La carrière politique de Netanyahou s’est construite précisément sur des moments où il a su retrouver le devant de la scène. À la veille de l’opération, sa situation politique était au plus bas ; elle s’est aujourd’hui considérablement améliorée, mais les anciens défis n’ont pas disparu, mais vont changer de nature.
L’attaque américaine contre l’Iran, qui semblait ce matin presque une simple invention, porte également un lourd fardeau politique. Le Premier ministre Benjamin Netanyahou, qui a jusqu’à récemment mené la campagne électorale la plus difficile de son histoire, après le terrible massacre du 7 octobre, a enregistré hier soir un revirement de situation significatif.
À la veille de l’opération, la situation politique de Netanyahou était désastreuse. L’agenda public tournait autour de la question de la conscription des Haredim, qui menaçait de briser la coalition et renforçait le sentiment d’inégalité parmi de nombreux segments de la population, y compris au sein du camp national. Cette question a créé une fracture interne au sein du Likoud et a exacerbé les écarts de valeurs, précisément au plus fort de la guerre.
La semaine dernière, depuis l’attaque israélienne jusqu’à l’intervention américaine hier soir, sa situation politique s’est considérablement améliorée. Netanyahou a retrouvé un terrain où il s’est toujours senti à l’aise : la sécurité nationale. Après des décennies de lutte acharnée, politique, informationnelle et sécuritaire, au cours desquelles beaucoup l’ont raillé et l’ont accusé de délire ou d’exagérer, Netanyahou renoue avec son image de « Monsieur Sécurité ». Aux yeux de ses partisans, il est redevenu le seul dirigeant capable de faire face à la menace iranienne. Il a su être la stratège d’Israël qui a changé la face du Moyen-Orient en terrassant le serpent iranien.
L’exploit qu’il a réalisé ce matin, avec le soutien public du président Donald Trump à l’opération, est non seulement un exploit politique pour l’État d’Israël, mais aussi un véritable exploit personnel pour Netanyahou. Sa relation personnelle avec Trump, déjà maintes fois saluée, s’est avérée florissante. Cela n’aidera pas Yaïr Lapid, le chef de l’opposition, qui a récemment déclaré à la Knesset que « Netanyahou ne comprend plus l’Amérique et Trump ». Ce matin, nous avons reçu un cinglant démenti.
L’opération de Netanyahou contre l’Iran n’a pas seulement renforcé la coalition. Netanyahou a reçu le soutien sans réserve des dirigeants des partis d’opposition, qui ont également fait preuve de courage politique, soutenu le gouvernement et l’armée à chaque instant et ont donné l’impression, pendant un instant, que le mot unité avait un sens profond. Qu’il s’agisse de son rival acharné Avigdor Lieberman, qui, dès le premier jour de l’opération, a déclaré soutenir Netanyahou, ou de Yaïr Lapid, qui, interrogé ce matin lors d’une interview pour savoir si Netanyahou ne le mettait pas au défi de tirer un profit politique de cette opération, a répondu que les sondages sont moins intéressants ce matin alors que quelque chose de positif est arrivé à l’État d’Israël.
Les défis qui n’ont mené nulle part.Mais Netanyahou est encore loin d’une trêve. Les combats à Gaza se poursuivent et le front sud n’a pas encore atteint la « victoire totale », selon la définition répétée du Premier ministre. Le Hamas, malgré les coups qu’il a subis, n’a pas encore été complètement vaincu. Pire encore, les personnes enlevées sont toujours détenues par les meurtriers à Gaza. Tant qu’elles y seront, il sera difficile pour Netanyahou d’établir un récit de victoire.
D’autres obstacles se dressent sur la scène nationale. La loi sur la conscription, qui menaçait de mener le pays à des élections à la veille de l’opération, est toujours bloquée. Malgré des avancées de principe avec les Haredim et le président de la Commission des affaires étrangères et de la défense, Yuli Edelstein, le chemin vers une législation est encore long. La population Haredi comprend qu’en temps de guerre, il vaut mieux faire preuve de retenue, mais il est absolument certain que le lendemain, elle exigera ce qui lui a été promis. La pression reviendra et la lutte politique reprendra.
La carrière politique de Netanyahou s’est construite sur des moments comme celui-ci : lorsqu’il semble acculé au pied du mur, il trouve le moyen de revenir au centre de l’arène. Aujourd’hui encore, il parvient à transformer une mesure sécuritaire en un atout pour son image. Mais la bataille est loin d’être gagnée : aucune décision n’a encore été prise à Gaza, et les alliances qui maintiennent la coalition sont fragiles. Fort de ses succès, Netanyahou pourrait bien vouloir en récolter les fruits et organiser des élections prochainement.
Israël puissance mondiale.
Le nouveau statut d’Israël en tant que puissance mondiale transforme radicalement son image. Jadis perçu comme un « mauvais élève » que certaines puissances cherchaient à isoler ou sanctionner, Israël s’impose désormais comme un État auquel on doit le respect. Sa voix comptera sur la scène internationale, et il ne pourra plus être mis sur le même plan que les citoyens arabes des territoires.
Le conflit israélo-palestinien sera désormais perçu sous un autre angle : celui d’une grande puissance mondiale face à une population arabe vivant sur son territoire. Cette nouvelle perception modifiera profondément les équilibres, d’autant plus que de nombreux pays arabes chercheront à établir des relations pacifiques avec Israël. Cela affaiblira davantage la position des Palestiniens, d’autant qu’Israël bénéficiera du soutien de Donald Trump.
Concernant les otages, le Hamas, jusqu’ici aligné sur les directives de Téhéran, pourrait revoir sa position. L’espoir d’une libération des otages semble aujourd’hui plus tangible.
Tout cela est en partie le résultat de la politique de Netanyahou, et personne ne pourra contester la qualité de sa politique. Il sera l’un des plus grands premiers ministres d’Israël.
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