Guerre Israël-Iran: ce que disent les pays de l’UE? Analyse

Vues:

Date:

Le bilan européen: Pourquoi les pays de l’UE restent-ils silencieux face à l’attaque contre l’Iran ?

L’opération « Am Kalavi » a conduit à une certaine diminution des critiques européennes à l’égard d’Israël, car sur le continent, les gens ont le sentiment qu’Israël « fait le travail à leur place ».  Cependant, à Jérusalem, il est clair que le conflit sur ce qui se passe dans la bande de Gaza est inévitable.

Nissan Strauchler

Jusqu’à il y a quelques jours, la dérive diplomatique contre Israël en Europe continentale menaçait de donner lieu à d’importantes contre-mesures concernant les relations commerciales, la recherche et toute coopération entre Israël et l’Union européenne. Parallèlement, des pays européens non membres de l’Union européenne ont même imposé des sanctions aux ministres Bezalel Smotrich et Itamar Ben-Gvir.

La pression européenne sur Israël pour qu’il fournisse une aide humanitaire afin de prévenir la famine. Le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, a même lancé une campagne d’endiguement réussie en Allemagne, qui a exprimé son engagement envers Israël tout en exigeant la poursuite de l’acheminement de l’aide humanitaire.

Le ministre des Affaires étrangères Gideon Saar et le ministre allemand des Affaires étrangères Johannes Weddepol lors d'une conférence de presse à Jérusalem, Oren Ben HakonLe ministre des Affaires étrangères Gideon Saar et le ministre allemand des Affaires étrangères Johannes Weddepol lors d’une conférence de presse à Jérusalem, photo : Oren Ben Hakon

La situation délicate dans laquelle se trouve Israël a donné lieu à des frictions sur deux fronts. Le premier, dans les jours à venir, a eu lieu lors d’une conférence organisée par le président français Emmanuel Macron avec l’Arabie saoudite, au cours de laquelle le président français entendait promouvoir la reconnaissance de facto d’un État palestinien.
Ces derniers jours, la France a pris conscience de l’opposition des États-Unis à la conférence, la rendant ainsi purement symbolique. Elle a néanmoins tenté d’inciter d’autres pays à reconnaître un État palestinien afin de créer une dynamique favorable à l’initiative franco-saoudienne de deux États pour deux peuples.

Le deuxième front, très important, était attendu le 23 juin lors de la réunion du Conseil européen, à laquelle participeront les ministres des Affaires étrangères de tous les pays de l’UE.
À ce stade, il n’est pas encore certain que le rapport visant à examiner si Israël commet des violations des droits de l’homme dans la guerre à Gaza sera effectivement présenté lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères. Même s’il l’est, il est clair qu’il ne sera pas possible de voter sur des sanctions immédiates contre Israël.
Cependant, la crainte en Israël était que le rapport conclue à une violation des droits de l’homme et que cette conclusion soit suffisamment « aiguë » pour ouvrir la voie à l’application de sanctions à Israël, même sans un consensus total des 27 pays de l’UE.

En Israël, on craint que ce rapport, dont la validité pourrait conduire à une situation où une partie de la coopération de l’UE avec Israël serait soumise à un vote spécial dans un avenir proche. Une majorité de pays représentant les deux tiers de la population du continent suffirait alors à compromettre une partie de la coopération avec Israël.  Puis, quelques jours avant ces tests importants, l’attaque contre l’Iran a provoqué une escalade inquiétante pour les pays européens, mais a également servi des intérêts importants pour les dirigeants de l’Union européenne et des pays européens.

Que dit l’Europe ?

Les principaux pays européens sont l’Allemagne, la Grande-Bretagne et la France. Cette dernière, qui a tenté de promouvoir la conférence pour la reconnaissance d’un État palestinien et a vivement critiqué Israël ces dernières semaines au sujet de la guerre à Gaza, a déjà annoncé qu’elle contribuerait à la défense d’Israël en cas d’attaque, comme elle l’a fait lors des deux précédentes attaques iraniennes l’année dernière.
Israël et la France ont attaqué l’Iran alors que l’administration Macron est confrontée à une nouvelle crise, dans le contexte de la guerre à Gaza. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Brut, a déclaré que la France n’avait pas participé à l’attaque et ne la soutenait pas, et qu’elle appelait également à la retenue et à la prévention de l’escalade.
Il a également déclaré : « Nous avons exprimé à maintes reprises nos profondes préoccupations concernant le programme nucléaire iranien, notamment dans la résolution récemment adoptée par l’Agence internationale de l’énergie atomique. Nous renforçons le droit d’Israël à se défendre contre toute attaque. »

Va-t-il intensifier les mesures contre Israël ? Macron, ADPMacron va-t-il intensifier les mesures contre Israël ? Photo : ADP

