Les occasions manquées d’Israël

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Les occasions manquées d’Israël

Le 7 octobre restera gravé comme une tragédie nationale d’une ampleur inédite pour Israël : le massacre de centaines de civils par le Hamas a marqué l’attaque la plus meurtrière contre les Juifs depuis l’Holocauste. Cette date incarne un double visage : celui de la défaite sanglante, mais aussi celui de changements géopolitiques majeurs dont Israël pourrait tirer profit — à condition de ne pas rester prisonnier de ses blocages internes.

L’auteur de cette analyse, ancien rédacteur en chef du Jerusalem Post, aujourd’hui chercheur au JPPI et co-auteur du livre à paraître While Israel Slept, examine comment les événements récents, bien que douloureux, pourraient marquer un tournant stratégique pour l’État hébreu.

Des bouleversements régionaux inattendus
Depuis octobre 2023, la région connaît une reconfiguration rapide. Le Hezbollah, longtemps fer de lance de l’influence iranienne au Liban, a essuyé des revers stratégiques sérieux. Le gouvernement libanais, désormais dirigé par le président Joseph Aoun, entreprend timidement mais clairement des actions pour freiner cette milice et limiter les ingérences de Téhéran.

En Syrie, un changement de régime a vu Ahmed al-Sharaa succéder à Bachar el-Assad. Malgré un passé trouble lié au djihadisme, le nouveau président syrien a publiquement laissé entendre sa volonté d’ouvrir un dialogue avec Israël. Un signal fragile, certes, mais inédit.

L’Iran, quant à lui, subit une pression militaire croissante. Les frappes israéliennes ont mis à mal son système de défense S-300, dévoilant des failles jusque-là cachées. Et à Gaza, bien que la guerre se prolonge sans issue claire, le Hamas est aujourd’hui considérablement affaibli, loin de sa force d’avant le 6 octobre.

Le silence israélien face aux ouvertures
Malgré ce contexte, le gouvernement israélien semble figé. Là où il pourrait engager des démarches exploratoires, voire tendres quelques perches diplomatiques, il préfère s’enfermer dans le silence ou dans des slogans rigides.

En Syrie, par exemple, les signaux du président Sharaa mériteraient au moins une réponse mesurée. Même s’il faut rester vigilant, ignorer toute tentative de normalisation pourrait se révéler contre-productif. Au Liban aussi, la dynamique anti-Hezbollah pourrait être soutenue en coulisses, renforcée diplomatiquement, encouragée. Or, Israël reste inerte.

Quant à Gaza, la poursuite du conflit sans communication claire sur un projet de reconstruction ou de sortie politique alimente la confusion. Même au sein de la population israélienne, des voix s’élèvent pour demander : « Jusqu’à quand ? » — et surtout, « pour quoi faire ? ». L’absence de discours structurant du gouvernement Netanyahou sur l’après-guerre laisse le champ libre à des figures radicales qui brouillent le message israélien à l’international.

L’isolement international grandit
Sur la scène diplomatique, l’usure du capital de sympathie est palpable. Les pays traditionnellement alliés d’Israël, comme le Canada, la France, l’Allemagne ou le Royaume-Uni, prennent de plus en plus leurs distances. Certains évoquent ouvertement des sanctions. D’autres soutiennent la reconnaissance d’un État palestinien. Entre Washington et Jérusalem, le dialogue devient difficile.

Cette rupture progressive aurait peut-être pu être évitée. Dès le départ, Israël aurait pu exposer une stratégie claire : une guerre défensive, certes, mais au service d’une solution politique. Ce discours n’a jamais été articulé, et le vide laissé a été comblé par les extrêmes.

Des occasions manquées en interne aussi
Israël ne rate pas uniquement des occasions à l’étranger. À l’intérieur de ses frontières, certaines tendances auraient pu ouvrir la voie à un nouveau contrat social.

En mai 2021, les tensions intercommunautaires avaient explosé dans plusieurs villes judéo-arabes. Pourtant, depuis le 7 octobre, malgré la guerre à Gaza, aucun soulèvement similaire n’a eu lieu. Les citoyens arabes israéliens, dans leur grande majorité, n’ont pas répondu par la violence. Au contraire, ils sont restés calmes, horrifiés eux aussi par les actes du Hamas. Voilà une opportunité précieuse pour renforcer l’intégration, rebâtir la confiance, investir dans l’avenir commun. Mais le gouvernement est resté muet.

Enfin, sur le front intérieur, une autre fracture menace : celle entre les ultra-orthodoxes et le reste de la population. Alors que des centaines de milliers d’Israéliens servent dans les rangs de Tsahal depuis presque deux ans, certains partis religieux exigent une exemption totale du service militaire. La menace d’un renversement du gouvernement plane si leurs revendications ne sont pas satisfaites. Ce déséquilibre, de plus en plus visible, exacerbe les tensions et la lassitude d’une population épuisée.

L’image d’une jeune soldate, priant doucement dans un train à destination de sa base, résume bien cette contradiction. Elle incarne l’engagement silencieux et sincère de nombreux Israéliens. À l’opposé, les manœuvres politiciennes de certains leaders religieux apparaissent comme un affront à ce dévouement quotidien.

Cet article est basé sur une tribune du Jerusalem Post signée par un ancien rédacteur en chef du journal, aujourd’hui chercheur au JPPI et co-auteur du livre While Israel Slept, à paraître.

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