« Cette Bible, écrite il y a environ 1 100 ans, revient aujourd’hui dans son foyer, au cœur de l’État juif. Dans des moments comme celui-ci, nous comprenons à quel point notre identité est intimement liée à la mémoire et au texte. »
« La Bible n’est pas seulement un livre ancien, c’est la bande originale de l’Histoire juive », a-t-il ajouté.
Le Codex Sassoon, la plus ancienne Bible hébraïque quasi complète au monde, exposée pour la première fois en permanence au Musée du peuple juif de l’ANU, à Tel Aviv, en mai 2025. (Crédit : Rossella Tercatin/Times of Israel)
« Il nous a accompagnés, soutenus face à nos ennemis, et il nous a offert des paroles d’espoir et de prière. »
Composé de 792 pages de parchemin reliées en un seul volume, le Codex Sassoon contient les 24 livres de la Torah. L’analyse de ses matériaux et de son écriture confirme qu’il avait été rédigé au début du 10ᵉ siècle, ce qui en fait l’un des plus anciens manuscrits bibliques connus à ce jour.
Plusieurs notes manuscrites disséminées dans le Codex Sassoon offrent un aperçu précieux de son passé riche au niveau historique.
L’une d’elles relate la vente du manuscrit par Khalaf ben Avraham à Yitzhak ben Yehezkel al-Attar, en présence de deux témoins. Les chercheurs estiment que la transaction avait eu lieu vers l’an 1000, même si l’inscription n’est pas datée.
Une autre note identifie le Codex comme étant la propriété de la synagogue de Makisin, qui correspondrait à l’actuelle Markada en Syrie.
Une inscription finale – qui avait été ajoutée au 14ᵉ siècle sur la dernière page – relate la destruction de la synagogue et confie le Codex à un homme nommé Salama ibn Abi al-Fakhr afin qu’il le conserve jusqu’à ce que le lieu de culte puisse être reconstruit.
Aucune information n’est disponible sur le sort qui avait été réservé au manuscrit pendant les 600 années qui avaient suivi. Il avait refait toutefois surface en 1929, lorsqu’il avait été proposé à David Solomon Sassoon, un collectionneur passionné, membre d’une éminente famille juive irakienne qui avait émigré à Londres depuis l’Inde. Sassoon avait acheté la Bible pour l’équivalent de 415 euros.
Dans les années 1970, plusieurs de ses descendants avaient vendu le Codex, qui avait été acheté par le British Rail Pension Fund. Il avait ensuite été acquis par un collectionneur privé, le banquier suisse Jacob (Jacqui) Safra. En 2023, le manuscrit était revenu sous les feux de la rampe lorsqu’il avait été vendu aux enchères chez Sotheby’s pour la somme de 38 millions de dollars. L’acheteur, Alfred H. Moses, ancien ambassadeur des États-Unis en Roumanie et président de l’American Jewish Committee (AJC), a finalement fait don de ce trésor historique à l’ANU.

Oded Revivi, PDG du Musée du peuple juif de l’ANU, s’exprimant lors d’un événement organisé pour inaugurer l’exposition permanente du Codex Sassoon, à Tel Aviv, le 29 mai 2025. (Crédit : Rossella Tercatin/Times of Israel)
« Mes défunts grands-parents, le rabbin Isaac Halevy Herzog et Rebbetzin Sarah Herzog, étaient des amis proches de la famille Sassoon », a rappelé le président Isaac Herzog dans un message vidéo diffusé pendant l’événement.
« Flora Sassoon, qui était la matriarche de cette famille et l’une des seules femmes au 19ᵉsiècle à diriger un empire économique, était une amie très chère de mes grands-parents et de mes arrière-grands-parents », a-t-il ajouté.
« Je crois que les Sassoon ont toujours voulu que cette Bible unique se trouve ici, à l’endroit même où le peuple juif a fondé son État-nation. »
Le président a rappelé comment, pendant Shavouot, le peuple juif célèbre le don de la Torah reçu de Dieu.
« C’est le cadeau de l’inspiration originelle qui a suscité un riche débat au sein de notre peuple depuis des millénaires », a souligné Herzog.
« Quel meilleur moment pour se souvenir du cadeau que représente cette inspiration ? Quel meilleur moment pour accueillir le Codex Sassoon ? »
L’ancienne otage Agam Berger, l’une des soldates de surveillance enlevées par le Hamas et relâchées lors d’un cessez-le-feu en janvier, se trouvait dans la salle en compagnie de sa mère, Meirav Berger.
En août 2024, l’ANU avait organisé un événement pour marquer le 20ᵉ anniversaire d’Agam alors qu’elle était encore en captivité. Comme la famille l’avait appris après sa libération, Agam avait vu par hasard une émission sur cet événement à la télévision alors qu’elle était encore à Gaza. C’était la première fois qu’elle voyait le visage de sa mère depuis sa capture.