La Grande-Bretagne, dirigée par le Parti travailliste, qui représente le centre politique de gauche britannique, a été l’une des critiques les plus virulentes d’Israël ces dernières semaines et a même annoncé des sanctions contre des ministres israéliens. Le Royaume-Uni, qui a également refusé certains permis d’exportation d’armes vers Israël, n’a pas été prévenu à l’avance par Israël de cette offensive contre l’Iran, qui constitue une sorte de déclaration de Jérusalem sur la détérioration des relations entre les deux pays. Malgré les appels britanniques à une solution diplomatique au conflit entre les parties, celles-ci n’ont pas été promptes à condamner Israël. « Les informations faisant état d’attaques sont inquiétantes. Nous appelons toutes les parties à prendre du recul et à baisser le ton. L’escalade ne sert personne dans la région, et le rétablissement de la stabilité au Moyen-Orient doit être la priorité absolue. L’heure est à la retenue et au retour à la diplomatie », a déclaré le Premier ministre britannique Keir Starmer, qui a ajouté qu’il soutenait, avec la France et l’Allemagne, le droit d’Israël à se défendre. Il convient de noter que cette fois-ci, la Grande-Bretagne n’a pas participé à l’interception des menaces contre Israël, contrairement aux attaques précédentes de l’Iran contre Israël où la Grande-Bretagne a participé à l’assistance défensive contre les attaques de missiles contre Israël.

L’Allemagne, bastion stratégique d’Israël en Europe et l’un de ses principaux fournisseurs d’armes, a publié des déclarations de soutien, indiquant que le nouveau gouvernement dirigé par le chancelier Friedrich Merz continue de soutenir Israël. Il est vrai que même au sein de la nouvelle coalition, composée de partis de droite et de gauche du centre politique, des critiques à l’égard d’Israël sont formulées dans le contexte palestinien, mais pour ce qui est du chancelier Merz et du ministre des Affaires étrangères Johann Waddepol, le soutien à Israël se manifeste également publiquement. Après l’attaque, le chancelier Merz a publié un message sur X Network, dans lequel il reconnaissait que le Premier ministre israélien l’avait informé de l’attaque et qu’« Israël a le droit de défendre son existence et ses citoyens ». Le chancelier a ajouté que « l’Allemagne a exprimé à plusieurs reprises ses inquiétudes concernant le programme nucléaire iranien ces dernières années ».

Les trois pays ont publié aujourd’hui une déclaration selon laquelle ils sont « prêts à discuter avec l’Iran pour calmer la situation », le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Waddepaul déclarant que « l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne sont prêtes à tenir des discussions avec l’Iran concernant son programme nucléaire – dans un effort pour calmer la situation au Moyen-Orient. »

Pourquoi l’Europe est-elle relativement calme ?

D’une manière générale, l’Europe a adopté ces derniers jours une politique très prudente et équilibrée concernant la guerre Iran-Israël. Le sentiment négatif envers Israël a été abandonné pour l’instant, pour la simple raison que l’Europe comprend qu’Israël porte atteinte à l’axe oriental qui menace l’Europe, et aussi parce que de nombreux musulmans en Europe ne protestent pas contre les atteintes à l’Iran. Ils se réjouissent même que le mouvement chiite ait été touché, tandis que l’attention portée à la guerre à Gaza s’estompe temporairement. « Les dommages causés par Israël à l’Iran profitent à l’Europe, car les dirigeants européens sont conscients que les missiles iraniens peuvent atteindre les capitales du continent et que l’Iran est un élément important de l’axe qui opère contre l’Occident. Il convient également de souligner que plus l’Iran est faible, plus la Russie l’est aussi, car l’Iran est devenu un soutien essentiel de la Russie dans la guerre contre l’Ukraine. Plus l’Iran a besoin d’armes pour lui-même, moins ses armes parviennent en Russie et, de là, en Ukraine », explique le Dr Emmanuel Navon, maître de conférences en relations internationales à l’Université de Tel-Aviv et chercheur principal à l’Institut de stratégie et de sécurité de Jérusalem.

Champignon fumant à Téhéran, réseaux arabesfumée à Téhéran, photo : Arab Networks

Attaquer l’Iran pourrait indirectement favoriser la fin de la guerre en Ukraine, ce qui est dans l’intérêt de l’Europe occidentale. Nous constatons également qu’à l’exception des penseurs extrémistes et des manifestants anti-israéliens, le ton entendu dans les capitales européennes est équilibré et non anti-israélien. Après tout, en 1981, après le bombardement du réacteur nucléaire irakien, la plupart des pays nous ont condamnés, mais aujourd’hui, presque tous les pays occidentaux évoquent le droit d’Israël à se défendre, y compris ceux qui nous ont vivement critiqués récemment. Nous avons déjà compris qu’on ne peut pas faire confiance à la Grande-Bretagne, et quant à la France, on ne sait pas si Macron agit avec hypocrisie ou s’il ne comprend tout simplement pas la situation au Moyen-Orient. Quoi qu’il en soit, ces pays ne nous remercieront pas publiquement d’avoir fait le sale boulot pour eux ; après tout, ils ne s’opposeraient pas à l’Iran. Donc, pour l’instant du moins, ils ne défendent pas et ne font pas pression sur Israël. Il est toutefois probable que cela change par la suite.

