur une amère défaite pour la France
L’enjeu était à la hauteur de l’intense bataille avec la construction d’un nouveau réacteur à la centrale de Dukovany, dans le sud-est de la République tchèque. Un contrat à plus de 8 milliards d’euros dans un pays où le nucléaire fournit un tiers de l’électricité.
Face à EDF et à l’américain Westinghouse, KHNP a raflé la mise. L’entreprise publique sud-coréenne a proposé non seulement un prix imbattable, mais aussi un calendrier de livraison strict et garanti. Le tout, dans un secteur où chaque chantier est synonyme de dépassements budgétaires et de retards chroniques.
EDF conteste, mais le droit s’efface devant la sécurité nationale
Furieuse, EDF a contre-attaqué. Motif : le soupçon d’une aide d’État déguisée pour KHNP, ce qui violerait les règles de concurrence de l’Union européenne. Le problème, c’est que l’appel d’offres était classé « secret défense » en République tchèque. Ce statut met automatiquement le dossier à l’abri des recours administratifs classiques.
En avril 2025, la plainte d’EDF est rejetée par l’autorité tchèque de la concurrence. Le géant français a voulu tenter une dernière manœuvre : un recours en urgence auprès du tribunal régional de Brno. Une injonction est obtenue le 6 mai, la veille de la signature du contrat. La procédure est gelée… mais l’accalmie ne dure que quelques jours.
Le 7 juin, la Cour suprême administrative lève l’injonction. Le contrat entre KHNP et Elektrárna Dukovany II est signé dans la foulée.
Le 25 juin, le rideau tombe sur la plainte française
Le 25 juin, le dernier espoir juridique est donc tombé à Brno. Le tribunal a confirmé que le statut “sécurité nationale” excluait toute contestation.
L’affaire est malheureusement entendue cette fois : la République tchèque a le droit de choisir son partenaire sans se justifier, et la voie judiciaire est désormais épuisée.
Un porte-parole de l’entreprise française confirme : aucune autre procédure locale ne sera lancée. L’affaire pourrait cependant ne pas être complètement enterrée : la Commission européenne a ouvert une enquête préliminaire, cette fois sous l’angle des subventions étrangères illicites.
KHNP affirme que sa candidature respecte pleinement les règles et que le règlement européen sur les subventions n’est entré en vigueur qu’après le lancement de l’appel d’offres.
Bruxelles devra trancher.
Le marché perdu pourrait dépasser les 25 milliards d’euros
Contrairement à ce que laisse penser la seule signature du réacteur de Dukovany II, le contrat perdu par EDF ne se limite pas aux “seuls” 8 milliards d’euros de ce dernier.
En réalité, le projet global tchéco-coréen prévoit la construction de quatre réacteurs nucléaires : un second à Dukovany, et deux autres à Temelín. Ce virage stratégique, annoncé par le gouvernement tchèque à l’automne 2023, repose sur un principe de rationalisation : commander en série pour économiser environ 25 % sur les coûts globaux.
Ainsi la valeur totale du marché pourrait atteindre près de 25,8 milliards d’euros, selon les estimations basées sur le coût unitaire initial. Autrement dit, la France a perdu un quart de siècle de contrats potentiels dans son secteur d’excellence, le nucléaire civil. Ce revers dépasse largement le seul échec commercial : il prive aussi EDF d’un effet d’échelle pour relancer l’exportation de son EPR1200 en Europe centrale, alors même que les pays voisins (Slovaquie, Pologne, Hongrie) observent de près les décisions de Prague.
La Corée du Sud en conquête nucléaire mondiale
Ce contrat tchèque s’inscrit dans une offensive plus large de KHNP sur la scène nucléaire internationale. Son réacteur APR-1400, déjà déployé aux Émirats arabes unis (centrale de Barakah), fait des émules : la Corée du Sud a également décroché des accords en Égypte et en Pologne.
Un duel d’influence plus qu’un simple contrat
Derrière la défaite commerciale, il y a surtout l’amer sentiment d’une défaire diplomatique de Paris contre Séoul sur un secteur qui a toujours été la chasse gardée de la France, a moins sur le vieux continent.
L’atome voit émerger un nouveau champion asiatique, qui combine rigueur industrielle et diplomatie offensive. Avec cette victoire, la Corée du Sud impose son savoir-faire au cœur de l’Europe centrale.
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