De gauche à droite : Od Yehuda Rove, président des Amis du Musée du peuple juif de l’ANU, Oded Revivi, PDG de l’ANU, Agam Berger, ancienne otage, et sa mère Merav Berger lors de l’inauguration de l’exposition Codex Sassoon à l’ANU, le 29 mai 2025. (Crédit : ANU)
« Être ici aujourd’hui représente la fin d’un cycle », a déclaré Meirav, exprimant son espoir que les familles des 58 otages toujours retenus à Gaza puissent également retrouver leurs proches très rapidement.
« Le Codex Sassoon n’est pas seulement un manuscrit ; c’est un témoignage vivant de l’éternité de l’esprit juif qui a survécu aux guerres, aux incendies et aux croisades », a-t-elle ajouté.
« C’est la preuve que malgré tout, nous sommes là et que de la destruction naît une nouvelle croissance. »
Après la cérémonie, les participants ont pu admirer le Codex exposé, ouvert à la page contenant les Dix Commandements (Deutéronome 5, 6-21).
Un autre manuscrit de Sassoon en Israël : la Torah de Shem Tov
Le Codex Sassoon n’est pas la seule Bible ancienne ayant appartenu à Sassoon qui ait récemment trouvé un nouveau foyer en Israël.
Mercredi, la Bibliothèque nationale d’Israël (NLI) a annoncé que la Torah de Shem Tov, datant du 14ᵉ siècle, sera exposée en permanence dans son siège de Jérusalem, grâce à un prêt à long terme des philanthropes Terri et Andrew Herenstein, qui avaient acheté cet artefact chez Sotheby’s en 2024.
Le manuscrit enluminé avait été achevé par le rabbin Shem Tov ben Abraham Ibn Gaon au début du 14ᵉ siècle en Espagne. Le savant avait emporté la Bible avec lui lors de son voyage en Israël en 1312. Pendant 300 ans, le manuscrit était resté dans la région avant d’être transporté en Afrique du Nord au 17ᵉ siècle.

La Torah de Shem Tov, datant du 14ᵉ siècle, a été exposée à la Bibliothèque nationale d’Israël, en mai 2025. (Crédit : Sotheby’s)
Tout comme le Codex Sassoon, il avait été acquis par Sassoon dans la première moitié du 20ᵉ siècle, puis par Safra dans les années 1990, avant d’être remis aux enchères l’an dernier.
« La Torah de Shem Tov, également connue sous le nom de Sefer HaYashar, représente le summum de l’érudition biblique et kabbalistique de la période médiévale », a déclaré le Dr. Chaïm Neria, conservateur de la collection judaïque de la NLI, dans un communiqué.
« Son ajout à la collection de la NLI constitue une ressource inégalée pour l’étude du développement de la Massorah [tradition de transmission biblique] et des traditions textuelles et artistiques juives, en particulier celles de l’Espagne. »
Conformément à la tradition juive qui consiste à embellir les objets rituels, le manuscrit présente des ornements artistiques s’inspirant de motifs chrétiens et islamiques contemporains, notamment des arcades, des arcs gothiques, des cadres dorés et des représentations d’oiseaux et d’animaux.

La Torah de Shem Tov, datant du 14ᵉ siècle, a été exposée en mai 2025 à la Bibliothèque nationale d’Israël. (Crédit : Bibliothèque nationale d’Israël)
« Recevoir ce manuscrit, en particulier à l’occasion de Shavuot, qui célèbre la remise de la Torah, revêt une signification profonde », a déclaré Sallaï Meridor, président de la NLI, dans un communiqué.
« Après avoir voyagé de l’Espagne à Jérusalem, Bagdad, Tripoli, Londres et Genève, la Torah de Shem Tov a bouclé la boucle et est maintenant de retour chez elle, à l’endroit même où le rabbin Shem Tov ben Abraham Ibn Gaon a vécu et où il souhaitait qu’elle se trouve, en terre d’Israël, et maintenant à Jérusalem », a-t-il ajouté.
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