Selon le Dr Maya Zion Tzedekiyahu, du Forum européen de l’Université hébraïque et directrice du programme Relations Israël-Europe à l’Institut Mitvim, l’Europe surveille de près le comportement des États-Unis dans cette guerre. « Il y a plus qu’un triangle Israël-Iran-Europe. La question de savoir si l’administration Trump interviendra militairement est un indicateur important entre la tendance de certains membres de l’administration à s’isoler et son engagement envers ses alliés politiques et militaires. Il est désormais clair que Trump a participé à la tromperie en coopérant avec Netanyahou. L’Europe voit que les États-Unis soutiennent Israël, mais fixe également des limites à ce soutien et s’efforce de comprendre la bonne conduite à adopter. »

« Le président a été clair : ils ne peuvent pas posséder d’armes nucléaires. » Donald Trump, président des États-Unis, AP« Le président a été clair : ils ne peuvent pas posséder d’armes nucléaires. » Donald Trump, président des États-Unis. Photo : AP

Le Dr Zion Tzedekiah explique que les déclarations de l’Allemagne témoignent d’un fort soutien à Israël. Le deuxième soutien, prêt à défendre activement la sécurité d’Israël – une fois de plus contre l’Iran – est la France. Contrairement aux Britanniques, cette fois-ci indécis, les Britanniques pourraient être intéressés par le comportement du président américain et par la définition d’une position plus claire, alors qu’en Grande-Bretagne, la pression du Parti travailliste ne joue pas forcément en faveur d’Israël. Concernant l’Union européenne, Kaia Kallas, Haute Représentante pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, a publié une déclaration appelant à la retenue et à l’apaisement des tensions. Cette déclaration est toutefois relativement tiède et reflète la préoccupation générale pour la sécurité d’Israël, sans toutefois insister sur son droit à se défendre.

L’annonce de l’Union européenne inclut son opposition à la possession d’armes nucléaires par l’Iran. Cependant, outre les appels à la retenue envers Israël et à une solution diplomatique, il convient de noter que l’Union européenne a imposé de nombreuses sanctions à l’Iran, d’une part en raison de son projet nucléaire, et d’autre part en raison de l’aide apportée par l’Iran à la Russie, une aide qui menace l’Ukraine et les intérêts de l’Union européenne, qui soutient l’Ukraine et craint une future invasion russe d’autres pays du continent. Elle ne souhaite pas non plus une escalade régionale incontrôlable qui porterait préjudice à l’Europe, alors que la guerre détournerait l’attention de l’Ukraine et que le conflit y est toujours en cours. En revanche, il ne fait aucun doute qu’elle serait heureuse de voir l’Iran affaibli et son programme nucléaire, qui menace également l’Europe, éliminé », explique le Dr Shion Tzedekiah.

Dans les sondages d’opinion européens, Israël a atteint un creux significatif, mais un seul pays est dans une situation pire : l’Iran. Il faut rappeler que lors de la manifestation contre le hijab en Iran et des émeutes qui ont suivi, l’Europe a soutenu la contestation et les droits des femmes et des personnes, et que presque tout le monde était contre le régime iranien. Ainsi, même en Europe, on comprend le service qu’Israël rend à l’Occident dans la guerre actuelle.

Un succès israélien significatif pourrait temporairement atténuer les critiques envers Israël concernant la situation à Gaza, notamment autour du rapport qui sera bientôt présenté et qui examinera si Israël a violé les droits de l’homme. Cependant, l’Europe finira par revenir sur la question palestinienne. Du point de vue européen, la création d’un État palestinien est conforme à ses valeurs ; ainsi, outre la garantie de la sécurité d’Israël, les Palestiniens devraient se voir accorder un État. Ainsi, même si l’Europe fait preuve d’une certaine patience dans le conflit entre Israël et l’Iran, le prochain conflit sur la question palestinienne semble inévitable.

Source: ILH
JForum.fr

La rédaction de JForum, retirera d’office tout commentaire antisémite, raciste, diffamatoire ou injurieux, ou qui contrevient à la morale juive.

La source de cet article se trouve sur ce site

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici

PARTAGER:

spot_imgspot_img
spot_imgspot_img